Eh ils sont bizarres dans cette école, mais tu t'y plais de plus en plus. Les autres enfants sont très serviables, et en plus de ça ils ont très vite accepté de te couronner roi. Bon pour l'instant t'es roi du refectoire mais bientôt tu seras roi de l'école, un jour même tu seras roi de Sajna!! T'y crois fort Arsene, tout le monde est très gentil avec toi.

Alors que toi t'es infect avec eux.
Assis sur un siège placé en hauteur sur une table, tu jettes de la nourriture sur tes sujets, un groupe d'enfants de ta classe t'apportant leurs assiettes comme des offrandes. Tu t'es improvisé une couronne, celle en carton qu'on donne au propriétaire de la fève pendant l'épiphanie. Mais t'as pas besoin de la fève pour être roi, toi. Tu l'es juste, c'est comme ça.

— « BEURK DE LA PUREE ! »

Tu grimaces et shootes dans l'assiette qu'on vient de t'apporter, l'envoyant s'écraser sur le visage de Nelson, un petit bigleux à lunettes. Tu sautes de ton siège pour t'accroupir vers lui, écrasant sans mégarde certains plats au passage en y enfonçant tes semelles. Tu lui souffles tes phéromones à la figure après lui avoir ôté ses lunettes tâchées de purée.

— « Ouin... Nelson tes verres ont protégé tes yeux.. snif »

Tu attrapes une assiette pleine de pates et lui écraser bien lentement, avant de lui crier dans les oreilles.

— « TON ROI VEUT DES FRITES JE VEUX DES FRITES VA M'EN CHERCHER »

tu te relèves et lèves la baguette de pain.

— « Les autres !! à genoux !! Priez votre seigneur »

Ils sont tous en effervescence, ça te réconforte au fond de les voir se bouger pour toi - ça te fait oublier que tes parents s'en fichent que tu sois là et que tu sois tout seul en fait ; ça te fascine, on dirait des petites fourmis qui s'aglutinnent autour de leur roi. Le Roi des insectes dans cette énorme fourmillière.

Une nouvelle entre dans la cantine et tu n'y fais pas attention. Pas tout de suite, du moins jusqu'à ce qu'elle fasse voler les assiettes. Evidemment, ça attire ton attention et tu relèves la tête, foudroyant la fille du regard. Elle a un problème cette garce ? T'es prêt à claquer des doigts pour qu'elle tombe sous ton charme et rejoigne l'armée des fourmis. Mais une assiette vole de nouveau et tu la suis du regard, comme fasciné.

— « ...????? »

La purée s'étale dans ta couronne et tu pousses un hurlement, l'enlevant et secouant les cheveux pour envoyer la purée sur les autres aux alentours.

— « TOI ! PETASSE ! »

Tu descends de la table pour aller la rejoindre. T'as l'air furieux, t'es rouge de rage. Tu l'attrapes par le col et lui mets un coup de pied dans le ventre pour qu'elle s'étale par terre.

— « Allez rampe ! divertis moi le roi ! »

Comment ça c'est pas beau de dire des gros mots ? C'est trop bizarre parce que c'est pas beau d'envoyer de la purée sur les autres aussi et pourtant elle le fait. Elle est contradictoire ! T'en as vraiment ta claque, elle est méchante et hargneuse. Pourquoi elle ce qu'elle te sert pas docilement comme les autres ?

— « Comment ça moche ?! AAAAH TU ME MORDS SALE TRUIE ! »

Tu secoues ta cheville comme un fou pour lui faire lâcher prise, mais es projeté sur le sol. Elle s'assoit sur toi pour t'y maintenir et tu restes penaud pendant quelques secondes - incapable de te défendre. T'es trop choqué par le fait que t'es en train de te faire mettre minable par une fille ! Tu protèges ton torse en croisant les bras puis profites d'une ouverture pour lui choper un mèche de cheveux et tu tires de toutes tes forces.

Vous roulez sur le carrelage sale et tu essaies de reprendre le dessus, lui assènes une claque au niveau de visage.

— « C'est toi qui est trop moche ! Excuse toi ! Crétine, crétine ! T'es trop bête ! »

Tu veux qu'elle t'aime comme les autres;
Mais d'un autre côté t'aurais l'impression de te mentir (encore) ; de plus être capable d'avoir des relations normales avec ceux qui t'entourent.
Claques des doigts difficilement pour la mettre en ton pouvoir. Tant pis pour demain, le coeur est épuisé d'aujourd'hui.

Elle te fait serrer les dents, surtout quand elle affirme qu'elle ne sera jamais ta copine. Tu veux pas de cette folle dans tes amies ! Mais d'un autre côté, ça t'énerve et ça te frustre trop... t'es borné Arsene, tu vas pas lui laisser le choix. C'est toi qui décide ceux qui méritent de graviter autour de toi, pas l'inverse. Tu te serres toi même des plus gros poissons dans cette petite marre.

— « Moi je déteste les moches qui tapent ! »

Le voilà, le changement de caractère. Encore sonné par la gifle, tu profites de sa docilité temporaire pour reprendre ton souffle. Elle a l'air trop bizarre dans cet état là mais c'est reposant, rassurant. Les autres élèves toujours en cercle autour de vous, tu les foudroies du regard.

— « Dégagez ! Laissez-nous ! Dégagez je vous dis ! »

T'as l'oeil qui brille quand elle te demande gentiment de partir. Ah ! Elle fait moins la maligne maintenant ! Tu te reposes beaucoup trop sur ton pouvoir Arsene, comme si c'était ton seul bouclier valable.

— « Non ! Tu vas rester mon esclave pour la journée ! »

Regard noir, t'es impitoyable même à dix piges.

— « Et ton maitre te demande d'aller lui chercher des frites. Compris ? »

C'est à la fois satisfaisant et en même temps très désagréable. Capricieux du pouvoir, la voir obéir à tes désirs et à tes ordres ne te donne que l'illusion (que tu sais éphémère) d'avoir gagné. En vérité, c'est une joyeuse farce dont elle a prit le rôle principale. L'air fermé, tu la laisses faire, au fond un peu touché qu'elle ait sacrifié son gilet pour te remettre d'aplomb. Mais en te rappelant que c'est quand meme à cause d'elle que tu es dans cet état, tu hausses les épaules comme pour te persuader que c'est normal après tout.

Tu vas t'installer à table et la scrutes, te concentres de toutes tes forces pour que ton pouvoir ne la lâches pas d'une semelle, même si pour ça tu dois relâcher les autres.
Quand elle revient tu observes les frittes d'abord en faisant la gueule puis les manges méticuleusement une par une. Tu te surprends à sourire, visiblement satisfait.

Sauf à sa remarque. Tu la juges de ouf.

— « Tu peux parler toi, t'es une crevette. »

La fixes à manger sa pomme. Ça te coupe l'appétit et tu pousses l'assiettes, t'accoudes à la table et la libères de ton pouvoir en plissant les yeux. C'est pas amusant avec cette fille.

— « Dégage mocheté. »

Tu restes de marbre, à la contempler comme si c'était la plus belle chose que tu n'aies jamais vu de tes yeux d'enfant. Un joyau qui n'est précieux que parce qu'il nous rappelle toute la haine qu'on porte au fond de soi. Tu libères finalement le sort parce qu'elle arrive à être encore plus fade quand elle est forcée.

Elle se demande légitimement ce qui lui est arrivé et tu croques dans la pomme que tu lui as pris des mains. Tu hausses les épaules, comme désintéressé par la réponse. Il est à noter que ton comportement a toujours été étrange tant il est versatile - passe aisément du tyran hystérique au lunatique méprisant et mutique.

Elle te demande une veste et tu répètes.

— « Pars mocheté, je t'ai dis. »

Grimaces et finalement lui jettes ta veste à la figure.

— « Pour la purée je me vengerai c'est une promesse croix de bois croix de fer tu pourriras en enfer. »

Mais non c'est pas ça Arsene.