Mains dans les poches t'arrives en cours le matin. Un peu décalqué par le ciné de la veille, encore victime des réminiscences de la soirée de la plage. A croire que c'est un nouvel exploit : se taper une gueule de bois complexe sur quatre jours d'affilé. Tu tiens plus aussi bien l'alcool que tu le voudrais - ou alors t'es juste malade à force d'abuser sur les horaires tardifs du coucher.
Bref, tu bailles bruyamment et va pour t'installer à ta place (celle du milieu au troisième rang) mais elle est prise par un de ces petits cons de geek. Tu fais même pas l'effort de lui expliquer, tu lui pointes juste la place de derrière et prend ses affaires pour les foutre sur la table ou il va aller s'installer sans rechigner. C'est ce qu'il fait d'ailleurs, ayant surement la flemme de chercher la merde avec toi (et de perdre donc).

— « Une belle journée chiante qui s'annonce. »

Penses-tu tout haut alors que tu cales tes bras croisés derrière la tête. Prends de la place en t'étalant sur le pupitre de derrière, soupirant. Le prof n'est pas encore là mais tu entends un groupe de mecs s'agiter un peu plus loin. La voix désagréable de Mason Hargreeves parvient à ton oreille. Apparemment il y aurait un devoir à rendre pour ce matin. Hein ? T'étais archi pas au courant c'est quoi ce délire. T'es plutôt assidu en cours et ça t'aurait échappé ?

— « Tu déconnes c'est ça ? Ils vont sérieusement m'achever dans cette école de débiles. »

Prends en compte son avertissement très au sérieux, tu te retournes déjà pour faire face à ta tête de turque préférée.

— « Dis moi Billy ? Et si tu me passais ton devoir ? »

Tu uses de tes phéromones. Trop rapidement, trop facilement. Hypnotise presque le pauvre Billy de tes charmes qui bafouille, ne comprend pas ta requête mais sort automatiquement la dissertation à rendre pour la semaine prochaine. Les yeux dans le vide et les joues rouges il te tend la copie manuscrite et tu en profites pour lui arracher des mains.

— « Merci mon petit chaton. Et du coup tu diras au prof que tu l'as oublié. »

T'es beaucoup trop con Arsene. Crédule quand il ne faut pas alors que tu te méfies habituellement des plus innocents. Le combo fatigue et impatience t'a rendu à cran et tu penses encore à tort que ta position dans cette école te rend intouchable. Le professeur arrive à ce moment là et t'interpelle. Tu feins un sourire désolé et ravale ta fierté. Tu décales ta tête pour offrir à Mason un regard plus qu'assassin. Tu vas le crever pour ça. C'est sa faute - un coup monté abject qu'on fait pas au roi a moins de vouloir lui couper la tête.

A aucun moment tu te remets en question, juges ta propre attitude abusive et déplacée. Non tu soupires en te raclant la gorge et rends sa copie froissée (volontairement) à Billy. L'écrase dans tes doigts et lui jette sur la tête. Le pire c'est que tes plus fidèles sujets te trouveront toujours des excuses. "Il était fatigué." "Il était de mauvaise humeur." "Le pauvre le prof lui a mal parlé." C'est affligeant pour ceux qui distinguent ta vraie personnalité mais à cause de tes groupies tu préfères t'enfermer dans une attitude victimaire. Bras croisés sur ton torse tu te jures de lui faire payer.

Quand le professeur te colle tu arques un sourcil et souffle par les narines. Toi ? En retenue ? Un scandale. Mais soit. Tu réponds sous le coup de l'insolence, un sourire mielleux aux lèvres.

— « Pas de problème monsieur. Je serais ravi d'abandonner l'équipe de natation ce soir pour faire ce devoir dans une salle encore chargée de transpiration. J'espère que vous serez là pour me gracier de votre compagnie. »

Mais tu le sais, il le sait - tes phéromones n'ont aucun effet sur lui et contrairement a certains de ses collègues tu n'as jamais été son préféré.

***

Le dit soir tu patientes devant la porte, en réalité dégoûté de ne pouvoir aller nager. Si tu abuses de tes privilèges Hawkins nous devrons te les retirer jusqu'à ce que tu les mérites de nouveau, avait menacé ce connard de prof.
Causes toujours tu m'intéresses.

Tu t'installes au dernier rang, t'es tout seul. Même pas un surveillant pour te surveiller il revient te chercher dans deux heures. Quelle blague. La copie devant toi tu commences à gratter quelques mots. La chance que tu sois un bon élève quand tu t'y mets vraiment.

Soupire alors que d'un oeil tu fixes ton téléphone posé sur la table. Icare ne comprend rien à rien ça te gonfle. Tu décides de le ranger dans ta poche et de continuer de rédiger quand une voix désagréable fait siffler tes oreilles. Sans même lever la tête tu l'ignores mais la pointe de ton stylo tremble sur la copie, s'enfonce au travers du papier et tu apaises ta rage - la domines. Etires finalement un petit rictus en coin.

— « Je crois qu'on me parle mais j'ai du rêver. »

Mason Hargreeves. Ce faux-jeton. Lui-même. Tu te redresses sur ton siège et bombes le torse. Claques la langue sur ton palais. Tss. Tu plisses les yeux et le dévisages d'une haine froide. Comme si t'étais à deux doigts de lui jeter ta frustration au visage. Finalement c'est un pouffement méprisant qui s'échappe d'entre tes lèvres.

— « Non. Il me manquerait un café. Tu voudrais bien aller en chercher un pour moi trésor ? »

Serres les poing sur la table, ton tel vibre encore mais quelle importance. En ce moment précis il n'y a que lui. Tu veux l'écraser de tout ton poids, lui éclater les cotes.

— « Et ta tête comme coussin. »

Tu fais craquer tes doigts et te lèves, prédateur. Tu sais que t'as ton pouvoir au cas ou, pour le faire craquer - pour le mettre à genoux. Tu sais pas pourquoi en cet instant t'en rêves autant.

— « C'est quoi ton problème avec moi au juste ? La dernière fois ne t'a pas suffit, je t'obsède ? »

Insupportable. T'as envie de lui péter le nez, de prendre sa tête et de le forcer à te lécher les pompes. Parce que c'est tout ce qu'il mérite ce petit cafard à lunettes. Mais tu restes confiant. Tendu mais confiant. Il ne semble pas avoir peur de toi, et si ça peut te désarçonner - t'es habitué aux fortes têtes, et tu sais comment les mater.

— « Et toi t'es tout de suite moins à cheval sur tes principes maintenant que t'as plus la migraine. »

Il crache enfin la pilule. Son problème c'est toi. Tu inspires, expires par le nez et sans émettre un seul sourire. Tu le savais, ce mec est obsédé par toi c'est pas possible autrement ? Tu avances lentement et prudemment, les mains derrière le dos.

— « Ah vraiment ? C'est parce que je te regarde pas assez c'est ça hein ? »

Sans prévenir tu balaies du pied la chaise sur laquelle ses pieds reposaient. Tu profites du fracas et de sa perte d'équilibre pour l'allonger sur la rangée de tables assez violemment, avant qu'il n'utilise son pouvoir redoutable. Ses deux poignets bloqués par une de tes grandes mains. L'autre se forme en poing et vient se loger dans son épaule pour l'enfoncer un peu plus contre les pupitres.

— « Tu vas me le payer pour ce matin. Tu préfères que je t'humilie avec mes phéromones avant ou après t'avoir mis une raclée ? »

Tu sais que tu dois profiter maintenant d'avoir l'avantage avant qu'il ne puisse percevoir tes mouvements futurs.
Tu siffles entre tes dents.

— « Je me souviens pas t'avoir fait quoi que ce soit, asshole. »

A part la dernière fois.
Ou sur le lit d'infirmerie il n'y a que toi, moi et nos désirs effroyables.

Son injure t'arrache une rictus victorieux. Alors que tu le tiens fermement contre les tables, tu réfléchis aux milles et une façon de lui faire payer pour ce matin, pour lui faire regretter d'exister (tout simplement). Il grogne et tu appuis derechef sur son épaule dans un rire plein d'assurance. Fronces les sourcils quand il te provoque - notamment sur le sujet des phéromones. Ça pique parce qu'il vise juste. Et si tu te laisses désarçonner pendant quelques secondes (ça se voit sur ton visage) tu fais grandir de nouveau une risette large et lâche.

— « La ferme. T'es pas le premier à me tailler la-dessus et tu seras pas le dernier non plus. La vérité c'est que ça vous agace plus que tout. »

Et toi aussi.
Ça te rend fou. Tu veux qu'il te regarde différent - tu veux être au dessus des autres dans son champ de vision mais t'as compris assez rapidement qu'à défaut d'être le numéro un tu devras pester d'être relégué à la place de numéro deux.
A force de bavasser ou de rêver (whatever...) il te donne un coup précis pour te faire chuter. Dans un sale sourd vos torses s'épousent et ton bras se retrouve bloqué par le sien. Prisonnier d'une intimité dont tu ne peux plus prétendre être dégoûté, tu mimes tout de même une moue un peu scandalisé.

— « Qu'est-ce que tu branles tafiole ? Je vois que les populaires ça t'excite. Si on en croit les rumeurs t'es frustré de pas pouvoir te rapprocher de ton cher président. Désolé mais les mecs c'est définitivement pas mon délire alors je vais pas te consoler. »

Et pourtant la lueur dans tes yeux trahit ton appétit.
Celui du fauve et de la Bête, ça gronde dans ton bas ventre et ton pantalon devient vite trop serré. Tu lui laisse pas le temps de te sentir que tu lui assènes un coup de tête pour le sonner. En profites pour te redresser, mais tu glisses sur le sol en lino, tires sur sa manche pour le renverser avec toi dans un bruit de fracas épouvantable.

Les chaises au sol et vous au milieu de tout ce bazar, t'as pas le temps de te demander ce que les professeurs pourraient en penser s'ils vous surprenaient.
T'es un peu KO par la chute, l'arrière de la tête un peu sous le choc et lui sur toi - tu puises et cherches de la force pour essayer de vous retourner.

— « Dégage de là bouffon ! Tu m'écrases les cotes ! »

Tu le chopes par le col pour le repousser grossièrement alors que tu te redresses sur tes coudes. Le fusilles du regard, passes ta langue sur tes lèvres.

— « Qui vit dans une illusion ? J'ai un royaume et toi une équipe de débiles qui savent que courir sur un terrain. »

Sourire.

— « J'ai tout ceux que je veux, et toi ? »

Tous sauf toi.
Je te v e u x.

Non seulement tu es con mais en plus tu es conscient de l'être. Tu en ris de cette situation, du pouvoir que tu as qui te permet d'être une grosse merde et d'être quand même admiré par une bonne partie de l'école. Tu jouis de ces privilèges factices que tu t'es inventé et te moques véhément de gens qui se permettent d'être humbles ou lucides. La vérité c'est que tu aimerais que les autres aient autant d'ego que toi - pouvoir leur faire la guerre pour leur prouver que le tien est bien plus écrasant et dévastateur.

Tu veux le corriger, instantanément alors toujours un peu sonné par le coup tu étires un grand sourire charmeur.

— « Mais SI ! J'ai tout ce que je veux car je peux tout avoir. Bien sûr... haha... »

Tu ne peux pas t'empêcher d'être dédaigneux et rabaissant. Au fond de toi ça te rassure.

— « Il y a des choses que je veux plus que d'autres... »

Scarlet.
Icare.
Gauthier.
Mais tu les as déjà et il n'y plus aucun challenge - juste le privilège malsain de la possessivité exacerbée.
Et il y a lui - Mason.
Qui assume, quelle bonne blague. T'es trop égocentré pour comprendre qu'il parle de toi. Hausses un sourcil et étouffes un juron quand il appuies sur tes épaules. Te cales contre le sol. D'habitude c'est toi qui prend les devants, voles baisers et dignités - amours propres et chasteté. Tu n'avais pas prévu que ce puisse être lui qui craque le premier, après toutes ces insultes piquantes et salées.

— « ???? »

Pas le temps de réagir que tes lèvres s'enivrent des siennes. Tu ne comprends pas pourquoi et comment elles ont pu venir les chercher alors que tu n'as pas activé ton pouvoir sur lui. Tu n'as rien pris de force, il s'est offert de lui même. Quand vos langues se frôlent et que ton bassin se cambre, se gonfle malgré toi alors qu'il te rebute. Putain. Tu tournes brusquement la tête pour qu'il arrête. Regardes dans le vide sur le coté avant que tes pupilles uniquement remontent sur lui. Amères.

— « Tu t'es cru un peu trop à l'aise là, non ? »

Malgré le fait que tu aies l'air sévère et agacé, t'as quand même un demi sourire esquissé à la commissure des lèvres.

— « C'est la meilleure. Mason Hargreeves me saute dessus. »

Tu lèves les yeux au ciel. Prétend soupirer puis lui assènes un coup de genou dans les cotes, en profites pour le retourner et ainsi le chevaucher.

— « T'en pouvais plus de te toucher en pensant à la dernière fois ? »

Tu penches la tête pour souffler dans le creux de son cou. Cette fois c'est toi qui est trop à l'aise.

— « Je te l'avais dit. Je suis dans ta tête et tu m'as dans la peau. »

C'est toujours plus facile de lui décharger la faute alors que c'est toi qui a amorcé ce jeu.

Monseigneur qu'il dit... la bonne blague. Tu grognes face au sarcasme et gonfles le torse, rétorques par un marasme. Tu ne supportes pas que ton corps te trahisse et ce de la pire des manières. Ses doigts à ton menton retrace la trajectoire du droit chemin et tes yeux assumeront jusqu'au bout ce qu'ils voient devant eux : Hargreeves victorieux et souriant. C'est désolant de perdre autant en une journée.

Tu ne peux t'empêcher de rougir (de colère) lorsqu'il prend position sur toi, appuies de son postérieur outrancier sur ton entrejambe un peu trop serrée dans ce pantalon. Casses les couilles de devoir l'admettre mais ouai. Tu bandes.

— « Ta gueule, clochard. Reflexe de merde car mon corps t'a confondu avec une minette en chaleur voilà tout. Faut dire Mason que tu fais bien la fille c'est perturbant. »

Ses doigts posés sur ton bas ventre, même par dessus le t-shirt tu sens ton souffle se saccader. Mason qui te demande d'assumer - qu'est-ce que tu n'as pas et que tu voudrais ?
Impérieux tu passes ta langue sur ta lèvre pincée et rétorques :

— « Le Monde. Tu peux me l'offrir ou c'est trop dur pour toi ? »

Tu donnes un coup de rein pour le faire sursauter, tressaillir. Le surprendre aussi, un peu. Tu n'essaies plus de te dégager ou de reprendre l'ascendant.
Tu te gorges de fierté, préfères croire que tu l'as naturellement. Si tu penses contrôler la situation, alors elle ne pourra pas te bouffer.

— « Toi aussi. »

Sourire.

— « Tu bandes. »

Tu le mérites le monde, tu le mérites plus que n'importe qui ici. Toi, Roi incontesté de cette école, des Somusiens qui eux s'élèveront en maitres incontestés de cette Terre parasitée. Tu n'as pas perdu ton objectif et tu étais sérieux, quand tu exiges à ce qu'on te remette ce monde, pris en otage par ceux qui osent vous dominer et vous opprimer. Il est dommage que l'étalage de tes convictions soient noyées par cette intensité qui déborde de vos yeux et de vos lèvres. Tu assistes à un naufrage Arsene, et n'est pas certain de vouloir sauter du navire. Hypnotisé par les mouvements de sa bouche qui fond sur son doigt dans des vas et viens lents et sensuels, tu te sens arriver à maturation.

Il n'y plus rien à méditer, tu deviens fou.
Tu ne cherches plus à résister, tu es fou.
Fou de lui, et si tu n'avais pas mis en laisse ta fierté tu te serais jeté à ses pieds pour en (a)voir plus.

— « Parce qu'il me revient de droit. »

Toujours sur cette question qui attendait désespérément une réponse. Censurée par la chaleur humide du doigt qui vient lentement s'insérer entre tes lèvres. Les dents sorties, Mason comprends et avertit. Le regard brule de défi chez toi Arsene, mais tu restes calme. Lui offres avec un faux-plaisir la satisfaction de ta coopération plutôt pacifique. Tu enroules ta langue autour de son index pour le retenir prisonnier et relèves le haut de ton corps pour que ce soit ta bouche qui glisse et non son doigt. Tu remontes la prise jusqu'à sa troisième phalange et relâches la pression de ton palais pour le libérer.

— « Doucement... Mason. »

Ses putains de main sur ton torse. Il mérite des gifles mais en cet instant tu ne sais pas trop où est-ce que tu voudrais lui coller ta main.

— « A ta place je ne serais pas aussi confortable. »

Dans cette situation c'est toi qui perd si tu te laisses aller.
C'est lui qui gagne dans tous les cas ; à te faire fuir ou à te faire craquer. C'est un enfer que tu n'arrives pas à supporter mais que tu refuses de fuir. Parce que perdre n'est pas dans ton vocabulaire ni dans ta personnalité ? Il est terrible d'avoir été piégé de la sorte parce que chaque résistance glorifie sa victoire, son déni nourrit ses espoirs et rentrer dans son jeu te rendrait aussi vulnérable à la menace qu'au chantage.

Tu te redresses pour le choper par le col, frôlés vos lèvres pour réinstaller cette tension moins concrète que les caresses, plus excitante aussi.

— « Je déteste être le second choix Mason. Le numéro deux n'est pas fait pour moi. Je suis le numéro un. »

Tu lui mords la mâchoire, descends pour couvrir son cou de baisers chauds et furieux. Tu t'accroches à la cravate de son uniforme pour le maintenir dos droit et serrer son col à mesure que tu l'embrasses.

— « C'est pas moi que tu veux baiser. Ou peut-être que si, mais c'est à lui que tu penses. Et ça tu vois... ça m'insupporte. »

Parce que toi c'est à un autre lui auquel tu penses.
Vous avez chacun le votre.