Les jointures de ses poings amochées.
Le front égratigné.
Plusieurs côtes fêlées. Une cassée.
Tu as de la chance que ce ne soit pas plus grave, lui dit-on.
Tu devrais cesser de te battre.Achille sourit, amusé. Il regarde le personnel hospitalier, ces gens qui font comme si sa santé leur importait. Ces gens qui, chaque semaine, l’accueillent, le ton mielleux, pour sa foutue psychothérapie. Mais ils s’en branlent, pas vrai ? Sur cette île, tout le monde n’est que du chiqué. Des façades.
Il le
sait.
Et toi aussi, tu le sais.
Il n’a pas de remords, Achille. Jamais. En tout cas pas de ceux qu’il pourrait assumer.
Mais pour autant, il s’est installé sur le fauteuil usé qui borde ton lit. Parce qu’il sait qu’il a déconné. Il est allé trop loin.
Son corps est recouvert de bandages, déjà masqués sous son t-shirt noir. Ses cheveux sont en bataille. Et il te regarde.
De ses pupilles acier, il fixe ton visage endormi.
Réfléchit.
Certes, il est allé trop loin. Mais c’est quoi, ton problème ?
Pourquoi tu cherches toujours la merde ?
C’est de ta faute, et uniquement de ta faute. Ou peut-être pas ? Putain, il en sait rien. Il se souvient plus, persuadé que c’est la faute de ces fucking pilules. Enervé, ses poings se serrent sur les accoudoirs.
Puis il la revoit. Cette
vision.
Achille soupire, renverse la tête contre le mur.
Il sait pas combien de temps passe. Il ne compte pas, les pensées en pagaille.
Puis il entend ta voix.
Son menton s’abaisse, ses yeux retrouvent les tiens. Muet, il te regarde t’installer – et galérer. Ne crois pas une seconde qu’il serait du genre à t’aider.
La hargne sur le bout de tes lèvres, l’impatience, il peut pas s’en empêcher ; Achille sourit.
- J’viens pour t’étouffer, connard, ça se voit pas ? Il soupire, tique de la langue en se penchant vers l’avant, pose ses coudes sur ses genoux. Le mouvement lui fait mal, mais Achille s’en fout. Tu viens à peine de te réveiller et déjà tu le cherches. Déjà tu le saoules. C’est un peu une prouesse, au fond. Ce manque d’instinct de survie.
Alors il ne te quitte pas, lui non plus.
Observe. Cherche à décrypter.
Calme la bête qui gronde dans ses entrailles. Celle qui voudrait aboyer.
- Tu devrais me r’mercier.Le sourire provocateur, il balaie rapidement ta silhouette avant de revenir à tes yeux.
- Premièrement, pour t’avoir arrangé le visage.Ses dents mordent instinctivement sa lèvre inférieure, l’expression à mi-chemin entre l’humour, la séduction et l’insolence.
Allez Nath, détends-toi.
- Deuxièmement, pour t’avoir montré que ton prétendu frère pouvait ressentir autre chose que du dégoût te concernant. C’était pas gagné. Un léger rire.
Mais c’est vrai, et tu le sais.
- Enfin troisièmement, car maintenant tu feras peut-être un peu plus attention avant de me provoquer.Comme un avertissement.
Pourtant ses yeux brillent. Car tu l’intrigues, Nath.