Le psy qui avait besoin d'un psy.

Ft Edward

Ta respiration est saccadée. Tes mains, moites. L'air, lui, manque à l'appel. Absentéiste défaillant à ton coeur qui s'enrage et cogne. Il cogne contre les parois de sa prison, affolé, désespéré.
Te voilà essoufflée, chaque inspiration est maintenant sifflée, tu voudrais prendre le temps de souffler - court, cours, continue de courir, la course n'est pas terminée. Elle est moins courte que ce que tu prévoyais, bien trop longue par rapport à ce que tu imaginais. Tu vas bientôt le rattraper, les fibres de cotons effleurent le bout de tes doigts que malheureusement ta maladresse  laissent filer, s'éffiler et s'envoler. Le vide comblé par la distance, le voilà en train de s'évader.

Voilà que ta proie s'est échappée.


Ces piliers qui te servent de jambes manquent de bientôt de s'effondrer. Alors tu mets fin au dégâts. Tu t'arrêtes, stop, et respire enfin. Tu offres à tes poumons ces bouffées qui lui avaient tant manqué. Mais toujours insolente vis-à-vis de ton organisme tu t'obstines à interrompre sa dose vitale d'oxygène.Ta mission est ta priorité, c'est pour ça que tu te mets à crier :

 - ATTENDS ! T'ES SÛR QUE TU VEUX PAS REJOINDRE LE CLUB GOOD GUYS !?

Voilà. C'était là l'objet de ce marathon acharné. Le club que tu avais rejoint, toi, Kai Bint'Ismail, était maintenant presque vide. Il ne comptait plus qu'un membre sans te compter - son chef, un certain Noah. Éloigné, sans s'arrêter de courir, celui que tu avais tenté d'embrigader tourne sa tête vers toi pour te répondre - le visage terrifié.

 - FOUS MOI LA PAIX ! SALE FOLLE, C'EST TOI QUI ME HARCÈLE !

Ah. Bon sang ! Ce malheureux n'avait pas toute sa tête. Toi, harceleuse ? Non. Tu ne le suivais que depuis 4 jours en lui demandant, à toutes heures, de rejoindre le Club. Tu avais également transmis de nombreuses lettres lui expliquant à quel point cet endroit était génial, ainsi que les offrandes que tu avais pu remettre dans sa chambre à laquelle tu n'étais pas censée avoir accès - des livres expliquant les impacts du harcèlement sur le développement d'un adolescent - n'avaient pas réussi à le convaincre. Aussi, le fait que tu viennes l'interrompre en plein milieu de sa douche pour tenter de le persuader ne lui avait pas vraiment plu..  et depuis ce potentiel membre n'avait de cesse de te fuir comme si tu incarnais la peste.

Malgré tous tes efforts, Kai, tu n'arrivais pas à comprendre pourquoi si peu de gens étaient engagés dans l'effort à mener contre cette maladie qui gangrènait ce pensionnat.
Les moeurs se perdaient donc t-ils !? La justice n'intéressait donc plus la jeunesse ?!
Défendre le Nerd et l'orphelin... Ceci, était un combat qui méritait beaucoup plus d'attention que l'occultisme, ou l'athlétisme, ou, la musique...

Tu te laisses tomber sur la verdure les bras étendus, flyers de propagande à la main. Tes courts cheveux ébènes te chatouillent les oreilles, et ton éternel sweater oversize laisse passer la fraîcheur bienvenue de l'hiver.

Un ciel épuisé, bientôt prêt à sombrer dans le sommeil s'étend dans toute son immensité devant tes yeux. Toi aussi, tu sens que tes batteries sont sur le point d'être vidées. Alors tes cils se déploient en guise de couverture face à la lourde réalité de la vie, des responsabilités, et de la fatigue. C'est un euphémisme, Kai, parce que tu es lessivée, et quand bien même tu en viendrais à dormir, cet état ne te quitterait pas. Mental est l'épuisement, massif est le contenu de la poitrine. Mais tu souris. Parce que tu sais que les choses finissent toujours par s'arranger, alors l'espoir, tu le gardes sous le bras comme un bon ami à toi.

Lorsque tu ouvres les yeux et regarde autour de toi, tu aperçois une silhouette, pas loin. Ta croisade n'est pas terminée. La Sainte mission que tu as de convertir des élèves au GoodGuyism est primordiale. Alors tu te redresses, toujours assise dans l'herbe.

 - Hé, pssst, par ici ! Tu fais signe à cette silhouette de venir. Viens. Viens ici ! Ça te dit de rejoindre le club Good Guys ?