Même après cinq mois, Ana n’avait pas réussi à faire le tour de l’Île. Sajna était si grand, si pleine de surprise. Chaque jour qui passait depuis qu’elle y avait mit les pieds étaient un tourbillon de malheur, car elle faisait face à une tout autre réalité. Celle de l’endroit dans lequel son frère vivait depuis plusieurs années, lieu qui lui correspondait bien plus que la pourriture des Melnikov.

Quant à ses pas aujourd’hui ? Ils l’avaient guidé jusqu’à la ferme, plus précisément même, le centre équestre. Ana connaissait les fermes, leur utilité ainsi que leur fonctionnement bien qu’elle n’en avait jamais vue auparavant. La grandeur et les divers champs qui semblaient sans fins l’effrayait, tandis que la saleté du lieu familier. Le centre équestre ? Elle avait cru comprendre qu’il était possible d’y monter des animaux, plus communément appeler chevaux ou poneys. Ana n’en avait jusque là jamais aperçu, si ce n’était sûr une image.

Alors, c’était troublée qu’elle se retrouvait face aux bêtes. Ils avaient beau être loin d’elle, enfermé dans le box ou courant dans des champs. C’était l’inquiétude d’un nouveau monde qui lui faisait face. Leur grandeur qui n’avait de toute évidence pas été pensée. Quand bien même Ana souhaitait faire comme les autres, elle ne savait pas s’y prendre.

Mais une voix sifflote à ses côtés ; sursaut de surprise. Ana se retourne, s’imagine tomber nez à nez avec un titan, mais il n’en était rien. Sourcils froncés, qu’elle le pointe du doigt.

« Rose ? »

Sa chevelure, qu’elle n’en avait jamais vue pareille flamboyance. Comment était-il même possible de naître avec des cheveux roses. Et alors, son attention qui se porte non loin, l’attention d’Ana qui s’échappe et ne dur jamais très longtemps.

« Ça c'est un cheval. »

Qu’elle pointe alors, l’animal un peu plus loin. Grogne ensuite, plutôt sauvagement. Acquiesce de la tête. S’il lui était possible de faire du cheval, elle ne cracherait pas sur l’opportunité. Bien qu'elle ignorait totalement comment elle pouvait monter sur un animal aussi massif.

Il confirme ses dires, se présente ensuite. Chaya, un prénom qui passe par une oreille pour ressortir par l’autre. Ana qui alors, un certain élan de fierté d’avoir fait un sans-faute, bien que ça ne changerait pas grand-chose à sa journée. Et encore moins sa vie. Le rose virevolte son regard, s’avance alors d’un box différent de celui qui lui faisait face. Ana incertaine, s’avance alors. Le suit à petit pas, ignorant tous de ces manigances.

Sur la pointe des pieds alors, elle observe l’animal bicolore. Animal bien plus petit, bien moins massif que tous les autres croisés auparavant. Était-elle soulagée à l’idée de savoir qu’il existait des chevaux plus petits ? Evidemment.  Et alors qu’elle s’apprêtait à questionner Chaya d’une grimace, afin de savoir ce qu’il fallait faire pour dominer telle bête. Qu’il avait déjà disparu.  

Finalement reste bredouille lorsque le garçon l’abandonne. Elle l’avait bien entendu, évoquer un président et du Popcorn. Haussement d’épaule qu’elle vient s’approcher de la porte du box. S’y agrippe et tente de passer sa main pour tapoter le museau de l’animal. Et c’est lorsqu’il expire de ses naseaux, qu’Ana recule de surprise. Désemparée par la violence du cheval. Plutôt étrangère à l’inconnu et leur réaction. Fait comme si de rien était, bien que ses traits paraissent bien plus colériques que l’ordinaire.

Le rosé revient chargé, délègue ses objets à la collégienne. Un « Ugh » qui s’échappe alors, face aux poids soudain. Ana qui n’aimait pas les surprises et encore moins les moqueries ; pourquoi diable avait-il besoin d’un tel accoutrement ? L’incompréhension, car pourquoi devait-elle charger un animal avant de pouvoir monter sur son dos ? Du moins, si c’était bien de cette manière que l’on montait sur un cheval.

Grincheuse, regarde le sol et la selle. Un instant d’hésitation pour finalement le poser au sol. Boudeuse, elle n’avait aucune envie d’être comparer à une mule sans la moindre explication.

« C’est pour quoi. »

Agressive qu’elle demande, mais sans la moindre forme d’interrogation. Car à ses yeux, la meilleure des questions étaient l’attaque. Comme bien d’autre chose, d’ailleurs.

« C’est lourd. »

Oui, ça l’était. En plus d’être bizarre et contraignant.

« Popcorn va devoir le porter ? »

Grimace canine.

« Je veux pas tomber. »

Clair, net et précis. Cela faisait sens dans son esprit, sans réellement y trouver le fondement. Il est vrai que vue le physique de l’animal, elle aurait beaucoup de mal à monter sur son dos. Plus encore, à y rester lorsqu’il commencerait à marcher. L’idée alors, qu’il était évident que sans équipement, elle finirait à terre à force de glisser.

Tout comme Ana n’appréciait pas qu’on lui donne des ordres, d’autant plus avec une telle facilité. Tout lui semblait si logique, à ce garçon aux cheveux rosées, qu’elle en était déboussolée. Le doute faisait alors sens et malgré tous ses sentiments négatifs, Ana récupéra l’attirail dans un énervement certain. Mais le monde était contre elle de toute façon, que pouvait-elle faire d’autre ? S’acharner sur lui, de corps ou d’électricité ? Que cela ne tienne, Ana n’ignorait pas l’instabilité de sa personne. Et elle n’était pas monstrueuse au point de risquer de causer des blessures à des animaux qui n’avaient rien demandé.

Alors elle avait cette sensation malsaine d’être dominée, d’être un esclave. Bien que sa notion des choses soit, de toute évidence, totalement faussée. Quand bien même Ana portait les affaires, quand bien même elle l’avait écouté d’un œil mauvais, en déposant l’attirail sur la barre qui lui avait été montré.

« Tu partages tes brosses avec les chevals ? »

Qu’elle questionne, naïvement. Une grimace de dégout qui prend forme sur son visage. Il était à ses yeux question de bon sens, comment pouvait-il se coiffer le matin en sachant qu’il avait brossé un cheval qui s’était amusé dans la boue la veille ?

« C’est fréquent de faire ça ici ? »

Parce que si oui, elle était bien heureuse de ne jamais en avoir entendu parler avant. Plus encore, elle aurait préféré ne jamais le savoir et de fait, ne remettrait sans doute plus jamais les pieds au centre équestre.

Troublée alors, Ana vient poser sa main sur Popcorn pour reculer d’aussitôt, en réaction à son léger déplacement. Avale sa salive bruyamment, inquiète un peu. Quand même, par cet inconnu.

« Pourquoi je dois le brosser alors que j’ai rien fait encore. »

Elle hausse les épaules.

« Il peut pas se laver tout seul en plus ? »

Elle lève les yeux au ciel lorsqu’il la reprend sur ses mots. N’arrive pas à percevoir la différence lorsque le son est haché par son traducteur. Hausse des épaules avec simplicité, balaye toute possibilité de comprendre le problème : du moins, s’il existait réellement un problème. Car Ana s’en moquait éperdument de toute manière.

« Moi je me lave seule, j’ai besoin de personne. »

Que ce soit pour se laver ou dans sa vie. Les autres étaient source de problème et de déception. La comparaison était pourtant bien pensée, mais il fallait ici faire question de logique dans les paroles que l’on tente de faire comprendre à Ana. Elle qui n’aime pas l’étranger, mais fait face à un tout nouveau monde, à un tout nouvel animal qu’elle n’avait jusque-là jamais vue d’aussi près. Alors malgré tout ce qu’on tente de lui expliquer, elle est dure d’oreille. N’arrive pas à comprendre le sens et son utilité.

« Il est si fragile que ça. »

Qu’elle interroge sans aucune tonalité. Certains d’entre eux avaient l’air si imposant qu’ils devenaient soudainement très misérables. Comme quoi, la taille de l’animal n’était que trop peu représentative des dangers probables. Pourtant. Pourtant, elle hésitait. Brosse en main, le bras qui ne savait que faire. Même face aux gestes du rose, et aux divers tests qu’il présentait aux yeux de la jeune russe.

« Il va m’écraser non. »

Qu’elle montre les dents un court instant. Le regard posé sur l’animal.

« J’en suis sûre. »

Mais malgré ses paroles, profite du fait que Chaya soit collé à lui pour tenter quelques mouvements – qui n’avait rien de très engageant et engagés. S’arrête pourtant frénétiquement, comme une statue en danger à chaque mouvement de queue ou de son corps. La peur, l’incompréhension face à ces nombreux éléments.

Ana qui fait tout de même preuve d’un certain effort, même si la volonté semble s’envoler. Elle ne s’imaginait pas que faire du cheval pouvait être aussi chiant et fatiguant.

« C’est bon là ? »

Qu'elle toise du regard celui qui cherchait pourtant à l'aider.