Bienveillante - Rancunière - On ne lui marchera pas sur les pieds - Tête en l’air - Mélancolique de temps en temps - Curieuse - Douce - Sereine - Intrépide - Observatrice - Émotive

Aider les gens est une seconde nature pour Lily-Rose, elle passe son temps à arranger des conflits entre amis et à faire en sorte que tout le monde soit ami avec tout le monde. Quitte à se mêler de ce qui ne la regarde pas évidemment. Elle observe beaucoup Lily et elle le voit quand deux amis se font la tête. Pour elle c’est insupportable, il faut les aider. L’amitié est le plus beau cadeau que peut offrir le monde, elle n’hésite pas à donner un coup de pouce aux inconnus pour le leur offrir, ce magnifique cadeau.


Toujours à faire les mauvaises rencontres, elle préfère être cette personne qui aide mais sans nouer de liens forts. C’est terrifiant. Ils pourraient la trahir, comme sa plus chère amie l’a fait il y a longtemps. Ou peut-être ne l’avait-elle pas fait ? Ce qui est sûr c’est qu’elle a fini par lui tourner le dos. Alors elle traîne avec des gens mais souvent quand on parle de sentiments, de souvenirs ou d’avenir, elle s’efface et se fait toute petite. Lily-Rose ne peut pas se confier aux vivants, au moins un mort est une vraie  tombe.


Elle paraît un peu bête, la blondinette. A sursauter quand on lui pose une question en cours, son regard paniqué finit par se baisser dans un “Je ne sais pas” répétitif. C’est surtout qu’elle n’écoute pas, et se déconcentre trop facilement. C’est fou de redécouvrir le monde à chaque instant comme ça. Comme un poisson rouge qui n’en a pas fini de faire le tour de son bocal. En même temps, quand un mec que personne d’autre ne voit passe devant la porte en faisant le singe, pourquoi s’intéresser à un type assis sur son bureau qui lit ses notes ?


Elle est douce la demoiselle mais elle mordra quiconque l’embêtera. Elle n’est pas idiote au point de se laisser marcher dessus. Une pincée de sale caractère sur une douceur crémeuse. Ça lui donne un goût amère. Quand on l’embête elle le fait payer, en plus elle en a les moyens. Et quand vous êtes dans son collimateur il faut des excuses à genoux pour qu’elle vous lâche.

Au creux d’une vieille et grande maison de ville familiale - elle ressemblait presque à un manoir - la petite Lily-Rose au nom de fleurs grandit dans la chaleur d'un foyer. Une grande famille aisée nichée dans Londres. Ils vivent à plusieurs générations sous un seul toit, aux pièces dérobées. C’est la grand-mère gâteuse qui s’occupe de la petite quand ses parents sont au travail et que le grand frère est sur les bancs de l’école. La grand-mère raconte des histoires toute la journée. Elle parle de sa propre enfance, des nombreux amoureux qu’elle a eu et de ceux qu’elle a jetés. Une amie incroyable qu’elle a perdu tôt. Des journaux intimes à n’en plus finir. Elle lui parle aussi de ses parents, ceux qui sont trop occupés pour venir la chercher au jardin d’enfants. Elle fait aussi office de manuel d’histoire vivant.


Dans une autre de ces grandes maisons parsemant le quartier a toujours vécu une petite fille de l’âge du grand frère de la blondinette. Depuis toutes petites elles se font coucou depuis leurs fenêtres. Elles ont l’air aussi seules l’une que l’autre dans leurs grandes maisons vides. Bientôt la fille de l’autre côté traverse la route en regardant bien à droite puis à gauche puis à droite. Elle toque un grand coup à la porte, quand Lily-Rose lui ouvre l’autre lui tend une de ses poupées.


A deux pour écouter les histoires de la vieille dame qui tousse de plus en plus, Teresa - la voisine - s’impose comme un vrai modèle de grande sœur. Elle coiffe la chevelure dorée de sa Lily et lui donne des conseils pour se faire des amis à l’école. Elle l’aide aussi à faire ses devoirs entre deux dinettes avec Lapin Lapinou et Monsieur Tigre. Le grand frère la voit rivale, et entre en compétition sur les conseils à donner à la plus petite. L’une explique qu’il ne faut pas hésiter à partager son goûter quand l’autre lui dit que si l’un veut lui prendre son goûter il faut sortir les dents et les cailloux. Ces petites compétitions font rire aux éclats Lily-Rose. Elle teste avec ses petits camarades les deux méthodes, pour noter ses expériences dans un petit carnet comme le fait sa grand-mère avec les recettes. Ou les ragots des voisins.


Les voisins, parents de Teresa, se vantaient alors d’accueillir une nouvelle personne dans leur foyer. Cette nouvelle intriguait beaucoup la petite blonde. Le ventre de la voisine n’était pas tout arrondi comme avait pu lui expliquer sa grand-mère. Et à l’entendre en parler, Lily-Rose aurait juré que c’était un petit caniche qui allait entrer dans leur vie. La grand-mère tousse un peu plus. Encore plus. Alors que le caniche n’arrive jamais dans la maison d’en face et qu’à la place c’est une petite fille qui arrive valises à la main, ce n’est plus sa grand-mère qui vient chercher Lily à l’école. C’est la même femme que celle qui donne sa soupe à la cuillère à la vieille dame. Elle ne raconte presque plus d’histoires. A la place, la petite passe du temps dans la chambre de sa mamie à compléter un grand puzzle. Elle franchit aussi la route, se réfugie chez Teresa. Elle n’avait pas l’air méchante la nouvelle arrivante, c’est la première chose que Lily avait pensé. Mais son amie lui répétait que c’était une intruse et qu’en réalité elle n’avait rien à faire là. Charlie était méchante. Alors que Lapin Lapinou et Monsieur Tigre prenaient toujours le thé, on versait du sel quand Charlie entrait dans la pièce. Teresa parlait et Lily-Rose hochait la tête. Apparemment cette jeune fille embêtait Teresa et Lily soutiendra toujours ses amis.


Alors que 2012 commençait, son amie Teresa grandit. Elle ne voulait plus autant jouer à la poupée, comme aucune de ses amies à l’école. Pourtant Lily-Rose adorait toujours ses poupées. A la place chez la voisine d’en face on jouait à de nouveaux jeux. Teresa s’amusait à faire des blagues à sa nouvelle sœur. Par la fenêtre, d’un coup d'œil, la blondinette vit des lumières danser devant sa maison. Elle courut la rejoindre. Du camion rouge sortaient des hommes en uniforme, les uns entraient dans la maison, les autres parlaient à la maman de Lily. La petite court, court jusqu’à la chaleur maternelle. Effrayée, sans même savoir pourquoi, les larmes lui montaient déjà aux yeux. Sa maman lui expliqua que mamie était très malade et que les docteurs la soigneraient dans un hôpital spécial. Sortant de la maison, une civière sur le brancard, des bras protecteurs l’empêchaient de regarder. Après ça, tous les jours elle demandait à tout le monde “Quand est ce que mamie rentre à la maison ?”. Tout le monde détourne les yeux et l’ignore. Une journée toute en noir passe. Le soir, en enlevant les rubans des cheveux de sa fille, la mère apporte les journaux intimes de la vieille dame. “Mamie nous a dit qu’elle voudrait que tu les ai Lily.” Elle lui avait parlé ? Mais alors, quand est ce que mamie rentrera à la maison ? Elle ne reviendra pas. Finalement une réponse. Elle n’allait pas à la petite. Elle voulait que mamie revienne. La nuit, le journal préféré de sa grand-mère entre les bras, Lily-Rose sanglote.


Et là, la douce voix de sa grand-mère fit frissonner son oreille. Elle était au pied de son lit. Lily lui posa des tonnes de questions sur l'hôpital et son retour. Les réponses étaient vagues, hésitantes. Elle semblait surprise que sa petite fille lui adresse la parole. Au levé, Lily-Rose trouvait le monde différent, ses parents aussi la trouvaient différente mettant ça sur le coup du choc d’avoir perdu sa précieuse mamie. Dans un coin de sa petite chambre il n’y avait pas que Monsieur Tigre et Lapin Lapinou, il y avait aussi William, Grace ou Judith. William mettait du lait dans son thé. Grace le préférait sans sucre et Judith détestait le thé. Ils étaient drôles ces nouveaux amis, et ils parlaient bizarrement. Tous les soirs sa grand-mère lui lisait quelques entrées de son premier journal intime. Puis un jour il avait disparu. Plus de journal. Charlie a raconté que c’était Teresa qui l’avait volé. Teresa ? Sa précieuse amie. Plus jamais elle ne lui parlera, même si elle le lui rend. C’était décidé. La petite était inconsolable, même ses nouveaux amis n'y faisait rien. Son frère, dans la même classe que cette peste voleuse, s’était même mis en tête de la venger. Et l’affaire s’embrouilla, ce n’était plus Teresa mais Charlie la voleuse et le grand frère ne savait plus à qui il devait mettre une raclée. Et Lily ne savait plus à qui se fier et qui lui rendrait ce qui lui appartenait. Elle voulait juste le retrouver alors que ses parents la disputèrent plusieurs mois durant pour son manque de vigilance. La petite craqua.


Mais personne d’autre qu’elle ne la voyait. Mettant ça sur le coup du surplus d’émotions, ils décidèrent de l’emmener voir un psy. La blondinette ne voulait pas en démordre, elle voyait sa grand-mère, comme elle voyait William, Grace et Judith dans la maison. Comme elle voyait dans le cabinet, le monsieur qui se tenait derrière le psy, l’air protecteur. Le professionnel demanda à la petite de lui décrire ce monsieur. Alors elle s’y attela, en rigolant de temps en temps aux remarques inaudibles pour le psy du monsieur de derrière. Le visage du professionnel de la santé mentale se décomposa et il laissa Lily toute seule dans la salle le temps de passer un coup de fil.