Matter to You

Détales les escalirs, vite, vite, plus vite, t’as mal au ventre Sylvestre, ça te tord les entrailles, n’oses même pas te tourner pour regarder. Et s’il te suivait ? Et s’il te rattrapait ? T’as à la nausée presque Sylvestre alors que les larmes roulent encore sur tes joues, et ta respiration au bord du gouffre, alors que tu frôles la crise de panique.

Tu tombes avec fracas des escaliers, ton corps qui s’étale, écorche tes genoux, écorche tes coudes avec douleur, ls gens qui s’écartent, se moquent, et t’as plus la force de te redresser, plus à la force Sylvestre, tu es juste toute seule, tu ne peux même pas appeler Ezra, tu ne sais même pas s’il t’ouvrirait la porte de sa chambre tant il t’évite en ce moment.

— ça fait mal….

Comme si les maigres mots allaient soulager la douleur, te redresse un peu toujours assise par terre, ton sac au creux de tes bras, sort quelques bouts de téléphone brisé.

— Ezra…

Tes cils qui papillonnent jusqu’à tomber sur cette fille qui ne te dit pas grand-chose, mais qui semble être la seule à ne pas se moquer, à t’éviter, et à cet instant Sylv, t’aimerais qu’elle soit ton amie, quelqu’un qui te tendrais la main. Mais qui tends la main à un second rôle ? Ton corps qui se redresse pour revenir sur tes pieds, tes genoux rougis, douloureux, comme ta nuque.

— Si tu viens finir le boulot c'est pas la peine

L'habitude de se faire bully qui parle.

matter to you

elle a tout vu. absolument tout. sans y prêter attention, au début. parce qu’elle a appris à pas s’en mêler. à passer à côté des histoires de cours de récré. parce que ça ne la regarde pas ou pour se protéger. parce qu’il vaut mieux longer les murs sans faire attention, être discrète et passer son chemin.
mais surtout, parce que ce n’est pas agréable pour la personne concernée d’en avoir 20 qui regardent. et ça, andrea le sait. le harcèlement est déjà assez compliqué comme ça, et elle ne souhaite pas en rajouter une couche en faisant office de public non désiré.

cependant, quand le ton est monté, quand les cris ont fusés,  qu’elle a reconnu la voix d’arsene, puis celle d’icare... quand elle a pu voir à quel point c’était grave, c’était trop tard. elle n’a pas pu s’en empêcher.
elle a écouté, et elle a observé. sans rien dire, en silence. elle aurait dû intervenir, peut-être. mais elle a pas eu le courage ni le temps de s’interposer entre le roi et sa soeur. par chance, icare et noah l’ont fait.
heureusement.

alors évidemment, elle n’a pas tout compris. la situation lui échappe en partie. et puis, comme d’habitude, c’est juste arsene qui joue au con. ça arrive. trop souvent, mais, ça arrive.
sauf que d’habitude, arsene il n’étrangle pas les gens.
sylvestre a pu s’enfuir, grâce à l’intervention des deux autres garçon. alors, andrea, fusillant du regard le leader des populaires, s’est empressée de se lancer à la suite de sylvestre, devant le regard indifférent, les rires et les sarcasmes des autres élèves.

“hey.”

elle la retrouve là, effondrée au pied des escaliers, les genoux arrachés et le souffle coupé. son cœur se serre. elle déteste la voir comme ça. elles ne se connaissent pas, mais l’empathie fait son boulot.
elle qui est d’habitude toujours souriante, son visage est impassible. trop sérieux. trop préoccupé.
parce que c’est grave, ce qu’il vient de se passer.

“non.” elle d’habitude si bavarde, elle ne prend même pas la peine de se justifier. elle enchaîne. “c’est laquelle ta chambre ? faut pas que tu restes là. vient, on va se mettre à l'abri."

dans un signe d'apaisement, elle s’accroupie et lui passe la main dans les cheveux pour enlever ses mèches rosées qui lui tombent sur le visage. puis, elle lui prend la main pour la relever. et l'emmène jusqu’à sa chambre, en lui serrant la main bien fort, pour lui montrer qu’elle est là.
elle a le visage toujours aussi fermé, andrea. elle a de la colère qui bout au fond d’elle.
elle a du mal à l’appréhender, elle qui est d’habitude si joyeuse et douce.
mais là, c’est non.
elle peut pas.
elle peut pas accepter ça.

Matter to You

C’est doux, presque rassurant lorsqu’elle glisse ses doigts à tes mèches rebelles pour les replacer, ça te rappelle Thomas, ton grand frère, celui avec qui tu passais le plus de temps, qui t’as donné l’amour de l’informatique, qui te protégeais du moindre bobo. Tes doigts qui se glissent à sa main, redresse ton corps, efface tes larmes d’un revers de manche, l’entraine avec toi, doucement.

— La chambre 12 , je doute que ma coloc sera là.

Voix un peu enrouée, compliquée, alors que tu forces un sourire, c’est dur, tellement dur alors que d’habitude ça te semble si simple de le feindre ce sourire, quand vous arrivez à la porte tu le ferme, tes mains toujours tremblantes, alors que tu reprends doucement ton souffle.

— Installe toi, je euh…j’ai ds sodas, des plaids, euh…

C’est étrange tout ça pour toi Sylv’, à part Ezra personne ne vient jamais dans cette chambre, parce qu’il est ton seul ami sur cette terre.

— Merci, de ne pas…t’être moquée. Je m’appelle Sylvestre mais ls gens qui me supporte m’appelle Sylv.

Tes doigts qui massent doucement ta nuque comme pour faire disparaitre le bras de Arsene que tu sens encore contre ta trachée, ramène les larmes que tu tentes d’étouffer.

— Quelle mauvaise idées de courir dans les escaliers hein, la course contre soi-même je conseille pas, sauf avec des coussins aux jambes !

Tu tentes quoi Sylvestre, d’oublier ? De croire que ce n’est pas arrivé, ce serait mieux que cela ne sois jamais arrivé.

matter to you

la chambre 12. très bien. andrea s’y dirige sans se soucier des bruits et regards qui traînent et les observent. les deux filles passent enfin la porte, coupant leur lien avec le monde extérieur et les regards étouffants.
les épaules se détendent instantanément. chez sylvestre aussi, le sourir feint disparaît.

“ne t’en fais pas pour moi. toi, installe toi. pose-toi. c’est fini. t’es en sécurité.”

pauvre sylvestre qui, après tout ce qu’elle vient d’endurer, essaye tout de même d’accueillir andrea. ça lui serre le cœur une fois de plus. elle n’a pas besoin de se soucier de ça pour le moment, pas besoin d’ajouter une charge mentale en plus après ce qu’elle vient de subir.
non. il faut qu’elle prenne soin d’elle. à tout prix.
andrea se dirige vers le lavabo, attrape un verre pour le remplir d’eau. il faut que sylvestre boive. pour sa gorge irritée.

“tiens, bois un peu. ça va te faire du bien. et, si tu as du miel, on peut faire une tisane et en mettre un peu pour ta gorge, si tu veux.”

sylvestre se présente, avec sa voix cassée et fébrile. signe des larmes qui commencent à monter, sans doute.
andrea lui souris.
avec une douceur et une bienveillance infinie.

“pleure si tu en as besoin, sylvestre. c’est normal, ok ? tout va bien. tu es en sécurité.”

elle répète les derniers mots, pour la rassurer le plus possible.

“tout va bien.”

tout ne va pas bien, non. évidemment que non. la situation est terrible. mais pour le moment, andrea juge qu’il vaut mieux se reposer et prendre soin de soi. que toutes ces angoisses et ces problèmes attendront un peu. là, il y a besoin de repos, de réconfort, et d’un endroit safe.

“moi c'est andrea. je suis en classe F, au lycée. je suis désolée pour ce qu’il t’es arrivé, sylvestre. sache que, tu n’es pas obligée de parler si tu n’as pas envie, d’accord ? et tout va bien. je suis là.”

andrea lui sourit, demande d’un signe de tête si elle veut s’assoir sur ce qu’elle devine être son lit. l’accompagne pour qu’elle se pose et qu’elle relâche un peu la pression. la brune dépose une main sur son épaule, dans un signe d’accompagnement.
elle la laisse boire, reprendre son souffle et ses esprits. patiente, accompagnante, concentrée.

“ça va mieux ?”

elle se dit qu'elle aurait peut-être dû lui demander si ça allait, pour que sylvestre ne se sente pas obligé de dire oui si ce n'est pas le cas, mais tant pis. andrea n'a pas vaiment le temps de se poser ce genre de questions existentielles.

Matter to You

C’est étrange comme de simples mots auxquels tu n’aurais pas pensé te semble tellement juste. Etre en sécurité, est-ce que c’est vraiment le cas, et pourtant tu ne te sens pas la force de t’asseoir Sylvestre, t’as l’impression que ton corps est encore sous le coup de l’adrénaline, qu’il a besoin de rester en mouvement, sur le qui-vive sans réelle raison. Après ça, t’allais surement raser les murs quelques temps. Le temps qu’il faudrait. Tout le temps. Tes doigts qui se serrent contre ton t-shirt.

— Merci

Ça te prends quelque longues secondes pour prendre le verre entre tes doigts, boire un peu, comme pour te ramener sur terre, tu te sens ailleurs Sylvestre. Flottante. Elle a juste à dire que tu peux pleurer pour que tes larmes hors de ta volonté viennent à jaillir silencieuses hors de tes prunelles. Tu te sens pathétique Sylv, autant que tu culpabilise, t’as été trop sotte.

— Ne sois pas…désolée. C’est rien. Tu n’as rien fait qui mérites que tu t’excuses en plus. C’est plutôt moi qui m’excuses.

C’est rien. Tu minimises Sylvestre juste pour t’auto convaincre, pour te sortir de cette torpeur qui te noue le ventre, te retourne l’estomac et les boyaux. Tu t’assois doucement à coté d’elle. Attrape comme un reflexe une des peluches sur ton lit, la plus simple de toute, un ourson, envoyé par tes frères. Et quand elle demande si ça va mieux, tu souris Sylv, du mieux que tu peux en hochant la tête.

— Oui, oui, merci. Les chamailleries entre fratrie hein, dans quelques heures ça ira mieux.

Mensonges, Tu sais pas qui te veux convaincre là. Mais difficilement toi-même. Alors que ta prise se resserre sur la peluche.

— Tu as des frères et sœurs Andrea ?

Tu te raccroches aux branches, à tout ce que tu peux en vérité. Le moindre sujet comme point de départ pour sortir ton esprit de ce qui vient de se passer. Pour tenter, peut-être vainement de revenir à hier, à la toi d’il y a quelques heures, celle qui n’a aps encore eu rendez-vous avec Arsene.

matter to you

andrea fronce les sourcils à la remarque de sylvestre. elle ne voit pas pourquoi la jeune fille devrait s’excuser. elle n’a absolument rien fait. mais andrea n’est pas dupe, elle sent qu’il y a une part de déni et de fuite dans ses réactions.
quoi de plus normal, après tout ? elle n’a pas toute l’histoire, mais sylvestre vient de se prendre un rejet plus que violent. et cela doit être très difficile à réaliser. surtout au vu de ce qu’il s’est passé, et dans quelle condition.

elle serre les dents rien qu’à y repenser.
si elle faisait 30 centimètres et 20 kilos de plus, elle en aurait foutu une à arsene sans aucun doute.
mais bon, andrea n’est personne d’autre qu’andrea.
elle lui ira deux mots, tout de même, après tout ça.

“oh, et bien… j’ai un grand frère !”

elle sourit à la question. elle repense à son grand-frère, nico. ça fait un moment qu’elle n’a plus de nouvelle de lui.
de trois ans son aîné, c’est lui qui l’a balancé au sujet de son pouvoir. il pensait bien faire, sans aucun doute. mais après ça, andrea eu à peine le temps de lui faire ses adieux qu’elle s’est retrouvée sur un bateau en direction de l’île, sans trop comprendre ce qui lui arrivait vraiment.

“je ne sais pas trop ce qu’il devient, pour être honnête. rapport à…  l’absence de contact avec l’extérieur…” elle affiche un sourire entendu. “on s’entendait bien, quand on était gamin. jusqu’à ce qu’on parte du mexique pour la france. moi, je voulais pas, mais lui, il était plutôt emballé. je lui en ai voulu, un peu. je me sentais trahie !” elle rit. “et puis, à l’adolescence, on a commencé à ne plus vraiment se ressembler et à être beaucoup moins proche qu’avant… je suppose qu’on a juste grandi et emprunté des voix différentes ? et puis, j’ai de toute façon dû partir pour sajna il y a maintenant bientôt cinq ans.”

elle lui parle un peu d’elle-même. elle se dit que ça pourrait permettre à sylvestre de se raccrocher à quelque chose. d’éviter de penser au reste.
elle repense un instant à sa famille. à l’aube de sa vie à sajna, elle était très nostalgique de sa famille et de son ancienne vie. elle avait mal vécu le fait de devoir déménager une deuxième fois, changeant encore totalement d'environnement. mais finalement, après 5 ans enfermée ici, elle s’était habituée et… elle n’y pensait tout simplement plus. attendant le jour où elle pourrait partir de l’île.

“pour te faire un bref topo… j’ai vécu les six premières années de ma vie au mexique, puis on a immigré en france avec mes parents ! c’était… pas fun, en y repensant. et puis, à 13 ans, j’ai dû bouger à nouveau pour sajna !”

elle remarque qu’elle monopolise la parole et d’un coup, elle a un peu trop consciente d’elle-même. elle respire profondément, pour se reprendre, et pour observer sylvestre. elle n’est pas sûre qu’elle aille véritablement mieux… calmée, oui, sans doute. mais elle a l’air toujours un peu abasourdie.

“et toi sylvestre ? tu veux me parler un peu de ta famille ? et, si tu te sens ok pour le faire, de ce qu’il s’est passé avec… arsene.”

sa voix s'essouffle en fin de phrase. elle n’est pas trop sûre de ce qu’elle lui demande, et ne veut surtout pas la forcer.

“c’est seulement si tu veux en parler, bien sûr.”

peut-être qu’elle ne devrait pas forcer comme ça, elle ne voudrait surtout pas la brusquer.

Matter to You

Tu te perds à l’écouter Sylvestre à te raccrocher au moindre chose qui te font regarder ailleurs, dans cet ailleurs que tu ne connais pas, cette vie différente de la tienne qui a des odeurs de fruits exotiques, d’épices, et la chaleur agréable du soleil d’été. Loin de la pluie de Londres, au Mexique. Tu rêves un peu Sylvestre à comment la vie devait être dans cette région du monde, dans cet endroit que tu n’as toujours vu qu’à la télé, puis elle évoque la France. Tu fermes les yeux, essaye d’imaginer cette vie qu’elle te conte par bribes agréables, par intimité surement parfois compliqué partagée.

— Cela n’a vraiment pas dû être facile de t’intégrer, par deux fois en si peu de temps.

Inspire doucement Sylvestre, alors que tu loges un instant ta tête contre son épaule, comme un geste rassurant.

— Tu me raconterai le Mexique ? Peut-être un autre jour, je ne sais pas, si c’est maladroit de demander.

Cela te prends quelques minutes pour revenir au sujet, parce qu’elle te demande en retour. Tu n’s pas sure par contre de vouloir évoquer ce qu’il vient de se produire par contre, tes lèvres pincées.

— J’ai qua..cinq frères. Tous plus grands que moi. Hormis Arsene aucun d’eux n’a de pouvoir, et je pensais que moi aussi jusqu’à y’a trois ans. Je suis arrivée comme toi j’avais treize ans. On a toujours été une famille plutôt soudé, on roulait pas sur l’or non plus mais ça allait.

Sourire doux à tes lèvres, ça te manque cette vie parce que tu réalises à quel point elle était simple et agréable. A quoi point tu la chérissais.

— Mes parents parlaient jamais trop d’Arsene, on m’a juste toujours dit qu’il s’était sacrifié pour qu’on ait une meilleure vie en venant ici. Je me le suis idéalisée toute seule, comme une idiote surement. Je me suis toujours entendu avec mes autres frères bien qu’on se chamaillait souvent, alors je pensais que ce serait pareil avec Arsene.

Un soupir à tes lèvres encore alors que tu glisses des mèches derrière ton oreilles, libère tes cheveux pour les laisser choir sur tes épaules.

— Je crois que je me faisais beaucoup d’illusions. J’imagine qu’il ne s’attendait pas à ça. Il a pas demandé à ce que j’existe et surement que je suis plus une honte qu’autre chose pour lui. Je suis une geek, je suis bruyante, j’ai pas les plus grandes qualités du monde.

matter to you

elle sourit à la remarque de sylvestre. parce qu’elle a cruellement raison. elle repense à son voyage vers la france, les aux-revoirs avec ses grand-parents, l’avion interminable… et le dépaysement total. la france et le mexique, ça n’a rien à voir.

“franchement, oui. surtout pour la france, en fait. je ne parlais même pas la langue, alors l’intégration a été compliquée… pour sajna, c’était difficile de revivre quelque chose de similaire mais… ça c’est mieux passé, je pense ? peut-être parce qu’ici je me suis retrouvée avec des gens qui me ressemblaient un peu ?”

enfin, somnusiens ou pas, les gens restaient des humains. avec leurs qualités mais aussi leur défauts. et toujours les mêmes histoires de rapport sociaux. il suffisait de voir comment ça se passait rien qu’au pensionnat… cette hiérarchie de classe, la course à la popularité et les enjeux d’apparences.
le lycée, c’est pas simple.

“je peux te raconter maintenant, si tu veux.”

dit-elle dans un sourire, caressant de sa main les cheveux de sylvestre qui vient de se poser sur son épaule, comme pour lui dire qu’elle peut rester, et revenir, se poser là.
c’est au tour de la collégienne de lui parler de sa famille. elle sent qu’elle culpabilise un peu, sur l’idée qu’elle s’était fait d’arsene. pourtant, ce n’est en rien de sa faute. elle ne pouvait pas savoir, elle ne le connaissait même pas.

et puis, ici aussi, les gens se fourvoient beaucoup trop sur son compte.
sur ça, andrea ne pourra pas la contredire. par contre, il y a quelque chose qui la dérange dans le discours de sa cadette.

“je pense que tu te trompes, sylvestre.” qu’elle souffle doucement. “t’es pas une honte pour lui. t'es pas une honte tout court. et tu n’as pas a en être une. on est une honte pour personne. ça ne marche pas comme ça.”

elle a du mal à rassembler ses pensées. elle fait la moue, cherchant ses mots.

“je veux dire… si quelqu’un tient à toi, cette personne devrait t’aimer qu’importe qui tu es, et respecter tes choix et ton identité, non ? on s’en fou de ton groupe au sein du pensionnat, en plus c’est tellement arbitraire et stéréotypé. on s’en fiche de ton nombres de défauts et de tes qualités. c’est pas ça qui fait ta valeur ? c’est comme ton orientation sexuelle, tes origines, ou ce que tu veux faire plus tard… on est personne pour juger, tu vois ?”

c’est maladroit, mais elle essaye. et puis, ça fait énormément écho à son propre vécue. son arrivée en france, son harcèlement et sa discrimination comme personne racisée… le collège et son lot de question identitaires. son orientation sexuelle, l’homophobie ambiante. puis la découverte de son artefact qui finit d’enfoncer le clou.

“j’ai vécu des trucs un peu pareil, tu sais… enfin, je crois. je ne veux pas comparer l'incomparable. mais ce que je peux te dire, c’est qu’une fois que t’as trouvé des gens bienveillants qui t’acceptent comme tu es, ça va beaucoup mieux.”

un dernier sourire, doux et sincère. elle y croit dur comme fer à ce qu’elle raconte. elle en est la preuve. cinq ans qu’elle est sur l’ile. elle a fait des rencontres merveilleuses. des potes qui ne la lâcheront jamais.
une nouvelle famille, peut-être.

“pour arsene… hm…”

elle réfléchit un peu. elle n’a pas envie de lui jeter que ce n’est qu’un gros con, au vu de l’idéalisation que sylvestre s’en fait. elle ne voudrait pas briser un mythe aussi violemment.
même si, bon.
là c’est quand même un gros con.

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Tu hoches doucement la tête, rassurée que l’intégration ce soit mieux passé pour elle, et puis ici au moins il y avait vraiment du monde de partout, de toute horizon alors tout le monde était un peu sur un pied d’égalité, tous arriviste, tous nouveaux à un moment donné, un point commun que vous partagiez tous.

— J’adorerai ! Raconte moi les paysages, oh et les nourriture ! Comment sont les gens ?

Débordante de question, d’énergie, c’etait comme si l’énergie était revenue embraser ton âme endormie, comme revivre un peu.

C’est doux de sentir sa main se perdre à tes cheveux, ça te rappelle un peu ta mère Sylv, un peu tes frères quand il te consolait après une chamaillerie ou une mauvaise note, c’était le bon vieux temps, celui qui te manquait le plus. Tu te redresses néanmoins à la suite, surprise, et touchée.

Tu sais pas si c’est ça dont tu avais besoin mais étrangement ça te touche plus que tu ne l’aurais pensé, les mots d’Andrea sont justes autant qu’ils sont doux, alors tu hoches la tête, tire un sourire agréable et sincère, dépose un baiser sur sa joue.

— Tu as raison. Je suis toujours à dire que chacun peut être, aimer comme il ou elle souhaite, et qu’on devrait les aimer pour ça, et que si ce n’est pas le cas on passe juste son chemin. Si Arsene ne m’aime pas, il y aura bien quelqu’un pour le faire pour ce que je suis.


C’est comme un poids qu’elle sent se retirer de ses épaules étrangement, doucement.

— Merci Andrea, vraiment. J’avoue que ça commence vraiment à aller mieux. Tu es vraiment adorable, j’aurais jamais pensé rencontrer quelqu’un d’aussi chouette que toi dans une situation comme ça. Tu es ma petite lumière de la journée, mais la plus jolie.

T’as ce coté enfant Sylv quand tu rencontres des gens qui voit plus que le role secondaire que tu as.

matter to you

elle rit en voyant l’enthousiasme de sylvestre à la mention de son pays natal. ça lui fait du bien de voir la jeune fille un peu plus joyeuse et ouverte. et ça lui fait du bien à elle-même de pouvoir parler du mexique à quelqu’un.
alors, doucement, les yeux brillants, elle se met à raconter.

“je vivais avec toute ma famille, quand j’étais petite. mon père, ma mère, mon frère… mais aussi mes grands-parents. c’était toujours animé à la maison, avec trois générations différentes ! mes grands-parents s’occupaient de nous quand nos parents travaillaient. les deux étaient super gentils. mon abualita… un peu plus sévère ! mon grand-père lui, nous laissait faire nos bêtises en nous couvrant, c’était vraiment chouette !”

elle rit à l’évocation de ces simples souvenirs. des pensées un peu nébuleuses, car elle était trop jeune pour que ce soit vraiment précis. elle se rappelle la douceur des traits de sa grand-mère. sa boîte de maquillage qu’elle volait pour peindre le visage de son frère. elle se rappelle le sourire de son grand-père. sa voix grave et rauque, signe de son âge avancé, mais terriblement bienveillante.

“mais le mieux… c’était ce qu’on y mangeait !! franchement, la france à côté, c’est pas fou. je préfère largement la gastronomie mexicaine. les enchiladas, les burritos et… le guacamole. tellement bon ! puis, là-bas les plats sont toujours à base de tortilla, de riz et d’épices. t’as plein de déclinaison possible, et c’est juste génial !”

grand sourire quand elle parle. elle se rappelle des goûts et des odeurs. de la chaleur du salon lorsqu’ils mangeaient tous ensembles… ça lui manque. indéniablement.
12 ans déjà, qu’elle est partie. c’est énorme, 12 ans. dire qu’elle y était retournée l’automne de ses 13 ans… découvrant alors son pouvoir. tout cela il y a 5 ans, bientôt 6.

“on ira au resto en manger, si tu veux, un de ces jours !” clin d'œil complice. elle en profite pour sortir son téléphone de sa poche. “tiens, d’ailleurs tant que j’y pense… prends mon numéro. tu peux m’appeler dès que tu as besoin ou des que tu t’ennuies. t’hésite pas, d’accord ?”

elle lui tends son portable, le numéro affiché, laissant le choix à sylvestre de le prendre ou non.
sylvestre qui semble aller mieux. acquiesce à sa remarque et lui dépose un baiser sur la joue. andrea est surprise un instant, mais finit par sourire, posant sa main sur sa tête pour ébouriffer ses cheveux. contente de la voir reprendre du poil de la bête.

“bien dit, ça ! t'es une belle personne, sylvestre. et tu mérites tout le bonheur du monde. promis.” pose à nouveau ses yeux sur elle, avec douceur. “je suis contente si ça va mieux, sylvestre. je peux rester encore un peu si tu veux, ou te laisser tranquille. c’est toi qui vois. et comme dit, t’hésite pas si tu as besoin de moi ok ? même juste pour passer du temps ensemble.”

elle ne l’avouera pas, car elle est persuadée d’avoir le rôle de grande-sœur en ce moment, mais les mots de sylvestre l’ont touchée. elle aime l’idée d’être une petite mais douce lumière dans le coeur des gens.

Matter to You

Tu bois la moindre de ses paroles, tu débordes d’intérêt pour tout ce qu’elle te raconte, pour ces histoires qui passent ses lèvres, ces souvenirs qu’elle partage avec toi, t’essaies d’imaginer Sylv, les couleurs, les visages, les gens, les rires, et surtout l’amour.

— Abualita ? ça veut dire grand-mère ?

Essaye d’apprendre au travers de ses mots, parce que ça sonne si beau à tes oreilles, si passionnée.

— Tu crois que tu saurais en faire ? Si on achète ce qu’il faut ? On pourrait se faire une session cuisine !

La mention du resto qui t’arrache un rire géné.

— Oh oui un resto bien plus facile c’est pas faux.

T’es surprise quand elle te donne son numéro, l’enregistre dans ton téléphone pour directement lui envoyé un petit émoticone mignon, qu’elle aussi est ton contact. Tu ne t’oserais pas à l’embêter mais le geste te touchait plus que de raison. Ça te tire le plus radieux des sourires à cet instant, la simplicité de l’échange d’un numéro pour réchauffer ton cœur abimé.

— Je vais dormir un peu je crois, je suis vannée. Mais Andrea…Merci vraiment. J’ai pas beaucoup d’amis ici mais j’aime à penser que tu en es un peu une désormais. T’as fait plus pour moi aujourd’hui que beaucoup en trois ans et t’imagine pas comme ça me touche.

Attends sagement son aval pour la prendre dans tes bras, la serre doucement.

— Si un jour t’as besoin de quoi ce soit, ce sera toujours avec plaisir, sache le. J’espère qu’on pourra reparler du Mexique, et que tu me parles de tes passions autour d’un bubble tea, ou autre.

Un dernier baiser sur sa joue.

— Merci. Vraiment.

matter to you

ça la touche vraiment de voir sylvestre aussi intéressée par ce qu’elle raconte. elle a peu eu l’occasion de vraiment parler de son passé à quelqu’un, sur cette île. peut-être parce que sajna, c’est un peu un nouveau départ, et qu’on force à aller de l’avant ? elle ne sait pas vraiment.

“oui, ça veut dire grand-mère ! et abuelito, c’est grand-père !” sourire rassurant."et tu sais, ton idée de faire nous-même à manger, c’est même mieux que le restaurant !! ce serait trop chouette, faudra se prévoir une soirée !”

elle est rayonnante. la rassure d’un grand sourire, parce qu’elle a sentie sylvestre vulnérable. elle s’est sûrement sentie bête dans sa proposition, écrasée par le restaurant. alors que non, l’idée est géniale. il n’y a pas à être gêné ou avoir honte.
finalement, sylvestre lui annonce qu’elle est fatiguée et qu’elle pense aller se reposer. andrea hoche la tête. la pauvre jeune fille n’a pas eu une journée des plus reposantes, et elle a grandement besoin de calme. dormir va lui faire le plus grand bien.

“ça marche ! et franchement, ne t’en fais pas. et n’oublie pas ce que je t’ai dis, d’accord ? ce n’est pas de ta faute, sylvestre. on ne se connait effectivement pas beaucoup mais… t’es une fille super, douce, sympathique, et à l’écoute. je suis contente, moi aussi, de t’avoir rencontré.”

elle le pense sincèrement. la compagnie de sylvestre lui a été très agréable. et sa curiosité sur le mexique lui a vraiment fait plaisir. andrea ne répond pas trop sur le fait d’en avoir fait plus que d’autres, parce que ça la touche trop, et qu’elle ne sait pas gérer ça. et parce qu'elle n’a pas l’impression d’avoir fait grand chose. elle a juste agit normalement, comme elle l’aurait fait avec tout le monde.
elle ne veut pas d’une médaille pour avoir fait preuve de gentillesse et de bienveillance. ça n’aurait pas de sens.

“je t’écrirai, mais je suis très chaud d’un bubble tea avec toi !”

elle se lève, dans un clin d'œil. l’idée lui plaît. des sorties insouciantes en ville, ou des après-midi à discuter de tout et de rien. ça pourrait être chouette, avec sylvestre.

“allez, bonne nuit. repose-toi bien sylvestre.”

lui rends son baiser, mais sur son front, protectrice. puis finit par se diriger vers la sortie de la chambre. lui faisant un dernier signe de main avant de disparaître dans les couloirs.