Les artistes ne te gênent en rien - au contraire, ils savent se montrer utiles dans leur créativité. Tu admires secrètement leurs talents, quand tu sais pertinemment que tu n'en as aucun spécifique. Tu es la personne la plus admirée de l'école, sans raison valable hormis ton charisme naturel et tes phéromones. Le pouvoir ne se mérite jamais, il se prend de force par celui étant le plus capable de marcher sur les autres. Et tu es capable, Arsene. Dieu sait que tu es capable.

Quinze heures à la piscine, c'est l'horaire parfait entre deux entrainements. Quand tu sors des vestiaires c'est toujours en maillot de bain, mais sans le bonnet et les lunettes. Tu te diriges vers celle à qui tu as donné rendez-vous ; parce qu'il faut bien qu'on te voit avec d'autres filles, si on veut dissiper ces rumeurs de merde avec Scarlet. Pas que ça te gêne, bien au contraire.
Tu la vois non loin du rebord, pétillante comme à son habitude. Te rapproches d'elle presque trop vite alors que tu entoures ton bras derrière sa nuque, la main se posant sur son épaule de l'autre coté. Vos visages trop proches, parce que tu aimes instaurer une intimité gênante, te délectes de voir leur vrai visage se dessiner sous les traits du malaise.

— « Salut, Andrea. »

Tu passes ta langue sur ta lèvre inférieure puis soupires bruyamment pour réfléchir. Mais ce que tu apprécies d'autant plus avec elle, c'est qu'elle ne se démonte pas, ou peu. Tu lèves les yeux au ciel, concentré sur sa question.

— « Ouai ouai. Vivifiant, comme d'habitude. Ça remet les idées en place, tu sais ? »

Sourire denté que tu lui offres, puis tu te décolles d'elle pour t'étirer, faisant saillir tes muscles, le corps parcouru de gouttelettes, s'échouant de tes cheveux encore mouillé.
Bon tu veux faire ça où et comment ?
Tu éclates de rire, visiblement moqueur.

— « C'est une proposition ? Je n'avais pas prévu d'écarter les cuisses avec toi Coles. Mais si tu me le demandes gentiment, je peux voir. »

Tu fais claquer ta langue sur ton palais puis prends un peu de distance pour occuper l'espace. Sans arrêter de sourire, d'ailleurs.

— « Prends-moi juste en photo, si tu le veux bien. Je veux des nouvelles pour mon insta, et tes shootings sont clairement les plus beaux. »

Tu t'accroupies et relèves le menton.

— « Tu peux faire ça pour moi n'est-ce pas ? »

Tes yeux la fixent, la dévorent d'un intérêt factice - tu l'encenses, la valides parce que c'est ce qu'elle attend de toi. Tu ne sais plus trop Arsene, si les gens trainent avec toi parce qu'ils apprécient réellement ta sympathie ou par intérêt mais tu joues le jeu à fond pour renforcer ces liens entre populaires et artistes. Aussi, tu reconnais avec sincérité le talent indéniable de cette fille pour la photo - alors toi aussi tu l'utilises n'est-ce pas ?

Elle te rembarre gentiment et tu lui étires un sourire denté. Toi amer ? Jamais de la vie. Elle est juste trop timide pour reconnaitre le potentiel de ça ; et à cette pensée tu désignes tout ton corps d'un mouvement de main.

— « Tu dois être folle pour ne pas vouloir me conquérir. Toutes les filles rêvent de m'avoir pour une nuit, ou pour une après-midi. »

Tu passes une main dans les cheveux, mimant une mine un peu déçue puis recules jusqu'au banc pendant qu'elle expose ses idées. Il est vrai, il est vrai - vous êtes là pour ça.

— « Va pour deux trois clichés, mais ensuite je veux des photos dans l'eau. Je connais ma tête mais je veux que tu montres un peu plus le reste. N'hésite pas à me sexualiser, ça va pas me tuer. »

Tu tapes la pose, assis. T'as les mains plaquées sur le blanc et le dos légèrement cambré, le menton relevé tu regardes du côté opposé, entrouvres un peu les lèvres. Tu sais y faire Arsene, mais tu la laisses aussi te guider pour qu'elle puisse mitrailler les clichés.

— « C'est bon pour cette partie ? »

Tu tapes un sprint jusqu'au bassin et plonges, la ligne du corps parfaitement alignée, les courbes déifiées. Nages sous l'eau quelques mètres avant de revenir pour croiser tes bras sur le rebord.

— « Dis moi Andrea, c'est quoi ma réputation actuellement chez les artistes ? »

La séance photo se déroule plutôt bien. Andrea écoute tes attentes et tu suis alors ses indications. Tu le sais, elle le sait - tout se doit d'être parfait car tu ne toléreras pas que tes expectatives soient revues à la baisse. Tu te sens à l'aise avec elle, et il n'est pas question de pudeur quand tu prends la pause.
Tu lui fais confiance quant au choix des meilleurs clichés, elle te les enverra par intranet plus tard dans la soirée. Tu espères qu'elle ne tardera pas trop, que tu puisses les poster sur tes réseaux sociaux. Même si par désarroi ils ne sont visualisés que par les habitants de l'ile.

Tu viens rapidement à lui parler des artistes. Vos relations sont étroites et t'as besoin d'en savoir plus. Est-ce que t'es apprécié de ce que tu penses êtres un des groupes les plus alliés ou est-ce que tu vis dans la désillusion ?

— « Faut dire que Matt aime pas grand monde. »

Tu hausses les épaules, te hisses pour t'assoir sur le rebord de la piscine. Pendant qu'elle déblatère, tu secoues la tête comme un chien qui tente de s'essorer. T'as bien fait trempette, maintenant c'est l'heure de la discussion.

— « Je vois. Alors tu trouves que c'est débile de juger sur une appartenance à un groupe ? Moi je trouve que c'est tout l'inverse. C'est humain de se ranger dans une case, surtout en société. Il y a ceux qui sont fait pour diriger, ceux qui sont fait pour suivre, ceux qui se soumettront parce qu'ils se laissent faire. Que seraient les geeks s'ils n'existaient pas pour se faire remettre à leur place par le haut du panier ? Que serait un sportif sans une horde d'artistes passionnés ? Que seraient les rebelles sans institution abusive ? On a besoin des autres, même si ça veut dire qu'on doit se détester ou se lécher les boules pour s'entraider. »

Tu étires un sourire cruel.

— « Et toi tu serais quoi sans les soirées qu'on organise ? Ou sans les Apollons comme moi qui te demandent de les prendre en photo ? »