Toujours à mettre son nez dans les affaires des autres, quel vilain défaut Charlie, pourtant elle ne peut s’en empêcher. Dire qu’elle s’est promis de ne faire gaffe qu’à elle, de vivre une vie d'égoïsme par simplicité, s’occuper d’elle-même n’étant pas une tâche aisée, les autres, non merci. Mais voilà, si c’était si simple de rester hors de la vie des autres, elle n’en serait pas là à marcher en direction des jardins du pensionnat. La brune soupire d’agacement alors qu’elle repense aux évènements de la veille, mais qu’est ce qui lui a pris… Sans tout ça elle serait pénarde dans sa chambre tandis que ces autres imbéciles s’amusent à jouer avec de la peinture. Sauf qu’il a fallu qu’elle perde son sang-froid une fois de plus et adieu la tranquillité.

La veille, en se promenant dans les couloirs du lycée, elle est tombée sur lui, Noah. Dire qu’ils formaient un si bon duo… La lycéenne a toujours regretté que les choses se soient terminées d’une telle manière, dire qu’elle se vante de ne s’attacher à personne, c’est encore un beau mensonge. Un poil nostalgique, ses sentiments ont refait surface en le voyant avec ce grand sourire entouré des autres populaires. Pourquoi a-t-il eu à changer comme ça ? Elle ne le reconnaît décidément plus et ne voit seulement qu’une plate copie de son jumeau. Alors face à ce spectacle, la belle n’a pas réussi à garder son calme et s’est approchée pour lui demander de la façon la moins polie possible de venir la rejoindre le lendemain matin dans les jardins. Après son élan de rage, elle est repartie tout en bousculant quelques Populaires entourant le garçon.

Maintenant, voilà qu’elle regrette son impulsivité. Mais quelle idiote, incapable de se tenir, sauf qu’il est désormais trop tard pour faire marche arrière. De toute façon, il est bien temps qu’elle vide son sac et qu’elle le confronte, Charlie en a tout simplement ras le bol de l’entendre tout nier en bloc. En retard au rendez-vous qu’elle a elle-même imposé, elle s’approche de Noah déjà assis autour d’une table de pique-nique. Elle lui fait un signe de la main en guise de bonjour, le visage complètement blasé avant de venir s'asseoir face à lui. “Je suis étonnée de te voir, je pensais pas que t’allais venir.” En même temps, vu la façon dont elle l’a invité, elle ne lui aurait pas reproché. “Bon, je vais pas passer par quatre chemins, surtout qu’on a déjà eu cette conversation. Tu en as pas marre de jouer au mec parfait ? Depuis… Tu sais quoi… Je te reconnais plus.” Finit-elle par ajouter avec un peu de compassion dans sa voix, car même si elle déteste le voir agir de cette manière, Charlie n’est pas un monstre.

La brune est bien naïve, comme si quelque jolies mots feraient renaître son ami. Elle qui a l’habitude de ne pas espérer, d’être négative au possible, pourquoi continue-t-elle de s’accrocher à lui ? Toujours à s’attacher trop vite, quel défaut. Défaut qu’elle déteste avoir et qu’elle fait de son possible pour éradiquer. Mais voilà la nostalgie qui fait surface, balayant tous ses efforts. Sauf qu’il est trop tard pour faire marche arrière, la demoiselle se retrouvant face à ses décisions bien trop impulsives.

Elle rentre directement dans le plat, et ce, très maladroitement. La lycéenne a du mal à gérer les situations impliquant un peu trop de sentiments et d’émotions, c’est bien trop compliqué pour elle. Même les sujets sérieux, c’est difficile, toujours à prendre tout à la légère. Alors elle grimace à l’écoute du mot “mort”. Charlie n’ose jamais le prononcer de peur de le blesser et surtout d'ancrer cet instant dans la réalité. Ils n’étaient que des gamins. Sauf qu’elle ne se laisse pas déstabiliser, du moins elle refuse de le montrer, cachée derrière son sale caractère. “Et ? C’est pas une raison pour le remplacer.” Dit-elle froidement, ne laissant apparaître aucun sentiment. Elle n’a jamais su faire dans la douceur, toujours trop honnête. “Tu crois vraiment pouvoir tout justifier sur sa -elle hésite un peu- ...mort ?” Peut-être qu’elle va trop loin, mais elle est incapable de connaitre la répercussion de ses paroles. Bien qu’elle puisse paraître sans cœur à cet instant, elle dit ça pour lui. Pour le retrouver, le vrai Noah, celui caché derrière ce masque de populaire, car il lui manque. Elle souhaiterait le lui dire, sauf que Charlie est trop fière, préférant se la jouer solitaire.  

Peut-être ferait-elle mieux de tout laisser tomber au final. Cette pensée lui traverse l’esprit un instant. Qui est-elle pour lui imposer ses désirs ?

Mais son égoïsme revient au galop.

Il lui manque.

Charlie ne croit pas un mot du jeune homme, peut-être car elle n’a pas envie de voir les choses en face, que lui a changé tandis qu’elle n’a pas grandi. Pourtant, elle ne cesse de penser que toute cette personnalité est juste composée d’artifices couvrant celui qu’il est vraiment, et ça, la brune ne peut l’accepter si facilement. “Arrête de mentir, tu ne vas pas me faire croire que tu ne te forces pas à adopter cette attitude de “monsieur le populaire parfait.” À croire qu’elle est dans sa tête à lâcher de telles affirmations. “Arrête ton petit jeu Noah, pas avec moi.” Car elle en n’a rien à faire qu’il joue un rôle face aux autres, mais elle veut au moins qu’il soit honnête avec elle, savoir que son ami d’enfance existe encore.

Sauf que cette amitié ne semble être qu’une illusion désormais. “Ami”, qu’est-ce que cela peut bien signifier lorsque la personne en face a tant changé ? Pourtant, elle ne veut pas lui faire de mal, lui qui a déjà tant souffert suite à son deuil. Sauf que Charlie à du mal à comprendre les sentiments des autres, ça ne se calcule pas, ils peuvent être imprévisibles parfois, et ça, ça la terrifie. La lycéenne se repose tant sur son intelligence pour tout contrôler, sauf qu’elle est incapable de prendre en compte les sentiments des autres, alors elle finit toujours par blesser. “Tu penses que j’ai envie d’être amie avec quelqu’un de faux comme toi ?” Lâche-t-elle froidement. Charlie ne sait pas faire dans la douceur, et puis, à quoi faire ? Elle semble presque se ficher de ses sentiments.

Évidemment qu’elle ne veut pas laisser tomber leur amitié, mais elle ne veut pas non plus faire comme si c’était le Noah qu’elle a toujours connu. Charlie ne veut pas oublier celui à qui elle s’est attachée, elle ne veut pas faire partie de cette masse qui accepte tout ce qu’on leur donne. “Si tu continues comme ça, tu n’auras que des relations superficielles, si ce n’est pas déjà le cas.” Car elle se permet de donner des conseils maintenant, elle qui est incapable de nouer des liens durables avec les autres.

Quelle hypocrite.