Des secondes qui s'écoulent. Une. Deux. Trois. Quatre. Elle ne remonte pas, Lucrecia, les laisse filer comme si elles n'étaient rien -et c'est précisément ce quelles sont ces secondes : rien. Cinq. Six. Sept. Elle ne bouge pas, les yeux clos assise en tailleur au fond de la piscine. Ignore les perturbations de la surface pour se concentrer sur l'eau tout autour. Huit. Se laisser imprégner doucement. Neuf. Ne faire plus qu'un avec l'élément. Dix. Avoir alors l'impression de respirer. Onze. Le réflexe de respirer -l'étouffer.

Douze.
Finalement remonter.

Une grimace qui déforme à peine ses traits en passant du silence absolu au bruit de la surface. Une grimace qui s'efface bien vite pour laisser étirer à ses lippes cette esquisse fière qu'elle ne cesse jamais d'arborer. Car Lucrecia est confiante, toujours et ce peu importe ce que pourraient bien dire tous ces autres qui ne valent rien. Des gens comme des secondes sur lesquelles elle marche sans considération ou presque. Récupère sa serviette au bord du bassin pour l'enrouler autour de ses épaules, en saisir un pan pour essorer un peu ses cheveux et puis finalement lever les yeux. Observer le monde et les bruits désagréables qui l'inondent. Elle hausse les sourcils face aux œillades-commères présentes pour la voir chuter, leur adresse un regard en biais empli de dédain avant de simplement s'en aller.

Dans les vestiaires elle s'habille, impeccable toujours Lucrecia. Organisée, rapide et efficace. Le sourire amusé, le regard ambition. Récupère sa couronne ((invisible)) pour la replacer droite à la place qui lui revient de droit : sur le sommet de sa tête, avant de simplement s'en aller.

































Cette imbécile va payer.
On ne s'en prend pas ni à elle, ni à la famille.

Jamais.

arrogante • méprisante • caractérielle • ambitieuse • jalouse • rancunière • loyale • possessive • déterminée • fière • confiante • orgueilleuse • tenace • protectrice • perfectionniste • bon public • rusée • compétitrice • hypocrite • manipulatrice • exigeante • suffisante • charmante • ordonnée • protectrice • rusée • injuste • charismatique • courageuse • destructrice • excessive.

— Lucrecia est née en plein centre de Barcelone, en pleine heure de pointe dans la voiture de son père bloquée par les bouchons tandis qu'ils se rendaient à l'hôpital; elle est la cadette d'un frère de trois ans son aîné. Sa famille vit confortablement grâce aux revenus de sa mère, cadre dans une grande boîte d'informatique et de son père comptable expert comptable.

— L'enfance est donc confortable, sans crainte de manque matériel ni d'éducation. Les enfants ont droit au meilleur et grandissent avec l'idée qu'ils doivent être parfaits. Des enfants importants, des enfants silencieux. S'ils ne manquent de rien en apparence, une fois passé les deux premières années, les parents finissent par replonger petit à petit dans leurs travails respectifs au point presque d'en oublier qu'ils ont une famille à la maison.

— C'est en quête d'attention que les deux commencent alors à s'agiter, faire des bêtises. Lucrecia, en mimétisme de son frère, exige plus de choses et fait de plus en plus de caprices. Le lien qui les uni tout les deux se fait plus fort que jamais, ils deviennent inséparables mais se sentent plus seuls au monde que jamais. Sans leur parents les couleurs sont bien fades après tout. C'est vrai quoi, à qui montrer comme ils sont parfaits partout ailleurs s'ils ne sont pas là ?

— Elle a quatre ans lorsque son frère la pousse dans les escaliers après une grosse dispute, ses parents absents, c'est leur nourrice qui l'emmène à l'hôpital et s'occupe d'elle tout du long. Elle s'en sortira avec une légère commotion cérébrale qui mettra un moment à guérir.

— Ses parents finissent par constater la "mauvaise influence" qu'a leur fils sur Lucrecia, et l'envoient en pension aussitôt. Voyant là une chance de peut-être se rattraper, ils se rapprochent donc d'elle comme ils peuvent mais font l'erreur, en voulant se racheter, de céder à beaucoup de ses caprices. Lucrecia devient de plus en plus avide d'attention et de reconnaissance tandis qu'elle continue de grandir, et la pression inconsciente des attentes de ses parents sur elle la ronge inlassablement depuis toutes ces années.

— L'année d'après sa mère est mutée à Londres et monte en grade pour devenir directrice adjointe de la succursale de sa boîte d'informatique. Toute la famille suit, sauf son frère qu'ils laissent au pensionnat afin de "ne pas le perturber d'avantage". Si la barrière de la langue n'est pas un problème pour Lucrecia qui apprend l'anglais depuis qu'elle est en âge de parler, l'intégration sociale n'est pas aussi rapide et plus le temps passe, plus son frère lui manque. Après avoir longuement insisté, ses parents décident de faire revenir leur fils à la fin de son année scolaire. Si à la maison l'ambiance se fait plus chaotique, Lucrecia, avec l'aide de son frère, parvient finalement à s'intégrer dans sa nouvelle école. Elle n'a pas vraiment d'amis mais au moins elle n'est plus seule maintenant qu'il est là, et tout le monde semble l'adorer.

— Et puis, petit à petit, une fois les repères plus ou moins trouvés, tout doucement redevenu comme avant. Les parents absents, au travail, les enfants seuls et abandonnés. L'ambiance cependant est beaucoup plus électrique, car les enfants ont grandis et les caprices ne sont plus tolérables. Ils ont une image à respecter, un travail, une réputation. C'est une opportunité à ne pas rater, pourtant c'est étrange comme les sourires manquent, comme tout le monde gronde tout le temps peu importe où Lucrecia se trouve. Même elle s'en retrouve affectée, depuis qu'elle a trouvé ces 50 pence par terre en allant à l'école. C'est comme si tout était plus confus, moins palpable, plus stressant. Tout est soudain bien plus étouffant. Les attentes, les crises, les hurlements, tout. Partout.

— Elle est envoyée brutalement sur Sajna à ses six ans, après que des agents du gouvernement soient venus la récupérer. Ses parents n'ont pas hésité une seconde à la renier -toujours sous l'effet du pouvoir de confusion et de leur haine exacerbée des Somnusiens, commune à tous mais le choc le plus grand aura sans doute été le rejet pur et simple de son frère qui vit là une occasion de s'accaparer de nouveau toute l'attention de leur parents. Elle les déteste tous parce qu'ils lui ont tout volé.

— Alors, une fois arrivée sur l'île, elle décide de ne pas se faire avoir une nouvelle fois. Prend de force encore ce qui lui est dû, l'attention, les bonnes notes, la belle image. Use et abuse de son pouvoir pour faire céder les méprisants, les remettre à leur place et les laisser à ses pieds. Que ceux qui l'aiment la suive et que les autres crèvent, c'est tout.

— Elle fait partit des populaires qui ont aidé Arsene à se hisser au sommet, parce qu'égoïstement, le savoir au-dessus d'elle la rassure même si ça la frustre tout autant. Néanmoins, elle a décidé de le suivre depuis que ses mots ont trouvé écho en elle. Ils semblent avoir les mêmes idéaux après tout.