La soirée du début de l'été ayant été un fiasco, tu en avais organisé une autre un peu plus privative (toujours avec Icare) afin de profiter des vacances scolaires. Bien évidemment, même si les sms d'invitation avaient été envoyé qu'à une partie de l'école, beaucoup avaient pour habitude de ramener leurs potes pour profiter. Alors vous étiez plusieurs dizaines à vous déhancher dans un coin des dortoirs, empêchant surement de dormir la partie des élèves n'ayant soit pas été invité où n'ayant pas envie de vous rejoindre par dignité.

Ce soir là tu t'étais juré de ne pas abuser de l'alcool, de ne pas embrasser Skye pour ne pas te brouiller ni avec elle ni avec Scarlet. De ne pas faire de commentaires désobligeants visant à descendre injustement le chef du conseil des élèves, de ne pas râler sur la musique choisie.
Un peu éméché tu te poses dans un coin avec ton verre - te surprenant à mater le déhanché des garçons plutôt que celui des filles présentes. Tu grognes pour toi même Arsene, depuis quand t'es devenu une petite fiotte comme tu t'amuses à les appeler ?

Sorti de tes tortures internes, tu lèves le regard vers la voix qui t'a interpellé. Arques un sourcil à la mention d'amusement, tu parais ouvertement désabusé.

— « M'amuser ? Hm. Est-ce que tout le monde me regarde ? Non. Est-ce qu'on a versé du sang et des larmes ? Non. Tout le monde s'amuse et moi je m'emmerde. »

Tu lèves ton verre pour trinquer dans le vide à cette réalité.

— « Je dirais à -1. Je suis encore debout et j'ai les idées claires. Et mes idées sont chiantes. »

Tu le pointes du doigt.

— « Et toi le poète tu t'éclates ? J'espère que t'as pas recommencé avec tes conneries de piqure. »

Si seulement il avait raison ! Bien sûr que non ça ne dépend pas que de toi... enfin si, peut-être. Il suffit que tu plies les autres à ta volonté pour qu'ils te divertissent de leur admiration contemplative ou de leur amour éclaté. Même ça pour ce soir tu t'en es lassé. Ils sont tous hypocrites à souhait, et quand ils ne sont pas consentants à t'aimer ils deviennent hostiles. Tu te racles la gorge pour témoigner de ton agacement sur la question.

— « C'est gentil Poesy mais je crois que pour le bien de tous tu devrais garder tes vérités générales pour toi même. »

T'es un peu amer et tu tournes la tête en soupirant, avant de reporter une mine intéressé vers lui. Tu fronces les sourcils à son regard un peu plus ferme et hausses les épaules.

— « Comme tu veux, c'est ton problème de toute façon. »

Tu ne peux pas t'empêcher d'être curieux, alors tu frisonnes quand il rapproche son souffle de ton oreille, murmure une proposition osée à laquelle tu fais semblant d''être offusqué.

— « Je regrette jamais rien. C'est quoi la merde que t'essaie me refiler ? »

Ça se voit sur ton visage, aux traits qui se détendent et à la lueur de tes yeux intéressés. Tu veux savoir, et tu te fais tellement chier que t'es à deux doigts de craquer.

— « Depuis quand tu deales ? J'espère que pour moi c'est gratuit. »

Tu te gausses d'un rire sardonique, ayant décidé d'ignorer la langue étrange qu'il a articulé juste avant. C'est vrai que tu regrettes rien. Mais t'aimes surtout te moquer et mentir, tu étires un sourire forcé. Cette langue étrange tu la connais, parce qu'après tout les profs t'aiment aussi pour tes bonnes notes, autant que pour ton attitude exemplaire.

— « Parler français ne te rend pas plus sexy même si je dois reconnaitre que t'as une belle gueule. »

Hausses encore une fois les épaules, prouves derechef que t'en as rien à foutre de l'avis des gens - encore moins quand ils chouinent ou se vexent. Même tes amis galèrent à te faire cracher des regrets. Ta compassion s'est dissoute dans l'océan acide de ton sadisme. Tu plisses les yeux et arques un rictus narquois.

— « Ah ouai ? »

Tu te rapproches de lui. Réponds à ce que tu ne sais pas interpréter, peut-être et surement à tort comme du flirt. Il fait sombre, la musique est forte. Tu en profites et réponds, la voix fauve.

— « Qu'est-ce que tu entends à mon sujet ? »

On en est à ce stade, qu'on parle de toi ça te fait presque bander.
Tu baisses les yeux sur la pilule qu'il sort de sa poche et restes de marbre. Tu échanges quelques regards avec lui avant de vouloir la prendre dans tes doigts.
Sa paume s'échappe. Sors ta langue qu'il dit - et intrigué par cette demande trop tendancieuse tu roucoules et le corps entier suave frissonne d'une excitation malsaine.

— « Ok. »

Tu sors ta langue, l'agites sous son nez pour le provoquer.

Pendant un instant tu te sens en empathie avec Gauthier et ça te donne une sensation bizarre. Toi ? Ressentir quelque chose de positif à l'égard de quelqu'un ? Tu acquiesces sobrement, peut-être que Gauthier prendra ça comme du désintérêt de ta part mais pas du tout. Tu sais mieux que personne ce que c'est que de souffrir d'être aimé pour autre chose que pour soi-même. Surement ta seule faiblesse, ton seul complexe - tellement enfouis et intériorisé qu'il t'est impossible de le verbaliser. Ainsi, tu ne réponds pas.

Tu te galvanises d'une inspiration suave quand il te demande si ça te plait. Evidemment ! Quelle question. Tu glousses et murmures à son oreille.

— « J'ai pas besoin de tourner rond, il suffit que je claque des doigts pour que tout le monde me mange dans la main. »

Un avertissement dissimulé et léger - qu'il sache ce qu'il l'attend s'il fait monter la sauce et se défile. Tu es joueur mais surtout gagnant.
Le doigt de Gauthier s'engouffre entre tes lèvres et tu frémis d'un appétit brutal - t'as les tripes en feu et le poitrail presque à nu se renfle d'une inspiration lente et puissante. Tu récupères la pastille avec ta langue, passant subtilement entre ses deux doigts sans le lâcher du regard.

— « Doucement Poesy, tout le monde sait ici que je préfère être sucé. »

Tu le sens monter ? Tu grognes silencieux et baisses les yeux vers ton bassin. T'aime pas du tout l'effet qu'il te fait mais t'es incapable d'en prendre réellement conscience parce que t'es soumis à l'effet que cette merde te fait présentement.
Hmmm... w e l p.

— « Ouai je crois. C'est de la bombe ton truc. »

Grand sourire. C'est comme si tout les soucis s'étaient noyés, et seule ta tête reste à la surface dans cette mer de merde ; tu ne vois que le ciel couvert d'aurores boréales.
Ton doigt vient se poser sur son torse, et serpente lancinant sur le tissu moite du à la transpiration. Tu descends et t'arrêtes au plis plus épais de son pantalon, éloignes finalement ta main baladeuse pour le faire douter - sourire béat et idées bêtes.

— « Et toi je vois que t'avale direct. »

Tu lèves le menton, impérieux et viens effleurer de ton pouce sa lèvre inférieure. L'enfonces lentement pour venir racler son palais de ton ongle.

— « Tu te sens monter ? »

Lui renvoies sa propre question, te gaussant du fait qu'il ne peut pas y répondre actuellement.

Si tu commences un jeu Arsene c'est bien pour le gagner - Gauthier pouvait bien en être le meneur s'il voulait (tu ne le laisserais pas faire) c'est toi qui atteindra le premier la ligne d'arrivée. Sa salive sur ton pouce tu viens l'essuyer et tracer une ligne humide partant de son menton, descendant à sa pomme d'Adam, tu t'arrêtes à la naissance de son buste. Ris de bon coeur, machiavélique mais surtout trop à l'aise. Tu débordes d'un bonheur factice qui capture tes lèvres de sourires ensoleillés.
Il est triste que tu abuses de ton pouvoir Arsene car ton charisme naturel suffit à certains pour t'admirer de loin, t'aimer jusqu'à demain.

Son souffle contre ton oreille, ça a éveillé chez toi des envies que tu n'es pas certain de vouloir assumer jusqu'au bout, et encore moins en public.
Mais la drogue du plaisir l'accentue et modèle un courage impudique qui te fait te rapprocher un peu plus de lui, au rythme de la musique. Vos torses respectifs s'épousent et tu ricanes bêtement - certain d'avoir pris une certaine avance dans le match. Un point partout, en vrai.

— « A quoi je joue ? A ton jeu. Tu l'amorces et je suis. »

Tu articules lentement, jouant et appuyant sur les différentes syllabes.

— « Ou s'il n'y en a aucun alors peut-être que je voulais simplement aider mon pote à bien avaler sa pilule. »

Les lumières, les chansons, le parfum des chairs et les corps en fusion... ça te monte à la tête Arsene et du corps de la vipère tu te déformes pour te draper de la fourrure du lion.
Passes une main dans tes cheveux et le bouscules pour traverser la pièce, sortir dans le couloir. Tu te retournes et dans l'encadrement de la porte ton regard provoque encore, défies de te suivre alors que tu disparais - lèves la main pour saluer ceux qui t'interpellent. Sourire et les phéromones se déchainent plus qu'au naturel, tu repousses une nana qui s'accroche à toi, prends le chemin des douches des garçons.

Une fois à l'intérieur, tu étires un rictus énigmatique et dédaigneux.

— « La minette suit son maitre la queue entre les jambes. »

Une façon de te remercier, hein ? Tu glousses, les yeux vérolés de malice et d'arrogance. Disparaitre tu ne sais pas aussi bien le faire que de t'imposer à tous. Tu laisses des traces sur les murs, des indices comme le petit Poucet - sauf que toi tu n'as pas peur des ogres. Tu les dévorerais avant qu'ils ne te touchent.
Tu plaques ton dos contre le mur carrelé, décèles l'intensité qui luit dans le fond de ses yeux quand Gauthier pénètre les douches, s'avance comme un prince face à son Roi. Les douches s'allument et tu es trop high pour réellement sursauter. Tu contemples les jets d'eau, illuminé par le clignotement du néon vert de la sortie de secours.

— « Gau' pourquoi tu m'as suivi ? Tu t'imaginerais pas des choses par hasard ? »

Souffles qui s'entremêlent et la tension s'installe davantage. Tu perds le contrôle lentement alors tu t'y accroches maladivement. Etires un sourire denté quand il répond à ta provocation et tu chopes son menton entre deux doigts pour lui soutirer une grimace disgracieuse.

— « Tu pues la femelle en chaleur. »

Tu profites de ta prise pour le tirer un peu plus vers toi et morde sa lèvre charnue. Sans l'embrasser tu cherches à capter son regard et libères tes phéromones. Tu cherches à ce que ça soit lui qui fasse le premier pas, car si c'est lui ça te laisse une excuse pour le repousser, pour ne pas assumer ((encore une fois)).
C'est fatiguant de se cacher, excitant aussi en partie. Ton coeur pense à Scarlet mais ton corps hurle de désir pour lui et seulement lui. En cet instant tu te sens libre, elle t'a rendu libre.

— « T'attends quoi, putain ? T'en crève d'envie. »

Et toi tu crèves, en vie.

L'eau parvient à tes pieds, trempe tes chaussures mais t'es trop perché, trop heureux pour t'en soucier. Tu vois Gauthier dans une multitude de couleurs, que celles qui te font du bien et qui te ramènent à des réminiscences oubliées. Tu te laves de ses je sais,tu te fous de ses je te l'avais dis. T'es à deux doigts d'atteindre la félicité, à des pas d'être en vie. Il ne manque que ses lèvres gonflées sur les tiennes, sa main dans ton pantalon, sa langue sur ta peau.
Il prend l'avantage et tu fonds, glisses sur le mur carrelé dans un rire saccadé et nerveux.
Lui rappelles quand même cette vérité, il a oublié qui tu es :

— « Je ne me demande jamais. Tu peux toujours courir Poésy. Tu peux toujours exiger que je céderai pas à ton petit manège. »

Ce n'est pas d'être faible que d'être celui qui demande mais tu n'es pas réputé pour avoir du recul ou de la sagesse. Tu es con Arsene, con à l'égo mal placé.
Tu n'es brillant que pour trouver les failles et tu finis toujours par t'y engouffrer.

— « Mais soit, je prends. »

Première défaite de la soirée, noyée par les spasmes de ton corps qui s'embrase quand ta bouche vient capturer la sienne. C'est différent des autres c'est une conquête qui n'a pas la même saveur. La satisfaction est atténuée par le prisme de la pilule qui instrumentales tes attentes. Tu tiens Gauthier par le col de son haut, le tissu bien serré entre tes deux poings.

Tu inverses les rôles, batifoles dans les flaques et le retournes pour l'acculer contre le mur. Cognes sans force sa tête contre le carrelage et glisses une main dans ses cheveux. Tu te nourris de son odeur, de son parfum fragmenté par les effluves d'alcool et de transpiration parfumée.

— « Gau'... »

Souffle effréné, tu niches ta tête dans son cou.

— « Putain je débloque. J'ai pas les idées claires, c'est ta merde qui me fait faire des conneries c'est sûr. »