Une heure plus tard, vous avez remis ça dans ta piaule. Vous êtes littéralement insatiables. Maintenant que t'y repenses, t'avais tout le loisir de toucher au piercing qui te faisait tant envie. Les mains derrière la tête, l'air calme et à moitié deshabillé quand pourtant t'as (encore) tes fringues sur toi, tu te laisses envelopper d'un cocon de chiling avec lui. Il t'aborde , comme toujours, avec des questions sur toi. Peut-être que la culpabilité de ne pas savoir t'ouvrir dans une relation ne te permet pas de profiter au maximum de l'échange. En revanche, tu sais remettre le couvert plusieurs fois.
Sourire narquois, à sa question sur la nourriture, ton ventre réclame pitance. Mais la douceur du moment t'oblige à rester, parce que... C'pas ton genre. De parler sur un lit avec une autre personne, pour te confier. En vérité, t'as horreur de te mettre à nu comme ça. Tu le fais parce que... tu veux pas le froisser.
Non. C'est pas ça du tout. Tu veux pas arrêter, simplement. Et l'intérêt qu'il nourrit à ton égard te gonfle l'égo. Forcément. Evan n'est pas une groupie. T'as trop aimé sa manière de t'approcher. Tu aimes sa franchise ; tu aimes qu'il fonce vers toi. Ca te dérange pas de prendre le taureau par les cornes. ... mais lui non plus, apparement.
Après un soupir, tu leves les yeux sur le plafond et tu réponds à sa prochaine question.
- Pourquoi tu veux savoir ce que je fais quand je suis triste, t'es con ou quoi ? ... Ou t'es romantique, je sais pas. Tu te passes une main sur le visage, embarrassé. Ta senestre stagne un long moment sur ta bouche. - Je joue. Je m'enferme dans la salle de club et je joue tout mon soûl. Ca m'est déjà arrivé d'outrepasser le couvre-feu pour jouer toute la nuit. " En mode sourdine, évidemment." .. Ou je vais chercher la merde dans les bars, je sais pas. "
Evan va te juger, c'est certain. T'es vraiment pas un parangon de vertu. T'es tout le contraire Matt. Mais tu vas jusqu'au bout.- Et pour les bonbons, ca te fout des carries ces conneries. puis ca te colle aux dents.. et. Je sais pas, je suis pas féru de sucres.
Tu finis par te positionner sur le côté, face à lui. Nonchalant, un brin supérieur dans ta façon de te tenir. Mais surtout, tu lui fais grâce d'un magnifique sourire coquin.
- Si je te dis mon secret au sujet de la cicatrice... j'ai quoi en échange ?
Insatiables, oui. Alors il l’observe, sans gêne. C’est ainsi qu’il se sent avec lui, depuis le début. Lors de leur première fois. Puis la deuxième, et encore la troisième. La chronologie ne suit plus, le temps défaille. Entreprenant. Captivé. Insatiable.
Installé sur le flanc, une main glissée sous le t-shirt noir pour effleurer sa peau, Evan fixe cet homme torturé. Il n’est pas dupe ; il sait ce qu’il voit au fond des pupilles, derrière un regard qui s’efface et se détourne. Traumatisme. Souffrances passées. Pourtant, pour une raison qu’il ne s’explique pas, Matthew est encore là. T’as pas encore pris la fuite.
Mais qu’est-ce qu’il ferait, si Evan commençait à se confier ? Si au lieu de parler plats préférés, il lui parlait de ses terreurs nocturnes ? De ce pouvoir qu’il ne contrôle pas ? De ces passages à vide, ceux qui se coupent de sa mémoire sans qu’il ne sache pourquoi ? S’il savait qu’il avait frappé Lucrecia, l’une de ses amies les plus proches, et qu’il ne s’en souvient même pas ?
Yeux voilés qui se ressaisissent. Distraction.
C’est comme ça qu’il est, Evan. Son esprit divague à cent à l’heure. Pourtant ici, avec toi, c’est juste dingue. Il arrive à penser. Il arrive à se concentrer. C’est quoi, le bail ? Y a quoi, dans l’air qui circule entre vous ?
Il ne peut pas s’empêcher de rire, à l’idée d’être perçu comme romantique. Ou peut-être l’est-il, finalement ? C’est l’inconnu, il sait pas, il sait plus. Mais il te voit, Matthew, assis sur ce tabouret, gratte entre les bras. Il t’entend fredonner et murmurer, au beau milieu de la nuit, pour faire passer ta mélancolie. Ou bien dans un bar, comme l’autre soir. Tu y cherches la merde ? Il serait curieux de le voir. Et c’est ça qui le perturbe. Quand il te voit, il veut tout savoir. Mais te juger ? Jamais.
- Qu'est-ce qui peut te rendre triste ? demande-t-il, sincère. Il veut savoir. Il crève de savoir. Et c’est quoi « chercher la merde » ?
Est-ce que t’es comme lui ? Pire que lui ? Est-ce que c’est important ?
Son rire passe encore la barrière de ses lèvres. Décidément, personne n’accepte son addiction au sucre. Tant pis, il s’en fout. Il le regarde s’installer, à présent face à face. Ses yeux clairs se plantent dans les marines du chanteur. Et ce sourire, qu’il pourrait dévorer sans pudeur.
- Tu veux quoi ? Sa main ressort de son t-shirt, déjà en manque de chaleur. Alors il vient attraper sa mâchoire entre ses doigts, caresse de son pouce ladite cicatrice. Vile tentatrice. Je peux te proposer : une question, une réponse. N’importe laquelle.
Il s’approche, son souffle s’échouant sur ses lèvres. Trop proche. Pas assez.
Lorsque ses doigts touchent ta cicatrice, tu frémis intérieurement. Comment dire que tu n'aimes pas la sensation suscitée lors de la friction entre la pulpe de son doigt et la cicatrice en elle-même. Mais... l'obsession qu'il a et la douceur avec laquelle il l'aborde te grisent à un point que tu n'imaginais pas possible jusque là. Jamais personne ne s'est autant excité sur ta cicatrice. Peut-être qu'il a une passion pour ça. Mais ca t'excite aussi.
Pensif, tes iris sombres s'aventurent sur l'ensemble du visage qu'il te présente. Ses yeux clairs, cette teinte turquoise, la paupière frangée de cils fournis et clairs. Ouais, t'en reviens pas, qu'il ait de si beaux yeux. Jusque là, ca ne t'avait pas marqué mais ce soir très exactement tu aimais te perdre dans cet océan de pureté. Et instinctivement, sans que cette fois-ci tu le contrôles, ta main se lève pour écarter une mèche blanche devant ses yeux si... hypnotisants.
Au moment où il mime le mot "payer le secret" dont tu n'écoutes le fondement que d'une oreille distraite, tu te plais à contempler la forme de ses lèvres. si t'en es là à te pâmer devant sa gueule, c'est qu'il y a un problème.
Tu reviens à toi, tu perces volontairement la bulle dans laquelle tu t'es fourré et tu reviens sur terre. Tu ressasses la portée de ses propos pour en saisir toute la subtilité et tu réponds enfin, en soupirant brièvement :
- Tu déconnes, je n'ai pas besoin de payer pour t'avoir à genoux et te voir me sucer.
Tes doigts frottent l'arête de ton nez et tes lèvres. Puis tu relaisses tomber le dos de ta main sur le matelas.
- Dis-moi quelque chose sur toi. .. Je te connais pas. Tu sais la zone qui le fait vibrer dans son antre, mais tu ne sais même pas son nom ou ce qu'il fait de ses études.
Par la même occasion, tu fais une queue de poisson à ses questions précédentes; Pas que tu sois mystérieux matt, mais presque. Ce qui te rend triste ne le regarde pas pour le moment. Tu aimerais surtout remettre à égalité ce que vous savez l'un de l'autre.
Le souffle lent, qui s’alourdit à mesure de se faire observer. Scruter. Deviner. Tu vois quoi, quand tu le regardes ?
Un sentiment de sécurité, quelque chose d’inexplicable qui se répand dans l’air. Il n’avait jamais vécu ça, pas qu’il se souvienne, et certainement pas avec des amants. Ce moment de complicité sur l’oreiller, yeux dans les yeux ; sincérité. Evan la sent, une boule de chaleur formée au niveau de sa gorge. Il l’entend. Elle veut dire quoi ? Est-ce que c’est cette angoisse, celle qu’il refuse d’admettre même à voix basse ? Ou est-ce que c’est autre chose ? Et autre chose, c’est quoi ?
On s’en fout. Vraiment ?
Ces yeux sombres qui tombent sur ses lèvres ; ça étire son sourire d’autant plus loin. Il veut continuer de jouer, il veut tester. Avant qu’il ne réponde, il se complait à tromper les battements de son cœur. Plus il est proche de sa peau, plus son souffle s’échoue contre elle, et plus il bat vite. Alors il se recule doucement, yeux collés aux siens, car il aime se découvrir. C’est amusant, la chimie du corps. La magie du cœur. L’alchimie.
Un rire, pour cette réponse si honnête. Et il n’a pas tort, dans la salle de musique, Evan n’a pas eu besoin de secret pour le sucer. Il n’a eu besoin de rien d’autre que son regard, son aura. Le défi au fond de ses yeux et le sourire ourlé à ses lèvres. Et c’était si bon. S’il le lui demandait, certainement qu’il recommencerait.
Mais ce que lui demande le chanteur, pour l’heure, c’est bien autre chose. Du concret, du personnel. Il aime le savoir si intéressé, et en même temps, son pouls fait une embardée. Pourquoi ? Parce que généralement, c’est lui l’effronté. C’est lui qui veut tout savoir, tout demander. Un sourire léger, qui flotte sur ses lèvres. Il remue, puis s’accoude sur le matelas, la joue posée contre la paume de sa main.
La réflexion n’est pas longue avant l’apparition de son sourire en coin. Puis il le perd, aussi vite qu’il est apparu. Car là, il ne joue plus.
- Je m’appelle Evan Anderson, je possède la binationalité suédo-américaine. J’ai 21 ans, 22 à la fin de l’année, et je suis à l’université en cursus de médecine.
Trop simple.
- Je suis perchiste, je pratique depuis une dizaine d’années. L’an dernier, je me suis classé vice-champion national de ma catégorie.
Trop facile.
- Je suis bordélique. Je crois que j’ai déjà perdu au moins une fois chacune de mes affaires. Vraiment. Parfois, j’écris même sur des post-it le dernier emplacement connu de mon portefeuille.
C’est déjà mieux. Il inspire, lève les yeux vers le plafond pour réfléchir. Ou peut-être pour s’échapper de son emprise. Allez. Dis-le. Quelque chose, n’importe quoi. Du vrai.
- Je suis phobokinésiste et… je suis terrifié par mon pouvoir. Un profond soupir, comme pour prendre en considération l’ampleur de ce qu’il vient de dire. Puis un rire, peut-être pour se fuir. Il baisse brièvement les yeux, inquiet de croiser les siens. C’est bête, hein ? Oublie.
Comme lui essaie, chaque jour, de faire abstraction. En vain. Il rit de lui-même, secoue doucement la tête. Qui a peur de soi-même ? C’est idiot. Personne. Par instinct, sa main libre s’enfouit dans ses cheveux blancs et tire sur les racines. Inspire, expire. Il a osé, mais il est pas sûr que ça fasse du bien. Son regard, pourtant si franc, peine à rester plus de quelques secondes accroché au sien. Il a besoin de temps.
- Ça te va ? Tu as l’impression de me connaître ? demande-t-il doucement. A ton tour.
Les pensées rôdent, s'effilochent au cours d'un temps ralenti par le plaisir procurée de leurs échanges. Sourire carnassier quand cette petite tête blanche s'accoude à même le lit pour remplir son rôle d'interlocuteur poli et honnête. Toi-même, tu saurais pas dire s'il est tout le temps franc, ou tout à fait franc, la nuance étant vicieuse...
Tu aimes le spectre d'un sang étranger qui coule dans les veines de cet homme, tu aimes l'âge ainsi que le cursus choisi en dépit de ta nonchalance insolente pour le corps médical et autres métiers du genre. Peut-être que ce qui te surprend, c'est que tu ne parviens pas à l'imaginer sérieux.
Lui.
Il renchérit par une passion sportive de haute volée, aux égards d'oiseau avide de liberté et à l'arrogance suprême d'homme égaré. Et en plus il se classe vice-champion dans l'impertinence et la réussite.
Tu bandes.
Il se glisse lentement vers les abysses de ses traits et tu l'écoutes attentivement, pris d'un curieux vertige pour sa faculté. alors, c'était ça. ... quand il te disait ne penser à rien quand tu étais là.
Terrifié par un pouvoir, hein ? Parce que tu crois Evan que tu es le seul à l'être? S'il savait... tes doigts glissent jusqu'à la machoîre d'Evan, tu l'enceins avec fermeté, exempt de force ou de violence. puis d'un mouvement indolent, presque lent et chiant, tu te rapproches de lui et colles tes lèvres aux siennes. Ton regard se plante dans le sien ; tes paupières ne se ferment pas, en dépit du baiser (possessif) que tu lui soumets. Puis tu relâches, humides filets qui se détend entre vous.
- A qui crois-tu parler, Evan ? ... je n'oublie pas ce passe-droit que tu m'offres. ... j'ai l'impression de juste flirter avec qui-tu-es.
Puis le baiser est réitéré, mais différent : ta langue s'invite dans sa chaude cavite buccale et s'enroule à la sienne avant que, cette fois-ci, tes yeux ne se ferment. territorial. ou intéressé. Tu l'embrasses jusqu'à vous faire perdre haleine. Jusqu'à se sentir une nouvelle fois à l'étroit en bas.
Est-ce qu'il te plait ?
- Je suis matthew donovan, raamda de mon deuxième prénom et je suis né en Louisiane. 21 ans, bassiste, guitariste et pianiste. Silence... - Et connard à mes heures perdues. Je supporte pas les idiots, les naïfs, les rêveurs, les menteurs et les populaires.
Tu t'immisces, que dis-tu, tu t'installes tout doucement dans l'esprit du bellâtre, tes lippes trainant éhonteusement vers le cou où les fragrances de citronnades te chatouillent le nez...
- Je peux faire éclater des coeurs en jouant de la basse, je peux mettre à genoux si je suis trop contrarié.
Mais t'as conscience aussi que tu dois jouer pour ça : rien est inné
... - Du reste... rien.
T'en as assez dit. Ton regard se montre fuyard, tu te laisses retomber à même le lit.
Les yeux vagues, à ressasser ses mots. À attendre, peut-être, qu’il réagisse. Mais comment ? S’il savait tout ce qu’il se passe dans son esprit. S’il savait la brume qui enveloppe ses pensées. Est-ce qu’il serait toujours aussi intéressé ? Ou est-ce qu’il se lasserait, déçu de ne pas retrouver sa passion solaire jusque dans les fibres de son être ?
Ça aussi, on s’en fout. Il s’en fout. Non ?
La douceur de ses doigts, presque douloureuse sur son visage. Il le regarde s’approcher, les yeux figés aux siens. Incompréhension, et pourtant, une certaine forme d’agitation. Puis Evan joue au jeu, ne lâche pas ses pupilles marine tandis que les doigts de sa main libre viennent serrer le drap du lit. C’est si bon, d’échanger ce baiser les yeux ouverts. À découvert. Tu fiches quoi, Matthew ? Pourquoi t’es encore là ?
Ses paroles soulèvent le rythme de son cœur. Où bien est-ce son ton ? La signification ? Ou encore ce baiser, bien plus torride, qui fait suite ? Leurs langues qui se cherchent, qui se trouvent, dans un ballet humide. La passion. Il veut pas rien dire, ce baiser. Il l’aspire, il lui parle, aussi vrai que son souffle lui échappe. Un peu trop fougueusement, ses doigts viennent plonger dans l’ébène. Il l’embrasse jusqu’à plus savoir qui il est.
Alors, à défaut, il se raccroche à lui. Ses doigts coulent dans sa nuque, retracent les veines. Il apprend son nom, son âge et ses origines. Ça lui plait. Il en veut plus, et Matthew le lui offre. Musicien, évidemment. Il parle d’instrument, et pas de son chant. Putain. Elle est si belle, ta voix, pourtant.
Evan sourit ; il avait deviné certains traits. Il avait deviné la fougue, le fait d’être entier. Ce gars-là, il n’aime pas les menteurs et il refuse de l’être envers lui-même. Alors un instant, il se demande s’il pourrait lui apprendre. Le guider, le comprendre.
Tend la nuque, juste un peu, pour lui laisser la place. Imperceptiblement, son corps se rapproche du sien. Il a chaud. Son menton se baisse, pour qu’il puisse capter l’odeur de sa peau. Ses phéromones, qui le saisissent à plein nez et frappent son corps de luxure. Ah ouais, encore ?
Puis une confidence. Un arrêt. Sa main libère sa nuque, puis il l’observe se reculer, tomber sur l’oreiller. Ça prend un temps. Pas très long, mais suffisamment pour le dévisager quelques secondes.
- Tu en as peur aussi.
Une affirmation, et non une question. Cet homme dont il commence à connaître les plus beaux recoins du corps, il a l’impression de le voir pour l’une des premières fois. Il a l’impression que son aura change, qu’elle se mire de couleurs plus subtiles. T’es encore plus beau.
Alors, inexplicablement, Evan sourit. Il sourit, car c’est ce qu’il sait faire de mieux dans la vie. Il sourit pour lui, tendrement, pour ces confidences, cette confiance. Elle signifie quoi ? Il sait pas, elle peut dire tout ce qu’il voudra.
Souplement, il se mouve et s’installe à califourchon sur ses cuisses. Pose ses mains à plat sur le torse large, les yeux clairs braqués à ce regard qui le fuit. Ne fuis pas. Regarde-moi.
- Tu peux aussi leur faire battre la chamade.
Tentative d’offrir à son pouvoir une perspective positive ? Ou bien simple vérité, du don inné qu’il possède sur lui ?
Il glisse une main jusqu’à son cou, ressent le pouls au travers de sa paume. Ils vont où, là ? Ca veut dire quoi, tout ça ? Ses yeux le scrutent, il essaie de voir à travers lui. Il essaie de capter, dans son esprit, les bribes d’une terreur passée. Mais il n’y a rien. Toujours rien. Un rire, incrédule. Soulagé.
- Tu me détraques, Donovan, souffle-t-il. J'y comprends rien.
Se penche en avant pour l’embrasser, mais au moment de s’abandonner, il se recule. Sourire au coin des lèvres, il se redresse, croise les bras sur son torse.
- Il me semble que tu m’avais promis. Pour ta cicatrice. Raconte-moi.
D’un léger coup de bassin, taquin, il joue avec le feu.
Un instant, tu laisses le vide prendre possession de ton esprit. Froid. Et ténébreux.
Puis le chant des émotions qui fluctuent. Versatiles. volatiles. Tes yeux grimpent le long du mur, dans un ennui certain. Ta main aussi, suit le chemin, et se repose contre le platre.
- Je n'ai pas peur. ...
T'as appris à contrôler ce don (ou presque) pour empêcher justement de tuer quiconque sous l'impulsion. Et une chance que tu dûsses te parer de ton arme qu'est ta basse pour ne pas jouir d'une trop forte ... spontanéite.
- Mais j'en connais d'autres qui ont peur.
Effrayé.e par la part incontrôlable de leur pouvoir. T'as toujours eu ce sang-froid en dépit de ton caractère chaud, à maîtriser ce qui te contrariait. A croire que c'est ta réelle force. avec ta voix.
Les propos qu'il te sort t'extirpent du fil de tes pensées. Surprenants et... - Tu peux aussi leur faire battre la chamade. tes orbes orageuses se plantent lentement jusqu'à lui. T'es sérieux. Pendant un moment, t'aimerais croire qu'il s'agit d'un message subliminal. Malgré ton statut et ta confiance en toi, tu chasses l'idée. ou alors... tu lui fais battre le coeur de sa queue, ouais. ça doit être ça.
- Ah ah. Tu coupes la connexion visuelle. Simple rire de doux sarcasme. Ca sonnerait presque comme une menace. Mais tu sens la chaleur de son epiderme recouvrir celui de ton cou. Insidieux. Puis tu tournes vivement la tête pour le fixer. Il fout quoi ? Pourquoi il garde ses doigts contre ton cou, où est le bail ? ... car il s'accélère bêtement
... et tu fais le sourd à ce qu'il te dit, mais le coeur n'est pas aveugle. Tu amorces à peine le mouvement de l'épaule pour te retourner qu'il vient t'embrasser, mais il s'arrête au moment fatidique. Pourquoi tu le regardes les yeux écarquillés, le coeur battant. Lâche l'affaire tout de suite, tu veux pas de ça. ....... Et enfin, de quoi te tirer d'affaire, cette cicatrice et son obsession pour elle. Il est cruel.
Mais tu souffles intérieurement, si bien que tes épaules s'affaissent et s'enfoncent dans le tissu du matelas.
- Oui. Il t'arrache ce grognement au coup de rein coquin, et systématiquement, t'as envie. Mais c'est autre chose qui court. L'adrénaline ? Autre chose, juste.
- .....
Reflechis Matt, réflechis vite. Parce que tu l'aimes bien.
- Un ours m'a fait ça. Tu te fous de sa gueule ; ça te détend.
Il sent l’ambiance qui change de ton, comme teintée d’une note un peu plus sombre. Le regard mortellement sérieux du chanteur, suivi d’un rire presque désabusé qui le pousse à croire qu’il n’a pas compris l’allusion. Qu’il ne veut pas comprendre.
Le cœur qui bat, mais pourquoi ? Fais un effort, Matthew. Ne te méprends pas.
Evan continue sur sa lancée, tente de lire les peurs de son esprit. Ça changerait rien, s’il y arrivait. Ça le rendrait pas moins intéressé. Pour autant, il n’y parvient pas. Vide intersidéral pour une paix éphémère entre son crâne.
Se penche pour l’embrasser, soulagé, mais les mouvements du brun ne trompent pas. Du coin de l’œil, il devine qu’il est mal à l’aise ; remarque son geste, comme s’il voulait s’échapper. Sous ses doigts, le pouls s’accélère et il ne le comprend pas ; incapable de lire les pensées. Le jeu va trop loin, peut-être trop vite. Il se recule, capte son regard agrandi. Un sourire. Changement de sujet.
Putain. Il veut pas te faire fuir.
Coup de bassin, dans une tentative de revenir à ce que leurs corps connaissent. De le rassurer, peut-être. Ou se rassurer lui-même ? L’indifférence, l’ennui, ça l’effraie. Pas chez les autres, juste avec lui. En avoir conscience, c’est encore pire. Déglutit, lentement, mais toujours il sourit. Toujours les yeux qui brillent. Et en entendant l’envie au fond de sa voix, le cœur d’Evan se débride. La pression s’échappe, il respire. Un silence. Puis il rit.
- Un ours ? Vraiment ?
Il plisse les yeux, presque certain du mensonge. Un ours aurait fait bien pire. Tend la main et, du bout de l’index, pousse sur son front avec malice.
- Tu te fiches de moi, c’est inadmissible, glisse-t-il d’un ton amusé. En guise de punition, son bassin se prélasse une nouvelle fois contre le sien. Tu n’es pas obligé de me le dire, si tu ne veux pas. Mais alors je ne te dirai jamais comment je me suis fait percer le téton.
Son sourire s’étire en coin, juste le temps de poser sa langue contre sa canine. Puis, distraitement, vient écarter quelques mèches noires de son front. De la pulpe de ses doigts, il teste la douceur de sa peau. Léger, gracile, comme un souffle.
Ptain. C’est pas possible. Ses dents mordent l’intérieur de sa joue, il le fixe dans les yeux mais se retire. Sa main tombe sur le matelas, juste à côté de ses cuisses. Il a envie de parler, Evan. Il est honnête, entier, ça explose dans tout son être. Il veut parler, mettre des mots, comprendre pourquoi ce mec lui fait cet effet. Et en même temps, cette bulle, il veut pas l’éclater.
- Maintenant, parle-moi de ta première cuite, dit-il en gardant le sourire.
Tu le vois sourire. Du coin de l'oeil. Il te présente sa plus belle rangée de dents blanches, ce genre de sourire un poil insolent, qui baigne dans la fatuité de la beau gosse attitude.
Ca t'enerve dans le fond parce que... t'avais jamais fait gaffe à son sourire jusque là. Tu relèves les yeux pour les ancrer dans son regard bleu céruléen. Battement de cils.
- Inadmissible hein, rétorques-tu, moqueur alors que tu te rapproches naturellement de lui, sourire aussi amusé. Puis, le bassin qui se frictionne au tien, ca t'fait grave tourner la tête. T'expire, profondément. Tu le sens que ça te fait un bien fou, que ca libère le poids du carcan de l'insécurité sur tes épaules. Putain de poids. Tu devrais juste lâcher prise. Tu vas pas tomber amoureux de lui de toute façon. Tu le sais. Tu le penses. Alors... tout ce que tu vis, c'est juste. la passion. Et il te plait.
C'est tout. Tu l'agrippes par le fessier pour presser fermement leur aine l'une contre l'autre, tu rapproches ton visage du sien, quitte à soulever légèrement ta tête de l'oreiller et tu murmures contre ses lèvres, suave, grave :
- .. C'est un accident que j'ai eu, qui a failli me coûter la vie. Tu vas trouver ça très con, et c'est pour ça que j'en parle pas des masses. C'était l'hiver, mon père coupait des buches. .. j'avais 6 ans, je sais plus. ... ... il m'a dit de me reculer mais je voulais voir de plus près, je sais pas ce qu'il m'a pris mais ca me fascinait. Cette hache qui s'abattait mortellement sur la bûche. ... et puis j'ai perdu connaissance et je me suis retrouvé à l'hopital, avec mon père énervé après moi parce que à quelques milimètres près, il me fendait le visage en deux.
Tu le regardes cette fois-ci droit dans les yeux et tu renchéris.
- ... tu veux savoir la meilleure ? Quand je me suis battu il y a deux ans avec une fille au bar, elle a réussi à me bloquer et elle a rouvert cette plaie avec un couteau.
Petit sourire en coin, du côté grimé bien évidemment. Peut-être fier, qui sait ?
- c'est pour ça qu'elle est pas belle à voir....
Puis plus pensif.
- Mais quelque part, quand je souris ou grimace, peu importe du moment que mes lèvres bougent.... cette sensation désagréable qui me tiraille la peau, ca me ramène aux souvenirs avec mon père.
Au final, tu snobes une nouvelle question que tu n'avais pas envie de développer parce que tu t'en souvenais absolument pas. Au lieu de ça, tu le fixes derechef et l'enlaces pour l'embrasser chaudement, enroulant ta langue autour de la sienne pour te nourrir de la sensation sensuelle de la friction entre elles, avant de surenchérir par un baiser plus ardent encore. Ou vorace. Tes mains glissant, elles, sur tout le dos d'Evan avant de se faufiler vers le fessier.
- Inadmissible, oui, répète-t-il à voix basse, les yeux plantés aux siens.
Leurs corps se rapprochent, il admire la tension qui s’échappe, ce sourire qui parle à voix basse. Ça a toujours été une des choses qu’il préfère, le sourire. Il les aime tous ; ceux qui ne mentent pas, ceux qui laissent deviner les pensées, ceux qui jouent, amusés. Comme par mimétisme, les épaules d’Evan se détendent à leur tour. Après tout ça sert à quoi, de se prendre la tête ? Il cogite déjà à longueur de journée. A chaque instant il ressasse, oublie, distrait mais perturbé. Ici, on lui offre une échappée. Quelque chose de vrai, débridé, passionné.
Mais tu sais pas tout, Matthew. Et alors ? Il aime pas omettre, il veut pas paraître. Juste être. Ça viendra.
Un soupir, volontairement plaintif, quand leurs corps se rencontrent encore. D’une main il agrippe le col du t-shirt sombre, maintient le chanteur proche de ses lèvres pour l’écouter. Intéressé. Absorbé. Il regarde tant ses yeux que ses lèvres, d’où s’échappe cette voix rauque et sensuelle. Bandante.
Ça l’amuse, cette histoire. Il l’imagine, ce pauvre gamin défiguré, têtu, fasciné ; et son père dans tous ses états, aimant et affolé. Puis il le voit, bien plus âgé, chercher la merde dans un bar. Le spectre d’une bagarre au couteau, cette légère fierté qui transparaît, Evan ça le fait pas fuir. Au contraire, ça l’intrigue. Bien que la bouche contre la sienne, il peut pas s’empêcher de rire.
- Elle n’est pas si désagréable à regarder, glisse-t-il.
Ou même à embrasser. Cette marque sur son visage, cette histoire gravée dans sa peau, Evan trouve ça beau. Il trouve ça vrai. Encore plus quand est abordé le souvenir d’un père maintenant éloigné. Il doit lui manquer, c’est évident. Douce mélancolie qui le pousse à sourire. Puis cogiter. Fronce les sourcils, un court instant. De son enfance, il ne se rappelle presque plus rien. Fouille dans sa mémoire, cherche des images de son père quand il était gamin. Rien. Rien du tout. Bordel, il se rappelle de rien !?
Heureusement, la passion d’un baiser lui éloigne ces pensées dérangées. Il relâche le col, enlace sa nuque pour profiter et s’oublier. Qui se souvient de tout ? Personne, c’est certain. Pas vrai ? Alors il frissonne, tant par le ballet échauffé que leurs langues dansent que par les mains qui parcourent son dos d’une caresse suggestive. Ça le rend fou. Il se redresse, assis sur ses cuisses musclées, en l’attirant avec lui. Ouvre les yeux, l’esprit embrumé de désir. Mord une lèvre, la lèche aussitôt pour l’apaiser. Ils l’ont déjà fait, deux fois. Et pourtant, il a encore envie de le dévorer.
Face à face, les yeux brillants de facétie, Evan prend le temps d’être pensif.
- C’était un ours.
Le regarde, sérieux pendant une seconde et demi avant d’éclater de rire. Puis il secoue la tête pour reprendre, les bras toujours nonchalamment enroulés à son cou. Il replonge dans ses souvenirs, ceux d’une vie aujourd’hui terminée.
- C’était une soirée… très, très arrosée. On venait de sortir premiers du championnat lycéen d’athlétisme, on était cons et bourrés…Tu connais la classique, non ? Des shots, action ou vérité. Je prends toujours action, évidemment. Et ce jour-là, ça n’a pas manqué. « Fais toi percer pour fêter la victoire ! » qu’ils me lancent. Alors moi, tu te doutes que je plonge dedans. « Si tu nous fais un striptease, je te fais ça tout de suite ! ».
Il se remémore son ami, un beau garçon, qui se déshabille d’un air lascif. Un rire, quand il se revoit chercher une aiguille dans l’armoire des parents de leur hôte.
- Il l’a fait, et bien sûr, moi aussi. J’ai stérilisé une aiguille de broderie, celles qui sont assez épaisses, puis je me suis percé moi-même avant d’y glisser une de mes boucles d’oreille. Je te dis pas la douleur, et encore j’étais bourré, fait-il en pouffant. C’est pour ça qu’il est légèrement de traviole. Mais je l’aime bien, ça donne un style.
Evan, toujours prêt pour les conneries. Pour les folies. Il observe le chanteur, avide de savoir ce qu’il pense de lui en sachant ça. En découvrant, petit à petit, ce qui se trame derrière ses beaux yeux et son sourire.
- Tu sais tout. Alors raconte-moi autre chose sur toi, demande-t-il en agrippant ses cheveux noirs derrière la nuque. Parle-moi de ce gars qui saute des inconnus dans les bars, se fait sauter dans une pièce ouverte au public, puis prend encore ce même gars dans sa chambre. Il rit d’un air léger. Non que ce soit dommageable, je sais que je suis irrésistible.
S’approche, taquin, pour tirer sur sa lèvre inférieure avec les dents.
En y réflechissant, t'en sais pas assez sur lui. T'aimerais en savoir plus. Tu le veux. de plus en plus.
L'idée qu'Evan puisse être un format de drogue te déplait, pour ce non-désir de dépendance liée à quelqu'un. Mais, life is life, l'alchimie que vous entretenez, tu peux pas jouer à l'aveugle indéfiniment. Faut que tu prennes un peu sur toi, et que t'avances. En arrachant ces oeillères.
Gémissement gutural quand il te lèche les lèvres. T'inspire profondément. C'est fort ; si fort. Ca pulse jusque dans tes veines. Quand enfin il te répond au sujet du téton, t'as ce rictus amusé à la commissure droite de tes lèvres. Et tu l'écoutes déballer une partie de sa vie, enfin connecté à un pan de ses souvenirs.
Tu le voulais, tu l'as eu.
Plus qu'attentionné, ton visage se parsème de mimiques et expressions en lien avec les émotions qu'Evan suscite chez toi. De par sa connerie ou de son insouscience. Tu t'demandes si t'aimerais continuer comme ça. Enfin, tu veux dire, rester leader, et porter à bras le corps certaines conséquences dont t'aimerais te débarrasser. Des fois, t'aimerais exploser cette île, et vivre ailleurs. C'est une prison à grande échelle, sous couvert de normes humaines et édulcorées.
Ricanement cynique. Quelle putain de vie de merde. Et dans le lot, t'as gagné ce type pour t'égayer le quotidien. ... Des fois t'as la sensation que tout est faux. Des fois, t'as l'impression que tout ceci n'est qu'une télé-réalité, ou un cauchemar en soi. Pas qu'Evan te fasse réellement songer à cette probabilité, mais presque quand même.
Parce que t'as pas l'impression d'avoir le droit d'être aimé. Ni d'aimer.
Il achève enfin, tu t'es perdu dans tes songes. Même si t'as écouté le principal, tu reviens à toi et cherches des yeux un sujet. ... Tu renifles, et te redresses pour te mettre en position assise. Tout en gardant le corps assez massif du sportif contre toi. Tu commences par un baiser avide, assoiffé, puis tu plonges ton nez dans le cou pour mordiller son épiderme et la lécher ... tout en commençant ton histoire.
- Quand j'avais cinq ans, j'ai trouvé une basse dans mon grenier...
Et tes mots s'enchaînent dans un élan de monologue narratif.
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Lun 9 Aoû - 21:20
