Vêtu d’un simple jogging noir et allongé sur son lit, un large sourire étiré aux lèvres, Evan met son téléphone en veille. Parler à Ilya, ça a le don de le mettre de bonne humeur et d’éloigner un peu tout ce qui rend sa vie difficile. Ça l’aide à oublier le poids de ses cernes, les cauchemars, sa mémoire, et tout ce qui va de travers dans son quotidien.
C’est simple. Naturel.

Jette un coup d’œil vers le sol, pour contempler le paillasson trônant au bord de son lit.
Il est magnifique. Aussi marron que le tronc d’un arbre mort, aussi piquant qu’un porc-épic qui vient de passer chez le coiffeur, aussi glorieux que le prénom qu’il affiche en grandes lettres suivi d’un cœur. Amusé, il ne peut pas s’empêcher de rire en imaginant la tête d’Ilya.
Evidemment, et ce malgré les sous-entendus de leur conversation, il ne compte pas réellement le faire dormir dessus. La personnalisation de ce paillasson, cela entre dans le cadre d’une longue liste de choses stupides qu’Evan s’amuse bien trop régulièrement à faire.

Le coup sur la porte résonne et il se dresse en position assise. Dans son esprit, déjà, viennent se bousculer les peurs toutes plus improbables les unes que les autres qui caractérisent son ami. On pourrait croire que c’est un problème, mais c’est tout l’inverse.
Tu lui apportes du répit.

Tout juste le temps d’amorcer son « entre, Ilya » que déjà le paquet de bonbons lui atterrit sur la figure. Un rire se perd, tandis qu’il regarde son butin de la soirée.
C’est parfait.
Dresse le menton vers Ilya quand il pose sa question d’un air renfrogné, puis écarte ses bras gribouillés au stylo (des notes telles que «penser aux chaussures dans le hall», «rdv psy 18h» ou encore «sms Matt») d’un air princier avant de lui désigner le sol à ses pieds. Sur son visage, le sourire prend bien la moitié.

- Admire cette beauté. Tu vas kiffer, bro.

Un nouveau rire, tandis qu’il ouvre le paquet de bonbons sans attendre. Il en avait d’autres, sous son oreiller ainsi que dans sa table de chevet, mais il n’allait certainement pas refuser une offrande. Déjà, il en engloutit trois d’une traite avant de reprendre :

- J’espère que t’as pas sommeil, je pète la forme.

Ou plutôt, il ne se sent pas de dormir. Pas tout de suite.
D’un geste curieux, il attrape la switch qu’il allume pour zieuter le répertoire de jeux qu’il connait déjà par cœur. Puis, rapidement distrait, la repose sur les draps et regarde Ilya.

- J’adore ton débardeur, tu me le prêteras ? Et il est sérieux, c’est bien le pire. Tu veux commencer par quoi ? Tu peux tester ton nouveau lit, ouvrir une canette et discuter, ou bien je peux d’ores et déjà te laver sur Mario Kart 8. T’as le choix !

Avale une nouvelle poignée de bonbons.

- Comment tu vas ?

Distrait. Toujours.