La journée avait pourtant si bien commencée. Le ciel était clair, pas un seul nuage à l’horizon. Ce bleu éclatant à en perdre la rétine. Un soleil qui régnait sans partage. Une douce chaleur, sans être oppressante. Les jardins étaient particulièrement en vogue pendant cette époque de l’année. Il y avait un air paisible et reposant dans l’air. Ce petit quelque chose de légèreté.
Et pourtant. Tu n’avais pas la tête à penser à tout cela. Non, tes pensées étaient hantées par d’autres maux. Par des craintes bien réelles. Bien présentes. C’était aujourd’hui. C’était maintenant. Tu allais enfin la revoir. Après tout ce temps. Après toutes ces années. Elle avait sûrement bien grandi. Pouvais-tu au moins la reconnaitre ?
Tu te posais un tas de question. Bien d’autres pendant le trajet. Plus le temps passait et moins tu étais prêt à faire cette rencontre. Tu le savais au fond de toi. Tu ne le seras probablement jamais. Mais tu devais le faire. Tu devais la revoir. Tu ne pouvais pas l’abandonner une fois de plus. Pas encore. S’il y avait bien quelqu’un que tu ne voulais pas décevoir ici. C’était elle.
C’était bientôt le moment. Celui tant redouté. C’était trop tard. Maintenant. Tu devais rester. Tu ne pouvais plus faire machine arrière. Techniquement tu pouvais. Avec ton pouvoir c’était même assez simple. Mais métaphoriquement, c’était trop tard. Dans ton esprit, dans ta tête. Tu étais résolu à cette idée. Et si tu étais bien conscient d’une chose. Ce n’était pas le moment de te disperser. Que ce soit dans ta tête ou en dehors.
Une silhouette familière traversa ton champ de vision. C’était elle. Une petite blonde, l’air hagard. Le visage contrarié. Mais en étais-tu sûr ? Pas vraiment. Mais tu n’avais rien à perdre. Dans le pire des cas tu jouerais la carte de la gêne, t’excusant de l’avoir prise pour quelqu’un d’autre. Et si c’était vraiment elle ? Tu n’en avais aucune idée. Tu verrais bien. C’était ainsi que tu essayais de te convaincre.
Rassemblant le peu de courage qu’il te restait. Tu inspiras profondément avant de t’élancer vers sa direction. Un pas après l’autre. Un pas lourd. La température était pourtant normale, mais chaque pas de plus te rapprocher de l’exhaustion. Tu te fatiguais à vue d’œil. Tu commençais même à craindre de ne pas avoir la force suffisante pour l’atteindre.
Balayant cette idée d’un revers de la main. Tu avais enfin rattrapé la petite gamine blonde. C’était le moment. C’était ton moment.
Nana…. C’est toi ?
Maintenant tu ne pouvais qu’attendre. Attendre sa réaction. Attendre une infinité. Une durée qui semblait durer à jamais. Tu avais le même visage impassible, le même que d’habitude. Mais au fond de toi, tu étais en panique. Tu craignais sa réaction. Sa réponse.
Comme souvent en vérité, Ana était de mauvaise humeur. Mais, à l’inverse de l’habituelle sans fondement, c’était son arrivée sur Sajna qui était un véritable trouble pour elle. Un rêve pourtant, d’avoir enfin pu quitter la maison familiale ainsi que ses géniteurs, bien qu’elle n’aurait jamais imaginée les quitter face à une telle obligation. Qu’elle aussi, qu’elle se soit éveillée. Somusienne, rejetée. Un être qui ne devait pas exister. Un rire alors, tandis qu’elle traversait les jardins de sa nouvelle habitation. Un rire fort mais brisé, n’était-elle pas tout simplement ce que lui pestaient ses parents depuis sa plus tendre enfance ?
Après tout, le changement était radical. L’île, le pensionnat, sa chambre. Les bâtiments ? La grandeur des jardins et les règlements qui tombaient déjà à la pelle. Un monde qui, de toute évidence, n’était pas le sien. Alors elle avait rechigné toute la nuit, n’arrivant pas à fermer l’œil. Ne pensait-elle pas à être chose que ce luxe flamboyant ? N’y avait-il pas donc un autre problème, une haine féroce pour laquelle Ana semblait se voiler la face ? Sans nul doute.
Il est d’ailleurs fort probable que ses pas soient rapides pour y échapper. Car elle savait, elle s’imaginait qu’il pouvait être n’importe où à l’observer. La source de ses malheurs, d’autres auraient peut-être été content de le retrouver, mais ce n’était pas le cas d’Ana. Bien au contraire. Ses souvenirs d’avant à ses côtés n’étaient que songes déjà bien effacés. Il n’était plus rien pour elle, si ce n'est un ennemi à abattre si leur chemin se croisait à nouveau.
L’évidence n’est-il pas ? Que sa voix s’élève si rapidement à ses côtés. Lui qui après son départ loin d’Ana, doit s’imaginer l’avoir abandonné (et c’était bien le cas), s’imaginer qu’elle a hâte de le retrouver (et ça ne l’était pas). Espérait-il seulement qu’ils puissent être comme avant ? Frère et sœur. Car à ses yeux, il ne l’était tout simplement plus.
« T’es qui. »
Hargneuse, qu’elle se retourne alors face au blond. Sa voix, elle serait capable de s’en rappeler même après tant d’année. Son physique ? Il avait bien grandi, différent. Mais toujours semblable, elle qui s’était regardé dans un miroir la veille. Aucun doute qu'ils partageait les mêmes gènes.
Montre les dents. Yeux dans les yeux, car dans sa tête tu es déjà mort deux fois. Elle qui cherche l’indifférence, mais seul le russe traverse ses lèvres. L'indifférence n'existe pas, car le sang ne fait qu'un tour.
Anastassia Melnikov
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Ven 4 Juin - 15:03
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Il y a un sentiment pire qu’éprouver une trahison. En être à l’origine. Tu es coupable. Tu le sais. Tu le savais avant même de venir la confronter. Au fond de toi, tu n’as jamais douté de cette réaction. Tu savais qu’elle viendrait tôt ou tard. Tu savais qu’elle te ferait du mal, qu’au fond, tu serais blessé, meurtris. A bout de force. Et pourtant. Tu te tenais là, debout, face à elle. Face à ton plus grand regret.
Tout était ta faute. Tout. Tu avais trahi sa confiance, ta promesse. Tu étais le responsable de tous ses maux. Tu étais l’échec de toute sa vie. La déception qu’elle avait en te regardant. La colère. Toutes ces émotions. Tu les ressentais au centuple au fond de toi. Il n’y a pas de pardon pour les parjures.
Elle montre les crocs, elle te dévisage d’un regard froid. Plus froid que n’importe quelle nuit d’hiver. Tu ne souhaites qu’une seule chose. Expier ton pécher. Mais pourras-t-elle un jour te pardonner ? Tu l’ignores. Plus tu soutiens ton regard, plus tu doutes. Plus tu regardes ta sœur, plus le chemin semble long. Inatteignable.
Ses mots t’achèvent. Confirment les doutes. La sentence est irrévocable. Ton cœur se serre et se brise. Tu sens ton âme se figer, se tordre de douleur. Tu retiens une larme. Tu prends sur toi. Tu n’as même pas la force de pleurer. Tu voudrais la prendre dans tes bras, tu voudrais la serrer contre toi. Ton bras refuse d’obéir. Tu restes immobile. Comme mort. Comme un spectre au milieu du parc.
Ana… Je… Je suis désolé…. Pour tout….
Tu n’as pas les mots. Les phrases viennent mais ne sortent pas. Tu n’oses pas. Tu n’oses rien. De peur de la décevoir davantage, de peur de la blesser à nouveau. De peur. Tu cherches son regard, le visage tremblant, craignant sa réponse. Comme un condamné la veille de son exécution. Tu vois la fin et tu coudrais détourner le regard. N’osant pas soutenir celui de la faucheuse. Pourtant tes yeux ne flanchent pas, comme happé par cette vision. Comme si tu voulais graver le visage de ta sœur une dernière fois. Une dernière fois avant la fin.
Yeux dans les yeux. Encore, encore. Aucun des deux ne détournent le regard, maintient celui de l’autre même si aucun n’est prêt à abandonner. À s’y dérober. Des jours et des mois, des années sont passés, mais la rancœur existe, se développe. Un sentiment si féroce qu’il serait bien plus dévastateur qu’un artefact séparé de son détenteur, car c’était justement le rapprochement qui alimentait la force des choses.
Un rictus se dessine au creux de ses lèvres tandis qu’un rire léger, d’une unique sonorité, s’entremêle à un semblant d’expiration.
« Ahah désolé ? »
Qu’elle n’en serait à rien de jubiler. À qui pensait-il mentir exactement ? Donnait-elle l’impression d’être si naïve ? Pensait-il réellement qu’après toutes ces années, il aurait encore l’image du tendre garçon adoré des Melnikov ?
« Et désolé de quoi ? De tout ? »
Mais Ana n’était pas leurs parents. Elle était même, pour ainsi dire, qu’un déchet parmi les déchets. Déjà accident aux yeux des siens, simple parasite pour la Russie, et la voilà dorénavant monstre aux yeux de la société. Ah, il était désolé !
« Que je sois née ou que je sois ici ? »
Un spasme alors, qui parcourt son corps. D’un léger coup de tête sur le côté, qui disparaît au creux de son poing serré. Si tu savais comme elle se contenait.
« Ici avec ta putain de sale gueule. »
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Ven 4 Juin - 18:56
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La mort est parfois une douce délivrance. Il n’y a plus rien une fois mort. Plus de souffrance. Plus de peine. Plus de regret. Tu commences à comprendre pourquoi certains souhaitent se débarrasser de tout, de leur vie. Tout ce que tu voulais, c’était la prendre dans tes bras une nouvelle fois. L’avoir à tes côtés. Tout ce que tu veux, c’était revoir le sourire de ta petite sœur. Ton rêve, c’était d’exaucer le sien.
Désolé d’être partis. De ne pas avoir été là. De ne pas avoir été assez fort à l’époque pour te sortir de là. Désolé de t’avoir abandonné.
Oui, tu étais désolé. Désolé pour tout. Désolé que son frère soit si pitoyable. Désolé qu’il soit si faible. Désolé qu’il ne puisse qu’être désolé. C’est la seule chose qu’il te reste. Le pardon. Il était trop tard de toute façon. Tu ne pouvais pas retourner dans le passé, pas plus que le changer. Tu ne pouvais qu’espérer son pardon. Tout ce que tu veux. C’était la prendre dans tes bras une dernière fois. Si seulement elle pouvait te pardonner une fois.
Moi, je suis content de te voir en tout cas.
Tu avais tellement de choses à dire, tellement de choses à rajouter. Tu voulais lui faire savoir à quel point elle t’avait manquée. A quel point tu voulais la revoir. Mais tu n’avais aucune légitimé. Plus aucun droit. Plus rien.
Moi aussi ça me fait plaisir de savoir que tu es en vie.
Un rictus se dessine sur tes lèvres, maladroitement. Qui ne ressemble à rien. Tu n’arrives pas à remettre de l’ordre dans tes émotions. Tu n’arrives à rien.
Je te… Les mots s’arrêtent en travers de ta gorge. Je vais tout faire pour que tu sois heureuse. Que tu vives ta vie à l’abris maintenant Ana.
Tu voulais lui faire une nouvelle promesse. Mais tu n’en avais plus la force. Tu avais peur de la décevoir une nouvelle fois. De la trahir à nouveau. Tu étais effrayé de tout perdre. Tu ne voulais pas risquer de la perdre elle. Elle n’allait pas te croire, elle ne te pardonnerait probablement pas. Pourtant, tu étais prêt à donner ta vie pour elle à présent. Pour qu’elle puisse vivre une vie heureuse. La vie qu’elle avait méritée. Tu ne voulais surtout pas qu’elle emprunte le même chemin que toi. Elle devait vivre égoïstement, pour elle. Pour son bonheur. Pour ses rêves. Le rôle de sacrifié, de laissé pour compte. Il t’allait bien au final. Parce que c’est tout ce que tu le mérites.
Qu’elle lui hurle si fort, si fort et si puissamment qu’elle pourrait s’en déchirer les cordes vocales. Parce qu’elle s’en arracherait les yeux pour ne plus le voir, elle s’en arracherait les oreilles pour ne plus l’entendre, alors elle était prête à bousiller sa voix pour qu’il comprenne à quel point il devait disparaître de sa vie.
Mais il ne pouvait pas, n’est-ce pas ? Parce que comme avant, vous étiez là tout les deux. La simple différence était que d’un studio sale et délaissé, vous étiez dorénavant dans une île grandiose et brillante.
« T’es là ouinouin à jouer les bons saint-bernards parce que j’me retrouve sur cette île à la con. Avec des cons comme toi. »
Ses poings se serrent tellement fort que ses ongles pourraient s’y enfoncer. Une légère douleur, un picotement furtif qu’Ana ignore tant son ressenti est destructeur. Pourquoi, à peine était-elle arrivée sur l’île, qu’il avait fallu qu’il accoure à sa rencontre ?
« Avant t’en avais rien à branler, alors change rien te force pas. »
Et pourtant soyons sincère, Ana n’aurait pas préféré l’ignorance. Qu’il fasse comme si de rien était, comme s’il était au courant de rien. Car c’était ainsi qu’elle était, malheureuse dans tous les cas.
« T’es qu’une merde de toute façon. »
Semblable à ses géniteurs finalement, qu’elle vient à lui cracher dessus. Qu’elle était bonne Ana, de lui offrir cette dernière marque d’affection que leurs parents lui avaient offert.
« J’en ai rien à foutre de tes excuses à deux balles. Mais ta conscience ça va faire bobo hein ? C’est ça, c’est ça ton putain de problème ! »
Pire qu’une fillette. Fragile, inutile. Dans un autre contexte, il ne fait aucun doute qu’elle lui aurait déjà ri au nez avant de le rouer de coup.
« Tu veux m’aider c’est ça hein ? »
Mais pourtant, sans la moindre suite. Songeuse. Car au fond, il n’y avait aucun moyen de lui venir en aide, si ce n’était retourner dans le temps et de supprimer son existence à tout jamais.
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Ven 4 Juin - 23:18
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C’était quoi ton problème. C’était quoi notre problème. C’était quoi le problème de ce monde. Elle te hurle dessus. Elle s’acharne. Elle continue. Tu essayes de soutenir son regard. Sa colère, sa haine. Mais c’est dur. Tu le sais. Tu le vois. Tu le ressens. Vraiment, c’est douloureux. Cette sensation, elle te prend aux tripes. Tu voudrais tout lui dire. A quel point tout est de ta faute. A quel point tu es prêt à donner pour elle.
Pourtant, tu savais au fond de toi. Que quoi que tu dises. Quoi que tu fasses. Rien de tout ça n’avait d’importance, ça ne suffirait pas. Ce n’était jamais assez. Pas aux yeux d’Ana. Pas après tout ce qu’il s’était passé. Tu avais cette sensation horrible. Ce pincement au cœur. Ce « trop tard » qui résonnait au fond de ton âme.
Je me force pas. Je le pense sincèrement. Même si tu ne me crois pas. C’est la vérité Ana. C’est ma vérité à moi. Même si toi tu n’y crois pas.
Les insultes pleuvent. Une averse qui devait te rafraichir te fait plus l’effet d’une douche froide. C’est pas vraiment agréable. A choisir tu préférais encore qu’elle t’épargne tout ce qu’elle pense. Ou pas. Si elle avait choisi de t’ignorer t’aurais probablement déjà craqué à l’heure qu’il est.
Je m’en fous de ma conscience. Je m’en fous de moi. De ce que je peux ressentir. Tu peux te défouler si ça te fait plaisir, me cracher dessus ou m’insulter. Moi je veux que toi, Ana, tu te sentes bien.
Tu décides de résister. Au moins un minium. Toi aussi tu veux dire ce que tu as sur le cœur. Toi aussi tu veux déballer ton sac. Toi aussi tu veux lui faire comprendre.
Oui je veux t’aider. Oui Anastasia Melnikov. Je veux t’aider. Sincèrement.
Alors fais le. Dis ce que tu penses. Même si c’est quelque chose du style « casse toi » ou « laisse-moi tranquille ». Quoi qu’elle dise de toute façon. Quoi qu’elle pense. Tu le feras sans broncher. Elle ne voulait pas te croire ? Alors tu allais lui montrer. Tu vas lui montrer à quel point tu es sérieux. Jusqu’où tu es prêt à aller pour elle.
« Évidemment, que c’est ‘‘ta vérité’’ qu’elle se moque de lui, rend sa voix beaucoup plus aiguë et mime des guillemets avec ses doigts, t’es bon qu’à ça. À te mentir à toi-même. »
Et c’est la boule au ventre qui survient. Non pas de peur, de honte, de stress. Elle n’était pas désemparée, juste fougueuse. Ce ressenti, c’est ce petit papillon qui lui donne envie de le détruire, de l’atomiser. De le faire disparaître. Ah Sacha ! Comme tu parais si misérable dorénavant.
« D’accord. »
D’un coup de tête qu’elle en vient à acquiescer. Ana n’était pas vraiment satisfaite, incapable de croire ses paroles et ses promesses. Après tout, ce n’était pas son départ le problème, mais le fait qu’ils partageaient le même sang. Les mêmes parents, la même existence. Ils n’étaient simplement pas faits pour s’entendre.
« Je te prends au mot alors. »
Lui gentil et bien éduqué. Une marque de réussite. Car après tout, il avait réussi à se hisser à une place importante sur Sajna, n’est-il pas ? Et elle, qu’avait-elle réussi dans sa vie ? Si ce n’était que quitter ses géniteurs comme elle l’avait espéré depuis toujours. Bien que ce fait encore, n’était pas de sa propre initiative au point même, qu’au bout d’un jour, Ana en venait à le regretter. Qu’était-elle ? Sauvage et mordante. Que pouvait-elle apporter ? C’est ce qu’on lui avait souvent demandé.
« Fait ce que les parents ont toujours souhaités. »
Et alors à ce moment précis, un pas dans sa direction. Briser la légère distance qui les séparait. Face à face, un rien pour l’atteindre dorénavant.
« Ce qu’ils auraient dû faire dès le début. »
De la distance dorénavant inexistante, ce sont des coups de pieds qui rythment ses paroles. Alors beaucoup plus féroce pour ce mot
« Allez. »
Achève-moi.
Et le rire explose. Car elle sait qu’il en est incapable. Tout comme leurs géniteurs l’étaient malgré la haine qu’ils lui portaient. C’était ainsi, Ana. Simplement condamnée à exister, alors qu'elle ne désirait même pas partir.
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Sam 5 Juin - 17:37
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Ta vérité. Oui en effet. C’est la vérité que tu lui offres. C’est la vérité que tu veux lui partager. Dommage qu’elle n’en ait pas conscience. Dommage qu’elle soit trop bornée et aveugle pour le comprendre. Pour ce qui est de se mentir à soi-même. Il était d’accord avec elle. Tu n’arriveras peut-être jamais à lui offrir le bonheur. Mais malgré ça. Tu veux essayer. Tu ne peux pas te résoudre à l’abandonner une nouvelle fois. Rien que cette seule pensée t’est insupportable. Alors oui, c’est sûrement naïf, stupide, futile. Mais tu continueras à y croire. Toi. Tu veux y croire. Tu veux croire en elle, même si elle n’y croit plus.
Elle s’avance. Toujours le visage fiché dans la colère. Meurtris par la haine. Ce rictus qui se dessine. Cette grimace qui vient tordre ses traits. Tu étais bien décidé à lui faire payer Ana pas vrai ? Bien décidé à lui en vouloir. A le croire responsable de tout. De toutes tes peines. Tes tristesses et tes regrets. Pourtant Sacha. Cette option te va aussi. Elle peut te haïr du moment qu’elle trouve le bonheur au bout du tunnel. Un fardeau de plus ou de moins sur ton épaule.
Tu le faisais pour les autres. Pour tous les autres. Jamais pour toi. Martyr dans l’âme. Raison de plus de le faire pour ton sang, pour ta famille. Pour ta sœur. Tu prendrais tout à bras le corps. Tu n’abandonneras pas toi. Tu continueras sur ce chemin que les autres traces pour toi. Tu continueras sur cette route douloureuse. Oh Sacha, qui de ton esprit ou de ton corps craquera le premier ?
Arrête avec ça. On n’a pas besoin d’eux. Et je ne le souhaite pas. Moi
Tu plonges ton regard dans le sien. Tu la toises. Tu soutiens ce regard, difficilement. Une nouvelle vague de culpabilité vient agresser tes sens.
Si tu veux te défouler sur moi fais le. Je ne me défendrai pas.
Prise de folie, elle te frappe, elle rigole aux éclats. Oh Ana pourquoi on en est arrivée là. Si seulement tu l’avais sauvé avant. Si seulement tu avais été un meilleur grand frère.
C’est à toi que j’ai demandé de faire ce que tu voulais, pas l’inverse.
Tu disais ça mais elle te donnait déjà des coups, dans un sens elle agissait déjà comme bon lui semble. Elle était elle-même.
Qu’elle le frappe encore, tente d’y mettre le plus de force possible. Mais elle est ridicule n’est-ce pas ? N’est-ce pas Sacha, qu’intérieurement tu la trouves ridicule ? Elle que tu cherches à briser en apparaissant ainsi devant elle, alors qu’elle vient à peine d’arriver.
« C’est drôle ça ! T’avais pas dit que c’était moi et pas toi ? »
Lui qui manie la langue bien mieux qu’elle. Qui sait qu’elle est fragile, désorientée. Il dit être son frère, qu’il pense à elle depuis son arrivée sur l’île ? Elle en rigolerait jusqu’à la nuit des temps tant la blague lui paraît tordante. Mais Ana préférerait t’oublier, que jamais vos chemins ne se soient croisés ; ici ou avant. Qu’importe. Elle ne t’aime pas et ne ta jamais aimé, tout comme vos géniteurs qui la haïssaient.
« Et c’est que je veux ? Alors quoi ? Tu reviens sur ce que tu dis ? »
Grince des dents, mâchoire et poings serrés qu’elle arrête de le frapper. Il ne veut même pas réagir à ses attaques ? Que cherche-t-il à vouloir la rendre bien plus ridicule qu’elle ne l’était déjà.
« Je, je, je, je et puis moi, moi et moi hein ? »
Elle grimace. Aurait souhaité se moquer de lui, de ses pensées et de cet égocentrisme.
« Ça a toujours été toi et même ici c’est encore toi. »
Toujours, toujours. Alors à quoi bon chercher le joli rôle, celui qu’il possède depuis son premier cri. Est-ce qu’il lui est même arrivé, ne serait-ce qu’un jour, de réellement penser à elle ? À elle, à sa sœur, à Anastassia. À ce qu’elle était, à ce qu’elle désirait et voulait être. A
« Donc me dit pas que c’est pas une question de conscience, car c’est juste ça. T’as honte, t’es mal. T’as appris que j’étais là et t’as voulu libérer ton cœur comme un putain de connard. »
Elle ne lui demande pas grand-chose, juste d’arrêter. D’arrêter de faire comme-ci. De jouer les gentils, alors qu’il est évident qu’il ne pense qu’à lui. D’arrêter de dire qu’il fait ça pour elle, alors que ce n’est clairement pas le cas. Que ses paroles ne soient même pas en adéquation entre-elles. Car pour une fois, c’est quelque chose qu’il ne peut pas contrôler. Pour une fois, c’est quelqu’un qui agit comme elle l’entend, qui n’est pas régit pas cet vulgaires règles ou espérance.
« Sans même penser à moi, car c’est toujours toi et toi. »
Ses cheveux qui s’hérissent, le corps électrique. Le courant qui parcoure son être dans les moindres détails. Son pouvoir qui fait doucement écho à sa colère, dangereuse.
« Alors juste : ferme ta gueule. J’aime pas qu’on me prenne pour une conne et le fait que ce soit toi ? C'est juste pire. »
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Mer 9 Juin - 23:06
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Ta culpabilité s’arrangeait pas avec elle. Au contraire même, elle avait même plutôt tendance à empirer à mesure que le temps passait. Au moins elle se défoule sur toi. C’est la seule chose qu’elle a retenu de ton discours de toute façon. Elle te frappe et tu restes là, debout en face d’elle, sans broncher. Tu ne bouges même pas un muscle. Tu te contentes de subir. Pour toi c’est un moyen d’expier tes fautes, pour elle c’est un moyen d’évacuer sa frustration.
T’es trop bornée dans tes idées pour penser que ton frère est autre chose qu’un connard. Le fait que tu sois aussi têtu prouve qu’on est bien de la même famille Ana.
Tu soupires, t’as plus les mots, quoi que tu dises tu parles dans le vent. Elle t’écoutera pas. Pas à un seul moment. Tu sais plus quoi faire, tu sais pas quoi faire pour qu’elle entende raison. Même en te frappant elle n’essaye même pas. Au contraire, elle se braque davantage. Encore plus, comme si ça ne suffisait pas déjà.
J’ai pas honte de toi Ana bordel. Je suis fier d’être ton frère, je m’en fous que tu n’écoutes pas ou que tu refuses de m’écouter. Tu changeras pas la vérité. Tu peux penser ce que tu veux.
Tu laisses parler un peu tes émotions, à peine. Tu laisses ton vocabulaire russe se délier. Tes origines reprendre le dessus. Tu dis les choses comme elles sont, comme tu les penses. Sans demi-mesure, sans toutes ces formes.
T’es pas croyable. T’as beau dire que je pense qu’à moi. T’as beau pensé que j’en ai rien à faire. Si c’était vraiment le cas je resterai pas planté là comme un plot à me faire insulter et taper par ma sœur. Mais tu me sortiras encore que je suis un connard égoïste quoi que je te dise pas vrai ?
Tu la dévisages, tu plantes ton regard droit dans le sien. Tu veux qu’elle comprenne au moins ça, qu’elle cesse de t’ignorer, qu’elle arrête de zapper toutes tes phrases, chaque mot que tu prononces. Ecoute aux mois ceux-là par pitié Ana. Juste cette phrase, c’est tout ce que ton frère te demande. Juste une fois.
Mais bordel je te prend pas pour une conne Ana ! Tu veux qu’on dise ce qu’on a sur le cœur ? Visiblement oui, t’as pas calculé une seule de mes phrases depuis le début. Alors je vais te le redire une bonne fois pour toute. Je tiens à toi Anastassia Melnikov, mon idiote et bornée de sœur. C’est bon, t’arrives à l’entendre ça ? T’arrives à le rentrer dans ton crâne ?
Tu hausses à peine la voix, tu hurles pas, c’est pas ton genre. Mais le ton a légèrement monté. Tu veux qu’elle grave ces simples phrases dans sa tête, tant pis pour le reste.
Et tant qu’on y est à penser à toi. Tu veux quoi toi hein. Dis-moi, on parle plus de moi ni de personne. Juste de toi Ana. Dis-moi ce que tu veux, toi, toi, toi, TOI !
Assez. Assez. Assez. Qui raisonne dans sa tête, des hurlements incessants qui lui intiment de se taire. De toute évidence, Sacha n’était pas capable de la comprendre, mais comment pouvait-il ? Alors qu’il n’était pas capable de l’écouter. D’agir en sa faveur, de suivre ses propos même s’il avait promis de s’y plier. Mais après tout, à quoi bon paraître troublée ? Les chats ne font pas des chiens, Sacha simplement semblable à leurs géniteurs.
Qu’il se monte la tête, clame qu’il fait ça pour elle et non pas pour lui. Pourtant ? Pourtant ? Pourtant elle t’emmerde au plus profond de son être, son simple désir est simplement de te voir périr. Disparaître, que tu n’aies même jamais existé. Car si ce n’était pas elle, alors ça devait être lui. Tout simplement. Alors pourquoi, pourquoi, pourquoi.
POURQUOI.
N’était-il pas capable de fermer sa gueule, de taire ses propos hypocrites. Pourquoi s’était-il présenté ? Pour elle ? Ah, qu’elle en rigolerait Anastassia. Misérable. Merdique qu’il était. Une envie nauséeuse soudaine, car elle ne peut pas oublier qu’ils partagent le même sang et cela la dégoute au plus haut point.
« JE T’AI DIS DE FERMER TA GUEULE PUTAIN ! »
Qu’elle hurle à plein poumon tandis que son corps est entouré d’electricité.
« ET JE T’AI DIS D’ARRÊTER DE JOUER CE PETIT JEU AVEC MOI. »
Car ça la dégoute. Elle sait que c’est faux. Arrête de jouer l’être parfait car, Sacha ne l’est pas. Arrête de revenir sur tes paroles comme si de rien était. Ouvre tes oreilles simplement ? Si tu n’es pas capable de l’écouter, d’attenter à sa vie ou de fermer ta gueule, alors juste à quoi bon être là ? A quoi bon tenter de partager quelque chose, car ça n’arrivera ô grand jamais.
Putain. Putain. Putain.
Elle est hargneuse, violente. Explosive. Oh si tu savais Sacha. L’évidence que vos chemins se recroiseront encore et encore. Tu devrais en être désolée, car Ana ne le sera jamais. Au contraire, continue sur cette voie, et c’est ta vie qu’elle pourrira encore et encore. Jusqu’à ce que tu finisses par enfin l’écouter.
« ALORS ARRETE DE MENTIR A TOI. A MOI. PUTAIN PUTAIN PUTAIN. »
Une adrénaline certaine. Son cœur qui bat à toute vitesse. Crispée, énervée qu’elle vient s’abaisser. Ses mains qui s’agrippent à ses cheveux. Toute cette haine, toute cette électricité qui s’abat violemment sur la raison de sa souffrance.
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Ven 2 Juil - 10:24
Under the same sky, at the same time, at the same place we’re probably seeing other people We were too young and didn’t understand love. I wish you happiness, Now goodbye goodbye
Ta plus grande faute. Ton plus grand péché. L’impardonnable vérité. Tu écoutes. Simplement. Tu entends sa colère qui gronde, sa rage qui grésille. Elle craque. Elle s’emporte. Tu craques, elle t’emporte. Tu as cette horrible sensation. Cette sensation que quoi que tu fasses. Quoi que tu dises. Rien ne changera. Tu ne peux rien faire. Trop tard. Trop tard pour tout.
Pourquoi.
C’est si injuste à tes yeux. Si horrible. La personne que tu souhaites le plus sauver. Celle que tu veux à tout prix éviter de blesser. C’est justement avec celle-là que tout foire. Ton pire échec.
Tu baisses la tête. Ravagé par la honte et les regrets. Tu n’as même plus la force de soutenir son regard. Même plus la force de l’observer. De voir celle qui jadis, semblait si petite, si fragile. Quelle ironie que les rôles se soient inversés. Ou alors c’est justement là la punition qu’on t’inflige.
Tu te laisses emporter. Tu n’agis plus, tu ne réagis plus, tu ne parles plus. Tu existes simplement, tu existes pour expier tes fautes. Tu avais essayé de lui faire comprendre. D’en parler avec elle. De lui dire calmement ce que tu ressentais. Des excuses, des peines et des sentiments de culpabilités qui te hantaient à longueur de journée. Il n’y avait rien à faire. Tu avais beau être honnête pour une fois dans ta vie. Déballer ton sac et tes sentiments. Elle refusait d’y croire.
Alors tu avais perdu ce désir de lutter. Tu avais perdu en cet instant même la volonté de garder la tête haute et de te battre contre cette colère. Si c’était une façon pour toi d’expier et une façon pour elle de se libérer, de se sentir mieux. Alors pourquoi pas ? Après tout, du moment qu’elle décide de vivre sa vie sans regarder en arrière, tournée vers un bonheur incertain et un avenir plus ou moins radieux.
Elle t’avait attrapé, déchargeant toute sa frustration sur toi. Littéralement. Tu pouvais l’esquiver, t’échapper. Tu n’en as rien fait. Tu ne pouvais pas te résoudre à l’abandonner une dernière fois. Quitte à subir. Quitte à tout perdre. Quitte à tout donner. Tu soutiendrais tous ses ressentiments. Tout.
En silence, sans un bruit. Tu prenais sur toi. La douleur se déversant tel le flot de sa rage dans ton corps. Mais tu restais là. Aussi longtemps que possible. Aussi longtemps que tes jambes le pourront. Tu te moquais bien de ce qu’il pouvait t’arriver à toi, davantage inquiété par la personne qui se trouvait face à toi.
Advienne que pourra. Plus de mensonges, plus de fuites, plus de regrets, plus de peines, plus de rien. Juste cette simple vérité. C’était peut-être trop tard, futile ou insignifiant. C’était l’affection tardive d’un frère pour sa sœur. Sacrifier le peu qu’il lui reste. Pour lui offrir ce qu’elle avait toujours mérité. Un meilleur avenir.
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Jeu 3 Juin - 0:26
