Ses yeux se perdent dans ta contemplation et tu sais, tu sens, que tu tiens le bon bout. Peut-être que le moment serait plus jouissant si tu ne faisais pas tout ça pour lui éviter de rentrer en rampant à quatre pattes. Pourtant, et malgré tout l'urgence de la situation, tu ne peux pas t’empêcher de frissonner, d'apprécier, même qu'un peu, son visage plein de demande, ses lèvres qui t'appellent, sa peau qui rougit sous ta voix. Ezra était une catastrophe naturelle à grande échelle, un feu de forêt vorace. Il était dangereux, destructeur, acteur premier de ta chute si tu devais en venir à tomber. Avec tout ça, il n'aurait dû avoir que des défauts... Alors pourquoi était-il aussi beau ?
— C'est bien... Sois sage, mon ange, soit sage.
Caresse sur sa joue, murmure sur sa bouche. Poursuis l'improvisation entre dégoût de le manipuler mais l'envie (le besoin) de le voir fondre et docile pour qu'il cesse sa mascarade. Il sort quand même les griffes, parce qu'il ne sait faire que ça, que tu n'en attendais pas moins de lui, parce qu'il est aussi guerrier Ezra et que tu te comprends que tu aimes ça aussi. Alors quand il provoque, tu te contentes de sourire, appuie un peu sur son menton, comme pour lui dire que tu sais exactement de qu'il va suivre et que c'était ok, que t'attendais que ça aussi. Alors quand il presse sa bouche contre la tienne une partie de toi se sent soulagée. Quand il t'embrasse il ne boit pas, ne se cogne pas la tête contre les murs, ne hurle pas contre l'alarme de son téléphone. À la place il te consume mais tu acceptes le sacrifice. Tu aimes te faire du mal, tu aimes sentir l'envie et à la fois la voix coupable qui te murmure que t'es le pire, que Liam n'aurait pas pu être plus déçu de toi. Il y a une partie de toi qui te dit, que c'est parce que tu as encore la force de te punir que tu es encore vivant. Alors tu appuies aussi, caresse sa langue, ferme les yeux, souffle chaud.
Embrasse-moi. Embrasse-moi. Ne te détruis pas, Ezra mais détruit moi.
Mais il recule brutalement, tu le scrutes, hausse un sourcil quand il te demande de l'excuser pour aller aux toilettes. Et toi, tu te laisses t'enfoncer un peu plus dans le canapé, le cœur qui tambourine, la logique depuis longtemps abandonnée sur le bas-côté, t'as chier sur son cadavre sans la moindre pitié.
— Putain...
Passe une main fatiguée sur ton visage. C'est là que le patron arrive pour débarrasser les verres, te glisser un shot offert pas la maison.
— Spécial, ton copain.
Tu lui adresses un regard reconnaissant, t'enfile le shot dans un soupir. Soudain t'as l'air vieux. Soudain, t'as les allures du type fatigué. Ton regard dérive sur la salle, ça commence à se remplir, y a du monde, le brouhaha de la fête, le genre de brouhaha où personne ne se calcul parce que personne n'en a rien à foutre de son voisin. Ces gens-là sont juste ici pour oublier, pour s'amuser, rien d'autre ne compte que le besoin de rire et de lâcher prise. Bénis, sois ces anonymes, peut-être les seuls étrangers à ta vie pour lesquels tu as une réelle sympathie.
— Spécial, ouais... C'est le mot.
Il te demande si t'as besoin de quelque chose, tu lui réponds que ça ira, que tu vas gérer sans pour autant en être sûr. Quand il revient, t'as les yeux fermés, la tête renversée sur le dossier du canapé, le visage tourné vers le plafond. Est-ce qu'il est parti dégueulé ? T'es sûr qu'il a dégueulé.
— Hm, culpabilise pas, t'avais peut-être besoin de ça.
T'ouvres les yeux, sans bouger tu prends le temps de tourner légèrement la tête.
— Tu ne lâche pas souvent prise, je me trompe ?
Pas dit méchamment, juste un constat. Il a l'air d'un enfant honteux et prit en faute soudain. T'esquisses un sourire, te redresses, la voix un peu plus rauque.
Ça va quand même faire deux fois que tu fuis vers les chiottes pour cracher ta bille et ta déchéance. A terme il va finir par croire que tu es fou ou complètement ennuyeux. Même en te bousillant tu n'arrives pas à prétendre aussi fort être heureux. Revenu encore une fois la queue entre les jambes, t'as évacué ce qu'il te restait dans l'estomac - malheureusement le reste tourne encore en boucle dans le sang. Monte à la tête, descend jusqu'aux pieds hasardeux qui ne trouvent plus leur chemin, remonte au cerveau.
Quand tu reviens (encore) tu restes debout à le fixer, les bras étendus sur le dossier, la tête vers le plafond. Il est beau dans cette position - il te rappelle que c'est lui qui connait les lieux, lui qui parle au barman, lui que tout le monde regarde. Ce statut qu'il a t'avantage, car tu peux mieux disparaitre mais te propulse aussi sur le centre de la scène. Tu t'assois lentement sans vraiment lui imposer de se décaler.
Tu ne lâche pas souvent prise, je me trompe ? — « Non. » Réponds-tu honnêtement, sans réfléchir.
Tu te mords la lèvre.
— « Je ne peux plus, avant je le faisais. C'était une catastrophe. »
Elles te disent quoi tes idées, Ezra ? Beaucoup trop d'atrocités. D'avoir honte, d'exprimer des remords. Elles sont aussi noires que blanches (d'un vide qui se propage). Elles sont dévastatrices car elles grouillent aussi de désir - pour lui. C'est intense.
— « Que je te veux. Que ça m'emmerde. Que je ferais mieux de... »
C r e v e r.
***
La suite elle est plus méliodieuse ; mais tu ne te souviens pas de grand chose. De la musique, ça c'est certain. De ses bras, de tes râles de protestation quand il veut t'emmener danser, quand il te fait du chantage, quand il arrive à te trainer, quand tu agites tes bras ballants comme un pingouin (flashback du bal) ; t'es toujours pas à l'aise de bouger ton corps de cette manière. Mais tu sais pas si c'est l'effet de l'alcool qui revient mais tu l'as surement surpris à en rire un peu. Les nouveaux cocktails étaient vraiment très bon. Et en retrospective ces histoires croustillantes sur ces connards de populaires l'étaient aussi. Une soirée moins catastrophique que tu ne pensais jusqu'au moment où c'est trop et que...
— « Noah. »
Tu tombes dans ses bras, la tête s'échoue sur l'épaule et une main hystérique s'accroche fermement aux pans de sa chemise.
C'était une catastrophe. Un mince sourire sur tes lèvres tu contemples du regard le bar, ton antre, le genre de petit royaume sur lesquels règnent les gens comme vu, les populaires, les glorieux éphémères, des fois tu dis que vos éclats ne sont que des subterfuges pour masquer votre misère. Ouais, c'était sûrement ça, en fait.
— C'est toujours catastrophique le lâcher prise.
Pourtant, on en a toujours l'envie et quand on ne l'a pas on finit quand même pas sauter à pieds joints dans la folie. C'était toujours comme ça, à croire que c'était dans vos gènes de vous saboter en beauté. Peut-être une autre preuve de sabotage quand tu lui demandes quelles sont ses idées. Tu t'attends aux insultes, au déni, à la fuite, a la place tu as l'honnêteté, la vérité, la confrontation. Vous avez l'air de deux prisonniers pas bien loin de l’échafaud. Pas encore condamné, mais trop près de la chaise électrique pour avoir la force de nier. D'un coup ça manque de verre, d'un coup ça manque de danse. Pas encore d’échappatoire, dans le fond t'es peut-être heureux qu'il n'y en ai pas. C'est plus un soulagement qu'une honte d'enfin avouer ça tout bas.
— Hm. Comme je te comprends.
Après ça, il y a eu la fête, peut-être un besoin de ne pas rester sur ça, de ne pas laisser le sérieux prendre ses aises. Alors t'as commandé des cocktails, t'as bombardé sa bouche de saveur, autant bien pour l'éduquer que pour voir naître sur son visage des expressions adorables, séduisantes, rares. Tu l'as entraîné sur la piste, à coup de cajolerie et de chantage, t'as bousculer son ego, jouer de son affection pour toi en le tirant par le bras. Comme il l'avait dit, c'était une catastrophe, mais t'en avais ri et tu t'étais dit que t'avais tout gagné. À force de bruit et d'alcool, t'avais réussi à occulter les pensées qui bombardent ta tête, à cesser de te demander pourquoi tu veux que ce soit violent entre vous, puis doux la seconde d'après. T'aurais voulu que ça continue toute la nuit, mais toutes les bonnes choses ont une fin et Ezra avait atteint ses propres limites.
Il s'échoue sur ton épaule, l'impression de le voir ressortir d'un parcours du combattant. Pour lui, ça avait été peut-être ça. Tu ne lui en veux pas, la fête finie toujours par s’éteindre après tout. Tu l'assois contre le siège, tapotes sa main, ça te rappelle avant, la première fête de Liam, trop épuisé pour continuer mais trop coupable pour partir.
— Je vais régler l'addition et je te ramène, bouge pas.
T'es transpirant, le lieu est monté en température au fil des heures. Un coup d’œil à ton téléphone, 23h, oui, il est temps de le ramener. Tu payes au comptoir, le patron semble être plutôt satisfait de sa soirée. Tu lui promets de repasser bientôt, lui souhaite bon courage et revient vers Ezra. Passe une main contre sa joue.
— On rentre, Ezra, ça ira mieux dehors, là il faut chaud.
Tu l'aides à se relever, garde une main sur son dos pour prévenir toute chute. Les vieux réflexes, encore, pas ceux du good guy en puissance, ceux du solitaire soucieux, de l'ombre, qui vieille toujours, que ce soit dans la chaleur des bars ou le froid du soir. Tu lui ouvres la porte, malgré l'été, la différence de température est flagrante. Tu prends quelques secondes pour apprécier la claque fraîche contre ta peau, à tes côtés, Ezra semble vidé. Tu vas peut-être t'en prendre une, mais la faiblesse dans ses yeux est trop tentante. Après tout, tu l'avais prévenu, le lâcher prise est toujours catastrophique.
— T'as l'air au bout de ta vie, attend.
Tu passes une dans le creux de ses jambes, l'autre dans son dos, fléchis les genoux, pousse dans un grognement. Il pèse son poids et t'as pas les avant-bras d'Icare mais ça va le faire. Tu te doutes que ce doit être humiliant d'être porté à bout de bras comme une princesse. Mais t'aime l'idée de le torturer encore un peu, t'aime l'idée de graver encore un peu de lui contre ta peau. Tu commences à avancer, vous avez l'air de deux cons mais c'est bien dans le ton de ton personnage de faire des trucs cons mais adorables.
— Alors, cette soirée ?
Souffles-tu. Qu'il pense pas à dormir, une partie de toi n'a pas envie de la voir se finir.
Il va régler l'addition qu'il dit et t'es trop mort (et lâche) pour protester avec véhémence contre le fait d'être invité. Quitte à être un parasite hypocrite dans sa vie autant agir comme tel jusqu'au bout. Tu attends accoudé à la table, refuses de prendre sa main quand il te la tend cinq minutes après. Il fait si chaud et le bruit des personnes environnantes t'étouffe très clairement. Tu as besoin de sortir maintenant pour ne pas réduire cet endroit en cendres.
— « J'ai la tête qui tourne. »
Il te rassure, te dit que ça ira mieux dehors. Tu fais l'effort de le croire et soupires d'aise lorsque le vent frais de la nuit d'été s'échoue contre tes joues transpirantes. Tu vas pour te mettre en marche, prêt à supporter le silence gênant de l'après soirée lorsque tes jambes se décollent du sol. Tu cries faiblement Ezra, outré face à une humiliation pareille.
— « POSE MOI PUTAIN T'ES MALADE ?! »
Mais t'as pas la force de te débattre et de te dégager de son étreinte. Tu déglutis et sous le regards de certains de vos camarades tu baisses les yeux, te caches le visage de honte.
— « Merde mais tu fous quoi là... ça t'amuse en fait... »
Ce sale petit sadique. Il fait genre devant tous le monde qu'il est l'ami serviable, le chevalier en armure, le prince bienheureux. En réalité ce mec est un tortionnaire. Tu te laisses porter et de ce fait bercer par ses pas - ça t'endort malgré toi. Tes paupières lourdes se ferment au rythme de ses grandes enjambées quand sa voix mieilleuse vient te cueillir d'une question fatigante à digérer.
— « Hm... »
Tu ouvres un oeil.
— « Pas désagréable. Si on oublie que j'ai gerbé pour évacuer. »
Lorsque vous arrivez au dortoir, tu le vois prendre la direction de ta chambre. Tu te demandes comment il la connait et que dira Nath s'il vous voit ensemble. Tu te rappelles aussi que Nath ne sera surement pas là car on est samedi soir. Qui respecte le couvre feu ? Avant d'arriver dans le couloir tu forces pour descendre, remues et glisses au sol puis te relèves en remettant tes cheveux un peu trop long derrière ton oreille.
— « C'est bon... Je vais pas tomber dans les vapes. »
Tu sors la clé de ta chambre et l'ouvres, allumes la lumière. Le lit de Nath est autant en bordel que le tien, mais vide. Merde, t'aurais presque voulu qu'il soit là. Avoir une excuse pour intimer à Noah de repartir vers sa chambre sans faire de vague. Tu fixes tes pieds là sans savoir quoi ajouter hormis... bonne soirée.
Il hurle et toi, grand con, tu rigoles. Un rire clair et sonore dans la nuit, tu reconnais certaines têtes dans les passants et ça t'amuse d'autant plus. Le sourire bien trop grand, tu n'as pas du tout l'air gêné, tu traverses les rues comme si c'était tout à fait commun de te voir porter quelqu'un comme une princesse de conte. Quand tu surprends des regards interloqués, parfois gênés, tu souris davantage et en regardant les gens droits dans les yeux tu te marres.
— Bonsoir ! Douce soirée, hein ?
Un vrai gosse, salue comme ça les quelques passants que tu croises, tu peux sentir toute la gêne d'Ezra et, quelque part, sa honte est d'une douceur pareille au miel. Tu confesses, juste pour lui, t'as même plus la force de lui mentir.
— Oui, je confesse, je trouve ça hilarant.
Tu jubiles trop pour avoir la décence de l'épargner en lui cachant tes fossettes. T'es bien trop joyeux en voyant ses rougeurs, bien trop de le sentir mourir de honte sans pour autant avoir la force (la volonté) de s'extirper de tes bras.
— Je savais que t'avais gerbé.
Sale gosse, tu resserres un peu ta prise, promis, quand vous franchirez les portes tu dortoir t'arrêtera de siffler comme une tubé.
T'as presque le cœur qui se serre quand vous arrivez dans le bâtiment. Tu ne prends conscience que maintenant que tu n'as pas fait le deuil de la fête. T'as un goût d'inachevé sur les lèvres. Pourtant, il y avait eu la danse, les cocktails, les baisers. Mais comme un monument qu'on découvre pour la première fois, y a cette frustration à partir. On a vu des belles choses, mais reste le sentiment qu'on aurait pu en voir plus, qu'il y a encore des secrets, des détails, qu'on n'a pas encore vu. Alors malgré toi, tu ralentis le pas. Tu te diriges vers sa chambre à reculons, prétexte une pause près d'une porte, t'arrête devant une fenêtre parce que t'as vu un truc volé, redescend l'escalier une fois parce que t'as perdu le compte des marches. Mais malgré tous tes subterfuges vous voilà devant sa porte. Tu pris pour que Nathanaël soit parti cogner contre un sac de frappe, quand Ezra ouvre la porte et que tu trouves la chambre vide tu remercies intérieurement, devenu sans le vouloir un frère, un vrai. Ça t'amuse de voir l'état de sa piaule, comparée à la tienne, c'est d'un bordel monstre.
— C'est marrant, j'ai toujours pensé que t'étais du genre à tout bien ranger.
Tu le vois fixer ses pieds. T'imagines que c'est le moment de tourner des talons, de partir te coucher. Seulement tu te refuses à bouger. Il souhaiterait très certainement que tu partes, mais toi, t'en a aucune envie. Dans l'encadrement de la porte, tu poses ton épaule. Tu devrais vraiment t'en aller, Noah. Mais t'es trop égoïste pour, Noah.
— Je vais être franc, j'ai pas envie de partir.
Tu balances ça, le sourire à déserter tes traits, ton regard s'est fait intense. T'es conscient que tu le pousses un peu à bout. Comme si la soirée, les confessions, les éclats de joie et de rire n'avaient pas été suffisant. Mais faut te rendre à l'évidence, tu n'as aucune envie de revenir à ta chambre, à te coucher dans ton lit et à fixer le plafond comme un con, parce que tu n'as pas sommeil, Noah, pas sommeil du tout. Alors tu tends la main, tu ne veux pas t'imposer, non, tu veux qu'il t'invite à rester. La blague a assez duré. Toi, t'as pas oublié qu'il a dit qu'il te voulait.
Du genre à bien ranger ? Toi ? C'est pas parce que t'es rigide que tu l'es sur absolument tous ls points. Ezra se permet de faire des commentaires alors qu'il est même pas invité à rentrer. Pour être honnête il n'était même pas censé venir jusqu'ici. Nathanael aurait du être là pour t'assurer une excuse valable. Tu fronces les sourcils et ne peut t'empêcher de rétorquer, le ton piquant.
— « C'est pas parce que j'ai pas envie de voir ta tronche au quotidien et que de ce fait je tire la gueule, que je suis accroc au rangement ou maniaque. »
Le problème se dessine lentement et tu le vois très bien dans le fond de ses yeux. Noah ne veut pas partir, Noah veut rester. Si tu l'autorises à rentrer ça va déraper, et le cauchemar que tu vis déjà prendra une tournure encore plus glauque. Réfréner tes sentiments deviendra encore plus compliqué et culpabilisé à ce sujet encore plus hypocrite. Tu te mords la lèvre inférieure et lui tournes le dos, avances vers ton lit.
— « Tu te fiches de moi ? Y'a le couvre-feu et.. et Nath peut rentrer d'une minute à l'autre. »
T'y crois pas du tout à ce que tu lui racontes. Tu n'y mets aucune conviction. Tu te laisses tomber penaud sur les draps et portes tes mains à ton visage pour te cacher derrière elles. Tu l'écoutes et ton coeur se serre. Il te veut. Toi et pas un autre. Lui et pas un autre. Putain c'est vraiment en train d'arriver ?
— « Ferme la porte derrière toi alors. Laisse la clé dans la serrure pour que personne ne puisse rentrer. »
Des excuses, rien que des excuses que tu balayes négligemment de la main. Tu pourrais dire que t'en a rien à foutre que ça reviendrait au même, mais le silence te sembles encore plus parlant. Parce qu'il ne dit pas non. Il invoque le règlement, risible pour un rebelle. Il invoque Nathanaël. Mais jamais, jamais il ne te dit que c'est non, que c'est hors de question. Il invoque des circonstances complexes, pas un refus. Pour ça que tu restes dans l'encadrement de la porte, attends, ton regard qui ne le quitte pas. Il semble être en pleine guerre contre lui-même quand il se laisse tomber dans ses draps. Ah, t'es vraiment le pire, Noah. T'as pris conscience de son affection pour toi. Tu pourrais la protéger, tu pourrais en prendre soin. Mais quand tu le vois c'est ta gorge qui se serre, ton cœur qui brûle. Quand tu vois c'est beau et destructeur à la fois. Tu lui en veux d'être capable d'autant de dégât avec si peu de moyen. Tu t'en veux d'être si faible, d'avoir autant le besoin de le marquer, qu'il te marque. Il t'obsède, tu veux le sortir de ta tête, tu veux qu'il se grave dans ton crâne.
En silence, tu obéis. Tu n'as pas dit un mot, pas esquisser le moindre sourire. Tu fermes la porte derrière toi, coinces la clé dans la serrure. Doucement tu t'approches, t’accroupis en face de lui. Il se cache, se dérobe à ton regard. Tu ne laisseras pas fuir cette fois.
— Regarde-moi.
Tu ordonnes doucement, prends ses mains les écartes de son visage. Si proche de lui, tu observes ses traits. Il a ravagé, mais doux dans son ravage. Il y a de la finesse et de la rudesse dans ses courbes. C'est un paradoxe, une putain d'équation sans sens. Dans ses yeux s'affrontent tous les contraires et tu brûles pour ces contradictions. T'en a presque fait une religion. Tu veux le frapper et tu veux le caresser. Tu veux le haïr et tu veux l'aimer. Tu veux le détruire et le chérir. Tu veux l'humilier et lui donner de la fierté. Tu veux le pousser et le retenir. En définitive...
— Tu m'emmerdes, Ezra Strauss.
Quand tu presses tes lèvres contre les siennes, tu serres ses mains. C'est peut-être le baiser le plus doux que vous aillez échangé. Pas ravager comme celui salé de la plage, pas brûlant comme ceux du placard, pas désinhiber comme ceux du bar. C'est peut-être le plus lucide, aussi. Il t'a dit qu'il te voulait, mais ça ne te suffit pas. Gourmand Noah, quand tu détaches tes lèvres des siennes pour souffler contre sa bouche.
— Dis-moi que tu veux que je reste.
Tu l'embrasses encore, quittes la chaleur de ses mains pour pousser ses épaules, le faire basculer contre le matelas, pour te tenir au-dessus de lui, lui arracher ce dont il a vraiment envie.
— Dis que tu veux que je reste et tu m'auras.
Alors on signera le contrat par lequel on dira que le roi se met au service de son peuple et que son peuple lui appartient.
Regarde-moi. Tu t'y refuses, t'y dérobes. Sauf quand il vient lentement écarter tes mains en tenant tes poignets. Il s'immisce avec douceur sur tes lèvres pour voler le baiser le plus doux auquel tu as eu le droit. Tu n'as jamais été danseur avec l'amour Ezra, tu n'as connu que frustrations et colères. Ça avait fini par te convaincre d'aimer à sens unique : Liam, Sylvestre. Noah te témoigne de l'intérêt et tu flanches direct - à croire que ça ne te convenait pas tant que ça, d'être dans le paysage. Incapable de s'y fondre complètement tu fais des ravages.
— « Tu m'emmerdes encore plus. » Souffles-tu avec une arrogance triste.
Noah cherche à te pousser, il est gourmand, trop exigeant. Ce n'est jamais assez et tu sens ton coeur fondre et se fissurer. Il se contracte sous les pulsations irrégulières. Tu déglutis quand il t'allonge, grimpe sur toi. Tu ne vois aucune issue heureuse à ce que vous vous apprêtez à faire. Tu te sens sale de lui voler ça après ce que tu lui as déjà arraché. Mais tes sentiments sont forts et égoïstes, ils taisent les remords dans un coin de ta tête et t'encouragent à te lâcher. Une larme d'excès coule lentement de l'oeil et vient tacher le drap.
— « Je veux... que tu restes. »
Tu l'entoures de tes bras pour le coller contre toi, et répètes encore.
Rapace, salaud, très honnêtement y a des centaines de qualificatifs pour les gens comme toi, Noah. Insatiable, insatisfait, il t'a pourtant dit qu'il te voulait, il t'a pourtant invité à fermer la porte et pourtant ce n'est pas suffisant. Tu veux l'entendre, une torture pour lui, une jouissance pour toi mais surtout, surtout Noah, une délivrance. Tu le domines sur ce lit, pourtant une partie de toi attend qu'il te libère des chaînes dans lesquelles tu t’entraves. Qu'il dise qu'il en a envie aussi, pour que tu puisses te sentir légitime à rester. Qu'il te serre, pour que tu n'aies plus rien à regretter. Alors tu le regardes, fauve, suspendu à ses lèvres, alors qu'il semble se perdre et que l'excitation (sous toutes ses formes) monte à mesure que les secondes passent.
Dis-le. Dis-le. Dis-le.
Besoin égoïste d'entendre qu'il veut. Que c'est nous qu'il veut. Pas Sylvestre, pas Liam, pas son colocataire, personne, nous. Juste nous. Et quand son souffle fébrile vient s'échouer dans le silence, qu'il le dit, qu'il veut que tu restes, qu'il te serre contre lui et le redit encore tu sens naître un sourire dont tu ne sais pas s'il est carnassier ou soulagé. Son corps contre le tien, tu sens poindre en toi la jubilation.
Il veut. Il veut. Il veut.
Alors tu souffles à ton tour.
— Bien... Alors je resterai
Tes lèvres qui s'échouent contre son cou, tes mains qui s’affairent, parcours son corps avec enthousiasme, caresse le tissu de son polo, passe une main avide en dessous, alors que tu ravages sa gorge de baisers, que ton autre main vient s'échouer sur l'antre secret défense, rire rauque contre sa peau.
— Je resterai autant que tu le voudras. J'ai promis, tu vas m'avoir.
Si tu te sens gonflé de fierté à l'idée de voir son cœur s'affoler sous tes mots, c'est pour ne pas voir que le tien défaille. Ce n'est pas que physique, ça aurait été si simple que tout ça ne soit qu'une question de physique. Capture sa bouche, torture, quand ta main déboutonne et passe dans son pantalon.
— Tu m'as.
Souffle ça, comme-ci c'était sa plus grande victoire, la chose la plus merveilleuse qu'il pouvait espérer posséder. Te présente comme un trophée, pour l'excité, pour mieux le rendre fou, pour te graver en lui tout entier, pour qu'il se grave en toi entièrement, pour le dresser d'un simple mouvement de lèvres, pour le récompenser lui qui a été si obéissant malgré tout, pour te faire plaisir à toi, sale chien qui se présente comme un roi mais qui dans le fond n'attend que ça. Descends ta bouche bas, toujours plus bas, parce que dans ce combat qui est le vôtre, tu refuses qu'il ait le moindre monopole. Et tu te dis, Noah, que depuis ce jour dans le placard, t'attendais que ça.
Merde. C'est toi aussi... tu l'invites dans ta chambre. Lui offres la soumission totale de ton corps et de ton égo. Quand il fait fondre ses lèvres à ta gorge, tu bascules la tête totalement en arrière. Ton souffle saccadé se bloque quand tu retiens ta respiration. Tu lui offriras pas ce plaisir - il t'entendra pas gémir. C'est ta première fois Ezra, et si t'as une idée de ce qu'il va se passer, tu sais pas du tout comment le gérer. Tu te mords la lèvre pour éteindre tout geignement lubrique, serres les draps de tes doigts moites. Il n'a encore rien fait putain. Ses doigts chauds pianotent ton torse et sa bouche descends. La boucle de ton pantalon saute et tu comprends qu'il veut te rendre la pareille.
Tu sens la chaleur te monter à la tête, alors que tu t'enfonces un peu plus dans le matelas. L'esprit autant en otage que le reste du derme qui se tend et se détend, rougis et s'humidifie. Sous l'émotion il te vient en tête un flux d'insultes mais tu ne dis rien, siffles simplement pour trahir une respiration irrégulière.
— « Noah... »
Tu déglutis, et tes yeux s'écarquillent quand tu tousses et que le plaisir s'échappe un peu trop vite. Souffles par le nez et te redresses pour le regarder.
— « Hm. »
Tu te penches pour lui prendre le poignet, le ramener vers toi pour l'embrasser. C'est un baiser timide mais qui a le gout de l'action.
T'aimes ça. Le voir lutter au pied du mur, le voir se trahir sous l'envie. Il est parfait tout simplement parfait. Et tu mets plus de cœur à l'ouvrage, passe ta propre main dans ton pantalon. C'est si bon. Il est parfait, tout simplement parfait. Il est jeu et challenge, lutte et abandon. Et Dieu que tu aimes ça, l'ambivalence de vos combats.
Il cède enfin et tu frissonnes. Ta soif loin d'être étanchée, le cœur palpitant sous l'envie. Dans les ombres tu refrènes ton sourire, tu le sens se redresser, lèves la tête, il t'appelle. Tu te laisses attirer, aimes ses lèvres contre ta bouche et son goût de sel. C'est ça. C'est ça. Tu détailles son visage, caresse les courbes de son menton.
— Tu es beau.
Le regard brûlant et tes doigts qui dérivent contre sa nuque. Tu appuies, marque, gourmand et sadique, Noah. Comme un reproche lorsque tu demandes d'une voix sourde, mais tes yeux eux, toujours fous de lui.
— Pourquoi faut-il que tu sois aussi beau ?
Tes ongles qui se figent contre sa peau, de la naissance de ses cheveux au reste de son cou. Peut-être que cela fait mal, mais au bord de ses lèvres tu avoues n'en avoir pas grand chose à foutre. Alors tu captures sa bouche de nouveau, baiser chaud, gourmand, joue avec sa lèvre inférieur, l'aspire, la mord alors que tes griffes quittent sa nuque pour passer contre ses côtes, soulever, maladroit et presser son polo. Tu viens bénir sa peau de ta marque, suçon violacé en dessous de son pectoral. Ton poignée toujours emprisonné, tu bascules ton poids contre lui pour le faire chuter de nouveau sur le lit.
— Déshabille-moi. Ordonnes-tu , impérieux, alors que tu guides ses mains contre ton torse, attends, impatient, à califourchon sur lui. Déshabille-moi. Je veux te sentir contre moi.
Tu viens faire descendre tes doigts pianotes sur ses hanches, le fait glisser tentateurs, impertinent, jusqu'à l'endroit encore humide de ta bouche. La voix soudain plus douce.
— Dépêche-toi, ne me fais pas attendre mon ange...
Merde... en plus d'être beau il est bon. Doué avec ses mots, avec ses doigts, avec sa bouche. Un supplice d'adolescent en plein éveil. Tu veux te laisser mourir entre ses bras et que cela ne s'arrête jamais. Cependant à mesure qu'il te chauffe grandit en toi un malaise pesant. La honte s'ajoute au désir et fait grouiller tes tripes - tu penses à Liam (oui, encore lui toujours lui) et à l'image déplacée et malhonnête de son visage si particulier. Tu t'imagines un instant que c'est lui que tu as conquis et pas son fantôme qui vient t'humilier aux portes de ton lit.
Quand il te complimente, entre deux baisers humides et lubriques, tu fermes un œil en grimaçant et t'empourpres. Ce connard sait y faire. Tu n'aurais jamais parié sur ton physique et encore moins sur sa soit disant beauté. Tu ne sais pas quoi répondre et bredouilles sous le coup de l'excitation :
— « Aah-ah... merci. »
Lui aussi il est beau.
— « Toi aussi tu es beau. »
Déglutis quand il te griffe l'arrière de la la nuque, tire sur les racines de tes cheveux. Tu ne protestes pas, trop nauséeux pour articuler. Il 'entraîne vers sur le matelas pour t'y allonger et tu savoures enfin la vue qu'il t'offre. A peine le temps qu'il retourne assaillir ta peau pour la marquer. Cette fois tu grognes.
— « Eh ! Je vais avoir des traces ! »
C'est ce qui te gêne et te fais peur : les preuves de votre méfait, de ta perversité dégueulasse. Tu as du mal à te sentir bien dans tes baskets - qu'il t'ordonne presque (sur un ton qui t'irrite et t'excite) de le déshabiller.
— « Ah. Euh. Quoi ? »
Oh mais putain. Tu vas défaillir là, Ezra. Tu retires d'abord ton polo timidement puis le souffle court tu t'agrippes au tissu de son haut pour lui ôter. Torse contre torse tu cherches le contact - frottes tes joues à ses lèvres comme un petit chien. Fermes les yeux en serrant la mâchoire au petit surnom qu'il te donne. Ce n'est pas les anges qui jouent avec le feu ; qui volent et tuent. Tu passes ta langue conquérante sur le haut de son poitrail. Puis termines ton chemin sur son derme à coup de baisers, suivant la ligne naturelle de ses poils. Remontes seulement les yeux, toujours abaissé.
— « Tu vas me baiser ? »
C'est demandé d'une voix calme.
— « Et après tu vas retourner avec les autres ? Avec cette conne de Flores ? »
Tu te fais impérial, exigeant, gourmand. Tu t'es connu doux et brutal dans ce genre de moment mais jamais aussi ambivalent, tu t'es connu enthousiaste mais jamais en transe. Mais lui, lui... Depuis combien de temps, l'idée de te lier avec quelqu'un ne t'avais pas obsédée à ce point ? Depuis combien de temps, ton cœur n'avait pas battu d'une telle rage ? Pas la rage de l'homme qui agonise, mais la rage de l'homme qui vit, veut vivre, veut exister, à tout prix, qu'importe le moyen. Peut-être est-ce la première fois. Tu ignores comment nommer ce qui grouille en toi. Obsession est ce qui résonne le plus dans ton esprit, mais peut-être qu'Obsession est le pseudonyme d'une autre émotion. Mais le fait est, Noah, que toutes les marques sur sa peau ne te suffisent pas. Chaque baiser que tu graves avec intensité sur son corps, chaque caresse que tes mains lui offre, chaque sursaut que tu lui arraches, tout ça, tout ça c'est loin d'être assez. Jamais rassasié de lui, plus tu étanches ta soif et plus tu te déshydrates. Alors tu viens apprécier chaque seconde de sa bouche contre ta peau, grave la sensation de ses cheveux entre tes doigts. Encore, encore. Ça hurle dans ton crâne. Le serrer contre toi, le dévorer pour entier, encore, encore, et pourvu que le jour ne se lève jamais.
Tu vas me baiser ?
Tu ouvres les yeux, fiévreux. Tu pourrais répondre oui, mais le terme qu'il emploie pour définir ton envie t’écœure. Baiser, c'est si laid, si commun, si éphémère. Non. Non. Ça c'est bon pour les autres, ce que tu veux, c'est autre chose. Et tu peines à refréner ton envie, les mots d'Ezra sonnent comme une provocation, pourtant tu ne peux t'empêcher de les prendre pour un témoignage de ses angoisses. Tu soupires, fermes les yeux, le repousses un peu. T'as qu'une envie, te jeter sur lui, l'embrasser jusqu'à l’étouffer, le toucher, vous brûler tous les deux sans jamais regarder plus loin que cet instant où tu plaqueras ultimement tes hanches contre lui. Mais tu ne peux pas. Pas tout de suite. Tu passes une main fébrile dans tes cheveux, attrapes son menton, pour avoir son visage bien en face du tien (pour qu'il ne puisse pas fuir en détournant le regard).
— C'est ça qui t'inquiète ? T'as peur que je t'abandonne ?
Une partie de toi à envie de rire face à des peurs aussi futiles, mais une autre trouve tout ça adorable. Il est attaché. Chez n'importe qui d'autre ça t'aurait lassé, peut-être effrayé. Tu ne supportes ce genre de rapprochement qu'avec peu de personnes, car ils sont peu à ne pas aimer une illusion. Mais Ezra... Ezra, ça t'amuse (te rassure), ça te plaît. Tu peines à refréner le sourire jubilatoire qui menace de pendre à tes lèvres.
— Ezra, Ezra... Il n'y a pas d'autres. Mais tu resserres soudain un peu ta prise, lui impose de te regarder bien en face. Tu me plais. Tu me plais comme rarement des gens m'ont plus. J'ai même envie de dire que tu es bien le premier à réussir à autant m’obséder. Tu es... Comme qui dirait unique. Ceci étant dit... Aussi beau et plaisant sois-tu, tu ferais mieux de réfléchir à deux fois à comment tu parles de Lucrecia. C'est ma meilleure amie, ne gâche pas tout, veux-tu ?
Tu lui offres un sourire, tournes son visage de côté pour lécher sa nuque.
— C'est que, je n'avais pas dans l'idée de te baiser, non. J'avais dans l'idée de te faire l'amour, c'est quelque peu différent. Tu souffles, libères son menton, c'est tellement plus simple de faire ce genre de confession à l'ombre de son cou. Je ne compte pas tirer mon coup et faire comme-ci tu n'existais pas. Dans l'idéal, j'aurais aimé pouvoir te revoir, passer du temps avec toi... Mais si toi tu ne veux pas...
Profite d'être caché pour embrasser sa nuque, remonter, avide, jusqu'à la commissure de ses lèvres. Tu n'uses pas de ton pouvoir mais c'est tout comme. Une partie de toi est terrifiée de le voir prendre la fuite. Tu fais tout pour le retenir.
— Tu devrais apprendre à écouter, j'ai dit que je resterai autant que tu le voudrais.
Il ne s'arrête pas tout de suite, continue de te caresser du bout des doigts alors que ta bouche est encore aux aboies de sa peau. Tu l'avais défié du regard par jalousie et arrogance, l'esprit vidé de ces ressentiments maladifs que tu éprouves envers ceux qui s'approchent un peu trop près de lui (et c'est pareil avec Sylvestre).
Il chope ton visage, le garde en otage - on dirait un père presque qui te gronde et te rappelle à l'ordre. Encore une fois ce rapport d'autorité qu'il a sur toi te met mal et en même temps te rassure. C'est délicat et dérangeant - comme tout ce qui a un rapport avec lui.
— « Ta meilleure amie ? Ça ne t'empêche pas de lui sauter dessus à la moindre occasion. »
Le plus drôle dans cette histoire c'est que tu touches juste sans en être réellement certain. Mais soit, il te remet à ta place. Te rappelles qu'il n'a jamais été aussi obsédé par quelqu'un que toi. Tu trépignes Ezra, dans l'attente désespéré de ce qu'il peut te donner, de ce que tu peux prendre.
Il te corrige ensuite. Tu as l'impression d'être un enfant qu'on réprimande - comme si ta manière de t'exprimer était un problème ?
— « Je... Si tu le dis. »
Vexé mais pas moins excité alors qu'il continue de t'embrasser. Tu essaies de te remettre dedans, la respiration haletante à chacun de vos contacts brûlants. Tu réfléchis en même temps que tu défais la boucle de sa ceinture et engouffres ta main dans son pantalon.
Le coup est porté, ça te fait esquisser un rictus amer. Évidemment, Lucrecia la cible facile. Ta relation avec elle, une évidence. Sa jalousie un poison délicieux et tu te demandes ce qu'il dirait s'il savait que sa petite personne était le centre de vos discordes ces derniers temps. Est-ce qu'il culpabiliserait ? Est-ce qu'il en serait, dans le fond, fier ? Oh, oui, tu penses qu'il serait fier, peut-être pas lui, l'humain, mais l'égo c'est certain. Il se dispute avec elle à cause de moi. Penserait-il, honteux de ne pas savoir refréner son sourire. Tu l'imagines bien. Mais tu gardes cette carte dans ton jeu pour le moment. Il te fait abattre des montagnes sans en avoir pleinement conscience. Il te fait marcher sur des fils si fragiles et il se permet d'avoir la jalousie injuste d'un enfant... Putain, tu tombes.
— Jamais content... Grognes-tu contre sa peau. Ah, tu me rends fou.
Dévore de plus belle. C'est trop. T'en peux plus. Lui et sa colère, lui et sa maladresse, lui qui frappe, lui qui quémande, lui qui fuit, lui qui donne. Putain. Putain. Putain. Putain.
Alors quand tu le sens s'attaquer à ton pantalon, tu te colles à lui, souffle brûlant. Il t'emmerde. Il te rend ambivalent. Il relève tout le bancal de ton personnage, toute la laideur sous le masque et pourtant, pourtant, tu crèves d'envie qu'il te voit, que lui qui t'as détesté au premier regard, se fasse jaloux, possessif... Amoureux.
Sa main qui prend possession de ton territoire, tes lèvres qui descendent contre son torse, remontent jusqu'à sa bouche. Tu ignores si c'est pour se donner du courage ou si c'est parce qu'il se met à raisonner en bon stratège qu'il te demande de sortir avec lui, ton désir en otage.
— T'aimerais... ?
Rire contre sa bouche, t'attelle à conquérir le bas de son corps de tes mains. Embrasse encore, t'as envie de le torturer un peu.
— Hmm... Je connais déjà ma réponse à cette question... Tu veux l'entendre ?
Lentement, tu baisses son pantalon, tu veux le découvrir, admirer ses courbes de la pointe de ses cheveux aux bouts de ses ongles. Tu veux le découvrir, intime, comme, tu le penses, peu de personne l'ont vu. Alors tu souris, Noah, taquin contre ses lèvres quand tu murmures.
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Dim 15 Aoû - 13:44
Ses yeux se perdent dans ta contemplation et tu sais, tu sens, que tu tiens le bon bout. Peut-être que le moment serait plus jouissant si tu ne faisais pas tout ça pour lui éviter de rentrer en rampant à quatre pattes. Pourtant, et malgré tout l'urgence de la situation, tu ne peux pas t’empêcher de frissonner, d'apprécier, même qu'un peu, son visage plein de demande, ses lèvres qui t'appellent, sa peau qui rougit sous ta voix. Ezra était une catastrophe naturelle à grande échelle, un feu de forêt vorace. Il était dangereux, destructeur, acteur premier de ta chute si tu devais en venir à tomber. Avec tout ça, il n'aurait dû avoir que des défauts... Alors pourquoi était-il aussi beau ?
Ça va quand même faire deux fois que tu fuis vers les chiottes pour cracher ta bille et ta déchéance. A terme il va finir par croire que tu es fou ou complètement ennuyeux. Même en te bousillant tu n'arrives pas à prétendre aussi fort être heureux. Revenu encore une fois la queue entre les jambes, t'as évacué ce qu'il te restait dans l'estomac - malheureusement le reste tourne encore en boucle dans le sang. Monte à la tête, descend jusqu'aux pieds hasardeux qui ne trouvent plus leur chemin, remonte au cerveau. 