Il sent le tabac froid et la beuh jusqu'à son col, d'un tabac dégueulasse et premier prix troqué contre trop de bons services car il n'a pas encore dix-huit ans. Il sent le tabac jusqu'à ses cheveux et sa nuque rasée à blanc dans un trait irrégulier. A cela se mêle une eau de Cologne diluée dont le flacon est ouvert depuis trop longtemps. Il en a mis hier et porte la même chemise que la veille. En passant les boutons un à un, il a senti les effluves sur le tissu, et n'a pas jaugé la nécessité d'étouffer l'odeur du shit fumé recroquevillé près des serres. Ses jambes écartées quand il est assis, son regard indolent mais pas méchant, la provocation jusqu'aux traces de terre humide sur ses semelles qui souillent le sol des salles de classe, Drasko est une honte aux bonnes manières ; sa race injure.
Sa race injure ceux qui passent et qui le dévisagent car elle les force à le regarder. Penché au-dessus de sa propre ombre, il la fixe qui se dessine sur le goudron qui suinte. Dans son dos, à cause du soleil, nait de grandes tâches de transpiration, étouffées par le déodorant, sous chacune de ses aisselles. Il ira jusqu'au bout du jour ainsi, sans se soucier qu'elles s'effacent, sans se soucier que son corps bave suite à l'agression de la chaleur. Et plus le temps passe, plus il pue, plus il est indésirable mais impossible à éviter du regard tant il est grand et existant dans sa violence ni verbalisée, ni infligée. Drasko pue car il sent trop d'une puanteur viscérale et irrémédiable. Son être dégage un absolu fétide et macéré, comme une rancune amère envers un monde dans lequel il ne veut pas se fondre ; plus facile de se distinguer dans l'obscénité de son odeur, de sa présence abjecte, que dans la douceur dissolue des jeunesses les plus belles desquelles il s'est échappé.

— Drasko est né dans une forme de communauté auto-gérée du fond de la Serbie, où les familles avec des enfants à pouvoir se retrouvaient pour vivre à l'écart. L'objectif étant de ne pas séparer les familles mais aussi de préserver un climat non-dangereux et non anxiogène pour ces enfants particuliers.
— Le pouvoir de Drasko a été détecté dans une pharmacie, tandis qu'un enfant et son père se chargeaient de refaire les provisions. Drasko a tout bonnement annulé son pouvoir involontairement. S'en suit une discussion d'abord avec la famille présente, puis avec le père de Drasko le soir-même. Conscient qu'ils seraient sûrement amenés à voir leur enfant se faire arracher par le gouvernement autrement, son père restera en ville pour travailler tandis que sa mère l'accompagnera dans ce coin de brousse isolé.
— Drasko s'entend bien avec ses nouvelleaux ami-es qui se comptent sur les doigts d'une main, iels vont en classe dans l'école du coin et apprennent comme ils peuvent à canaliser leurs pouvoirs. Un phénomène inconscient se fait en partie : apaisés à l'idée que Drasko diminue leur pouvoir, la plupart se canalise eux-mêmes en pensant être "aidé-es" par le pouvoir de leur ami présent dans l'école.
— Toutefois, schéma classique, un autre de ses camarades dans une autre classe dérape. La maîtresse prévient les autres enseignant-es et toustes les enfants de la petite école sont confiné-es immédiatement. Expérience stressante pour des petit-es qui ne comprennent pas ce qu'il peut se passer, des autorités compétentes arrivent après plusieurs heures d'attente pour faire passer une forme de test de détection parmi les enfants, et les trois qui habitent dans le hameau sont vite suspectés de part leur proximité. Ils sont aussitôt isolés et arrachés à leur famille. Drasko garde un souvenir détaillé et traumatisant de cet événement car il a l'impression de ne pas avoir agi là où il pourrait le faire.
— Il rentre à l'école et se fond plutôt bien parmi les autres, de part un naturel sociable et une certaine forme de charisme posé. Affectueux avec les plus jeunes, notamment avec ceux qui viennent d'arriver auprès desquels il s'accapare et revendique un rôle de grand frère, et cela même avec les plus difficiles, il fait partie des populaires.
— En grandissant, l'aigreur abrupte prend de plus en plus de place, son caractère se forme et avec ça une forme de démonstration de force face à la vie. Il résiste plus, se sent moins à sa place, ouvre de plus en plus sa bouche là où il ne faudrait pas. Il se fait virer de l'équipe de baseball pour insolence au début du lycée et prend sa retraite parmi les populaires en même temps. Cette retraite est entraînée par une volonté de se retire du devoir et de la forme de responsabilité de surface des populaires à bien paraître. Lui n'a pas foncièrement changé entre avant et après ce départ, juste sa vision interne des choses (et sa manière de considérer l'académie), si bien que son départ n'a pas été compris, car impromptu et injustifié. Il est en conflit avec certain-es populaires qui ont mal pris ce détachement soudain et qui ont critiqué cet isolement.